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Cournot: Histoire et politique

Publié le 27/02/2008

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Les personnages appelés à figurer sur la scène de l'histoire (l'histoire comme on l'entend d'ordinaire et comme on doit le plus souvent l'entendre), monarques, tribuns, législateurs, guerriers, diplomates, ont bien le rôle actif, interviennent bien à titre de causes efficientes dans la détermination de chaque événement pris à part. Ils gagnent ou perdent les batailles, ils fomentent ou répriment les révoltes, ils rédigent les lois et les traités, ils fabriquent et votent les constitutions. Et comme ils arrivent eux-mêmes sur la scène à la suite des combinaisons de la politique, il semble d'abord que la politique engendre et mène tout le reste. Cependant, l'histoire politique est de toutes les parties de l'histoire celle où il entre visiblement le plus de fortuit, d'accidentel, et d'imprévu : de sorte que pour le philosophe « qui méprise le fait », qui ne se soucie guère de l'accidentel et du fortuit, si brillant que soit le météore, si retentissante que soit l'explosion, l'histoire tout entière courrait risque d'être frappée du même dédain que les caprices de la politique, s'il n'y avait plus d'apparence que de réalité dans cette conduite de l'histoire par la politique, comme par une roue maîtresse, et s'il ne fallait distinguer entre le caprice humain, cause des événements, et la raison des événements qui finit par prévaloir sur les caprices de la fortune et des hommes. COURNOT

QUESTIONNAIRE INDICATIF    • Importance de la notation « détermination de chaque événement pris à part «?  • Pourquoi semble-t-il d'abord « que la politique engendre et mène tout le reste «?  • Pourquoi « le philosophe « dédaignerait-il « l'histoire « s'il était effectif qu'il y eût « conduite de l'histoire par la politique «?  • Comment comprenez-vous :  — L'opposition : « cause des événements « et « raison des événements « ?  — « causes efficientes «?  — « caprices de Infortuné « ?  • Qu'est-ce que veut faire apparaître, ici, Cournot ?  Quel est l'enjeu véritable de ce texte ?  — Montrer que l'histoire n'est pas conduite par la politique ?  — Par les grands hommes ?  — Appréhensions diverses de l'Histoire ?  — Autre chose ?  • En quoi ce texte a-t-il un intérêt philosophique ?

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« Bergson, Les deux sources de la morale et de la religion Cournot, Considérations sur la marche des Idées et des évènements dans les temps modernes Hegel, La Raison dans l'histoir e Textes utiles COURNOTEn histoire [...], la curiosité anecdotique s'adonne à la recherche des causes, surtout pour montrer combien il y a dedisproportion entre la petitesse des causes et la grandeur des effets.

C'est (par exemple) le grain de sable dansl'uretère de Cromwell [...].

Mais l'histoire philosophique, la grande histoire, s'arrête peu à ces causes microscopiques.Elle cherche une raison suffisante des grands événements, c'est-à-dire une raison qui se mesure à l'importance desévénements ; et sans qu'elle ait la prétention d'y atteindre toujours, puisque cette raison peut se trouver hors de lasphère de ses investigations, il arrive souvent qu'elle la trouve.

Une configuration géographique, un relieforographique ne sont pas des causes au sens propre du mot : cependant personne ne s'étonnera d'y trouver la clef,l'explication ou la raison de l'histoire d'un pays réduite à ses grands traits, à ceux qui méritent de rester gravés dansla mémoire des hommes.

Le succès d'une conspiration, d'une émeute, d'un scrutin décidera d'une révolution dont ilfaut chercher la raison dans la caducité des vieilles institutions, dans le changement des moeurs et des croyances,ou à l'inverse dans le besoin de sortir du désordre et des intérêts alarmés.

Voilà ce que l'historien philosophe serachargé de faire ressortir, en laissant pour pâture à une curiosité frivole tels faits en eux-mêmes insignifiants, quipourtant figurent dans la chaîne des causes, mais qu'on est fondé à mettre sur le compte du hasard. HEGELDans l'histoire universelle nous avons affaire à l'Idée telle qu'elle se manifeste dans l'élément de la volonté et de laliberté humaines.

Ici la volonté est la base abstraite de la liberté, mais le produit qui en résulte forme l'existenceéthique du peuple.

Le premier principe de l'Idée est l'Idée elle-même, dans son abstraction ; l'autre principe estconstitué par les passions humaines.

Les deux ensemble forment la trame et le fil de l'histoire universelle.

L'Idée entant que telle est la réalité ; les passions sont le bras avec lequel elle gouverne.Ici ou là, les hommes défendent leurs buts particuliers contre le droit général; ils agissent librement.

Mais ce quiconstitue le fondement général, l'élément substantiel, le droit n'en est pas troublé.

Il en va de même pour l'ordre dumonde.

Ses éléments sont d'une part les passions, de l'autre la Raison.

Les passions constituent l'élément actif.Elles ne sont pas toujours opposées à l'ordre éthique ; bien au contraire, elles réalisent l'Universel.

En ce quiconcerne la morale des passions, il est évident qu'elles n'aspirent qu'à leur propre intérêt.

De ce côté ci, ellesapparaissent comme égoïstes et mauvaises.

Or ce qui est actif est toujours individuel : dans l'action je suis moi-même, c'est mon propre but que je cherche à accomplir.

Mais ce but peut être bon, et même universel.

L'intérêtpeut être tout à fait particulier mais il ne s'ensuit pas qu'il soit opposé à l'Universel.

L'Universel doit se réaliser par leparticulier.Nous disons donc que rien ne s'est fait sans être soutenu par l'intérêt de ceux qui y ont collaboré.

Cet intérêt, nousl'appelons passion lorsque refoulant tous les autres intérêts ou buts, l'individualité tout entière se projette sur unobjectif avec toutes les fibres intérieures de son vouloir et concentre dans ce but ses forces et tous ses besoins.En ce sens, nous devons dire que rien de grand ne s'est accompli dans le monde sans passion. Baruch SpinozaMais venons-en aux choses créées qui, toutes, sont déterminées à exister et à agir selon une manière précise etdéterminée.

Pour le comprendre clairement, prenons un exemple très simple.

Une pierre reçoit d'une cause extérieurequi la pousse une certaine quantité de mouvement, par laquelle elle continuera nécessairement de se mouvoir aprèsl'arrêt de l'impulsion externe.

Concevez maintenant, si vous voulez bien, que la pierre, tandis qu'elle continue de semouvoir, sache et pense qu'elle fait tout l'effort possible pour continuer de se mouvoir.

Cette pierre, assurémentpuisqu'elle n'est consciente que de son effort, [...] croira être libre et ne persévérer dans son mouvement que par laseule raison qu'elle le désire.

Telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent d'avoir et qui consisteen cela seul que les hommes sont conscients de leurs désirs et ignorants des causes qui les déterminent.

C'est ainsiqu'un enfant croit désirer librement le lait et un jeune garçon irrité vouloir se venger s'il est irrité, mais fuir s'il estcraintif.

[...] PopperIl n'y a aucun doute que la prise de conscience que l'homme est un animal et que le désir de nous voir faire partiede la nature soient l'argument philosophique fondamental en faveur du déterminisme laplacien et de la théorie de lafermeture causale du Monde 1.

Je crois que la raison est juste; si la nature était entièrement déterministe, leroyaume des activités humaines le serait aussi.

Il n'y aurait, en fait, aucune action, mais tout au plus l'apparenced'actions.

Mais l'argument opposé est également solide.

Si l'homme est libre, au moins en partie, la nature l'estaussi; et le Monde 1, physique, est ouvert.

Et il y a toutes les raisons de croire que l'homme est libre, du moins enpartie.

Le point de vue opposé – celui de Laplace – mène à la prédestination.

Il conduit à l'idée que, il y a desbillions d'années, les particules élémentaires du Monde 1 contenaient la poésie d'Homère, la philosophie de Platon etles symphonies de Beethoven, comme une graine contient la plante; il mène à l'idée que l'histoire humaine estprédestinée et, avec elle, toutes les manifestations de la créativité humaine.

Et la version de la théorie quantiqueest tout aussi mauvaise.

Elle fait de la créativité humaine une question de simple hasard.

Il y a sans doute unélément de hasard.

Cependant, la théorie selon laquelle la création d'oeuvres d'art ou de musique peut, en dernière. »

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