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Dans quelles mesures le langage exprime-t-il la réalité ?

Publié le 22/08/2005

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langage
Ainsi, par exemple, agathon (bien) est composé de agaston (admirable) et de thoon (rapide) ; ce n'est pas tout : le mot thoon pourrait sans doute être tiré de noms différents, et ceux-là, d'autres encore, jusqu'à ce qu'on parvienne à un élément qui ne puisse plus être rapporté à d'autres noms. f. La justesse des noms primitifsLes noms primitifs ne pouvant être expliqués par d'autres noms, il faut faire intervenir la notion d'imitation. Leur justesse consisterait dans une certaine imitation des objets. Selon Socrate, le nom serait «une façon de mimer par la voix ce que l'on mime et nomme, quand on se sert de la voix pour mimer ce qu'on mime». Mais si l'on ne veut pas soutenir cette absurdité que les «gens qui imitent les brebis, les coqs et les autres animaux» nomment ce qu'ils miment, l'imitation devra être obtenue au moyen des syllabes et des sons élémentaires d'une langue, de ses voyelles et de ses consonnes, et ne porter ni sur les sons émis par les choses ainsi nommées (sans quoi elle se confondrait avec la musique), ni sur la forme ou la couleur (ce qui est le propre de la peinture) mais sur ce que les choses sont en elles-mêmes, sur leur essence. Et puisque c'est avec des syllabes et des lettres que se fait l'imitation de l'essence, il convient d'abord de distinguer les éléments, les voyelles, les muettes, les demi-voyelles et de les classer par espèces. Puis on distinguera correctement tous les êtres auxquels doivent s'appliquer les noms. Dès lors, on saura attribuer chaque élément, d'après sa ressemblance avec l'objet. Ces distinctions nécessaires, Socrate se déclare incapable de les faire.

Analyse du sujet :

 

l  L'expression «dans quelles mesure suggère :

1.   qu'il y a plusieurs aspects selon lesquels le langage exprime la réalité ;

2.   que le langage n'exprime pas toujours la réalité ou ne l'exprime que partiellement.

l  Il faudra donc aussi se demander dans quelles mesures le langage peut ne pas exprimer la réalité. C'est une part importante du traitement du sujet.

1.   Tout d'abord, il est possible de mentir, mais c'est une utilisation déviante du langage, la fonction première du langage étant de communiquer.

2.   Lorsque nous ne mentons pas, en quoi le langage peut-il ne pas exprimer la réalité ?

  Il peut exprimer la perception que nous avons de la réalité, qui peut dépendre de nous.

  Il peut exprimer ce que nous pouvons savoir de la réalité, sachant que nous ne connaissons pas tout de la réalité.

  Il y a des choses que le langage ne peut pas exprimer : par exemple les nuances d'un sentiment, de quelque chose que nous ressentons, de quelque chose d'unique, de ce qui est particulier. Le langage, en tant que moyen de communication sert à exprimer des choses générales, et non l'infinie diversité des choses particulières.

  Le but du langage est la communication entre les hommes, et non la description du monde, il faut donc que renoncer à décrire le monde dans toute sa diversité pour s'en tenir à des généralités communicables.

l  Mais que signifie exprimer ?

1.   Traduire en mots. Mais il est arbitraire d'associer tel signifiant (= le mot) à tel signifié (= ce que nous désignons par ce mot). Cf. l'arbitraire du signe chez Saussure (voir plus loin).

2.   On peut considérer que le langage donne forme à la réalité, le découpe en unités compréhensibles par nous. C'est donc, en quelque sorte, le langage qui fait la réalité.

l  Il faudra se demander si la part de réalité qui n'est pas exprimée ou ne peut pas l'être peut nous être connue, accessible. Exemple des Inuits qui font la différence entre plusieurs types de neige, alors que nous ne la faisons pas, ou des nuances de rouge : il semble que le langage permette de découper la réalité.

l  Se pose alors le problème de la pluralité des langues : des langues différentes expriment-elles ou peuvent-elle exprimer la même réalité ? Qu'y a-t-il de commun entre ces langues ?

l  Il faut aussi se demander ce qu'est la réalité : la réalité est ce qui est, mais cela peut aussi bien désigner la nature que la réalité sociale ou socio-politique, qui est donc propre à une société donnée.

 

Problématisation :

 

Il faudra se demander si le langage exprime une réalité pré-existante --- mais, dans ce cas, comment savoir s'il s'agit bien de la réalité, et non simplement de la perception que nous en avons ? --- ou s'il construit la réalité, ou du moins notre accès à la réalité.

langage

« 1. a) Cas du mensonge et de la vérité.Il existe au moins un cas dans lequel le langage n'exprime pas la réalité : le cas du mensonge. b) Mais il s'agit d'un cas pathologique d'utilisation du langage.

Le langage sert normalement auxhommes à se communiquer des informations sur la réalité.On peut faire un parallèle avec les abeilles : en quel sens peut-on parler d'un langage des abeilles ? Dans lesens où elles sont capables de se communiquer des informations sur leur milieu ou sur un éventuel danger. Texte : Platon, Cratyle , traduction Émile Chambry. « Socrate - (...) Si le nom est un instrument, en nous en servant pour nommer, que faisons-nous ? Hermogène – C'est ce que je ne puis dire. Socrate – Ne nous apprenons-nous pas quelque chose les uns aux autres, et ne distinguons-nous pas leschoses suivant leur nature ?» Entretien de Socrate avec Hermogène (385a-427e) a.

Les noms sont faits pour instruireSocrate fait d'abord admettre à Hermogène que les choses ont une existence stable, «un certain êtrepermanent qui n'est ni relatif à nous ni dépendant de nous».

Il en est de même des actes qui, eux aussi, sontune forme déterminée de réalité.

C'est donc en conformité avec leur propre nature qu'ils se font, et non passelon notre façon de voir.

Par exemple, si nous voulons couper, nous devons couper suivant la façon naturellede couper et en employant ce qu'il faut pour couper.

Or parler et donc aussi nommer sont des actes et le nomest un instrument qui sert à instruire et à distinguer la réalité comme la navette fait le tissu.

Il s'ensuit qu'ilfaut nommer les choses «suivant la manière et le moyen qu'elles ont naturellement de nommer et d'êtrenommées» et qu'un bon instructeur doit user du nom comme il faut, c'est-à-dire de «façon propre à instruire»comme un bon tisserand se sert comme il faut de la navette, c'est-à-dire de «façon propre au tissage». b.

Établir les noms est un art pratiqué par les législateurs En second lieu, Socrate convainc Hermogènequ'établir les noms est un art difficile.

Si la navette est l'oeuvre du menuisier, de quel artisan le nom est-ill'ouvrage ? La réponse de Socrate paraît étonnante : «N'est-ce pas la loi (l'usage) à ton avis qui les met ànotre disposition? – Apparemment...

– Ainsi Hermogène, ce n'est pas au premier venu qu'il appartient d'établirle nom, mais à un faiseur de noms ; et celui-là, semble-t-il, est le législateur...» (Commentaire : on sait quedans l'Antiquité, le terme de nomos désignait la loi aussi bien que l'usage.

Les premières lois, en effet, nefurent que les premiers usages.

Et d'où vinrent d'abord les usages, si ce n'est des peuples eux-mêmes ?Certains commentateurs voient donc dans cette notion de législateur le peuple avec ses chefs et c'est lui quiaurait peu à peu créé la langue.

Mais d'autres y voient un personnage mythique ou un homme doué d'uninstinct divin, d'autres enfin les premiers hommes.

Socrate laisse dans le vague cette notion.) c.

La tâche du législateurSelon Socrate, de même que le menuisier qui fabrique une navette pour le tissage a les yeux fixés sur la formede la navette (la navette en soi), de même le législateur devrait savoir ce qu'est le «nom en soi», «le nomnaturellement approprié à chaque objet» pour l'imposer aux sons et aux syllabes.

Il y aurait donc pour chaquechose un nom unique mais qui se trouverait appliqué par le «faiseur de nom» ou le législateur à une matièresonore variable selon les lieux.

D'où les variétés des langues.

«De même que tous les forgerons n'opèrent passur le même fer en fabriquant pour le même but le même instrument», de même chaque législateur n'opéreraitpas sur les mêmes syllabes chez les Grecs ou les Barbares mais donnerait néanmoins à toutes «la forme dunom requise par chaque objet». d.

Le législateur devra être guidé par le dialecticienEt qui devra diriger et juger ensuite l'ouvrage du législateur ? N'est-ce pas celui même qui s'en servira? Orcelui-là est l'homme qui connaît l'art d'interroger et en même temps celui de répondre, c'est-à-dire ledialecticien.

Ainsi le nom, ouvrage du législateur, devra, pour être bon, être fait sous la direction dudialecticien ou de la dialectique.

Socrate en conclut que Cratyle a raison de considérer les noms comme justespar nature et non par l'effet d'une convention.

Il y aurait une seule juste dénomination pour chaque chosequ'imitent plus ou moins bien les noms des différentes langues.

Il reste maintenant à Socrate à expliquer enquoi consiste cette justesse naturelle du nom. e.

Des noms dérivés aux noms primitifsIl faut d'abord, dit Socrate, examiner les noms appliqués à ce qui a, par nature, une existence éternelle.

Carc'est là surtout que l'attribution des noms doit avoir été faite avec soin.

Socrate passe alors en revue troisgroupes de noms dont il indique l'étymologie : ceux des Dieux, ceux des astres et des phénomènes naturels,ceux des notions morales.

Mais ces noms sont des dérivés et des composés.

Pour les interpréter, il fautremonter aux noms primitifs dont ils proviennent.

Ainsi, par exemple, agathon (bien) est composé de agaston(admirable) et de thoon (rapide) ; ce n'est pas tout : le mot thoon pourrait sans doute être tiré de noms. »

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