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DESCARTES: je pense donc je suis

Publié le 16/04/2005

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descartes
Et remarquant que cette vérité : je pense donc je suis était si ferme et si assurée que toutes les plus extravagantes suppositions étaient incapables de l'ébranler, je jugeais que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de la philosophie.... Après cela je considérai en général ce qui est requis à une proposition pour être vraie et certaine, car puisque je venais d'en trouver une que je savais être telle, je pensais que je devais aussi savoir en quoi consiste cette certitude. Et ayant remarqué qu'il n'y a rien du tout en ceci : je pense donc je suis, qui m'assure que je dis la vérité sinon que je vois très clairement que pour penser il faut être : je jugeais que je pouvais prendre pour règle générale que les choses que nous concevons fort clairement et fort distinctement sont toutes vraies. DESCARTES
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« que je rêve, je suis persuadé que ce que je vois et sens est vrai & réel, et pourtant ce n'est qu'illusion.

Lesentiment que j'ai pendant la veille que tout ce qui m'entoure est vrai & réel n'est donc pas une preuvesuffisante de la réalité du monde, puisque ce sentiment est tout aussi fort durant mes rêves.

Par suite jedois, si je cherche la vérité : « feindre que toutes les choses qui m'étaient jamais entrées en l'espritn'étaient non plus vraies que l'illusion des songes ».Mais le doute de Descartes va bien plus loin dans la mesure où il rejette aussi les évidences intellectuelles,les vérités mathématiques.

« Je rejetai comme fausses toutes les raisons que j'avais prises auparavant pourdémonstrations.

»Nous voilà perdu dans ce que Descartes appelle « l'océan du doute ».

Je dois feindre que tout ce quim'entoure n'est qu'illusion, que mon corps n'existe pas, et que tout ce que je pense, imagine, sens, meremémore est faux.

Ce doute est radical, total, exorbitant.

Quelque chose peut-il résister ? Vais-je me noyerdans cet océan ? Où trouver « le roc ou l'argile » sur quoi tout reconstruire ? On mesure ici les exigences derigueur et de radicalité de notre auteur, et à quel point il a pris acte de la suspicion que la révolutiongaliléenne avait jetée sur les sens (qui nous ont assuré que le soleil tournait autour de la Terre) et sur ceque la science avait cru pouvoir démontrer.« Mais aussitôt après je pris garde que, cependant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallaitnécessairement que moi, qui pensais, fusse quelque chose.

Et remarquant que cette vérité : je pense doncje suis, était si ferme et si assurée, que les plus extravagantes suppositions des sceptiques n'étaient pascapables de l'ébranler, je jugeai que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de laphilosophie que je cherchais.

»Il y a un fait qui échappe au doute ; mon existence comme pensée.

Que ce que je pense soit vrai ou faux,je pense.

Et si je pense, je suis.

Le néant ne peut pas penser.

La première certitude que j'ai est donc cellede mon existence, mais comme pure pensée, puisque, en toute rigueur, je n'ai pas encore de preuve del'existence de mon corps.

Quand bien même je nierais que le monde existe, que mon corps existe, que jepuisse penser correctement, je ne pourrais remettre en cause ce fait : je pense, et par suite, je suis.

Lavolonté sceptique de douter de tout, l'idée qu'aucune vérité n'est accessible à l'homme, se brise sur ce fait :je pense.

Voilà le roc, voilà l'argile.

Voilà le point ferme grâce auquel j'échappe à la noyade dans l'océan dudoute, par lequel je retrouverai la terre ferme de la science vraie.La difficulté provient de l'interprétation à donner à ce « je ».

Il n'est pas l'individu concret.

Ce n'est pasDescartes, homme du XVIIième siècle, c'est tout individu pensant qui peut dire « je pense donc je suis »,pour peu qu'il refasse, pour lui-même, l'expérience entreprise.Ce « je » est, par définition, désincarné ; tout ce que je peux affirmer, à ce moment, de l'itinérairecartésien, c'est mon existence comme pensée, puisque, répétons-le, je dois encore, temporairement, nierl'existence du corps.Les deux conséquences majeures que Descartes tire de sa découverte sont d'une importance cruciale pourl'histoire de la philosophie.

D'une part Descartes montre que la nature de la pensée et celle de la matière sot différentes.

Ce qu'onnomme dualisme : « Je connus de là que j'étais une substance dont toute l'essence ou la nature n'est quede penser […] En sorte que moi, cad l'âme par laquelle je suis ce que je suis, est entièrement distincte ducorps.

» Le corps, en effet, n'est qu'une portion de matière, ayant une forme, et susceptible de recevoir dumouvement.

La pensée est radicalement différente, c'est la faculté de concevoir, imaginer, sentir, vouloir.Descartes ne nie pas que –en l'homme- il y ait interaction du corps et de la pensée, et il consacrera mêmeun ouvrage, « Les Passions de l'âme » (1649), à ce qu'on nommerait aujourd'hui biologie des passions.

Mais iljette grâce au dualisme les bases de la science moderne, en limitant la physique à l'étude de la matière etde ses propriétés.

Il faut se souvenir qu'Aristote considérait l'étude de l'âme comme le couronnement de laphysique, et que Pascal aura à batailler contre l'idée que la « nature a horreur du vide », comme si lamatière était animée d'intention.

D'autre part, dans l'expérience du « cogito », du « je pense », je prends conscience de moi-même commepensée.

Cela amènera notre auteur à identifier pensée et conscience, ce que contestera, outre Leibniz &Spinoza, Freud. Avec le « je pense donc je suis », Descartes place la conscience, le sujet, à la racine de toute connaissancepossible.

La conséquence essentielle est le primat de la conscience, et sa différence d'avec la matière.Redonner à l'homme une place dans un univers infini et vide de Dieu, assurer la dignité de la conscience, etjeter les bases de la science moderne, tels sont les objectifs que la métaphysique cartésienne s'estassignée.. »

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