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Descartes: la vraie différence entre les hommes et les bêtes

Publié le 26/09/2018

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« De tous les arguments qui nous persuadent que les bêtes sont dénuées de pensée, le principal, à mon avis, est que bien que les unes soient plus parfaites que les autres dans une même espèce, tout de même que chez les hommes, comme on peut voir chez les chevaux et chez les 5 chiens, dont les uns apprennent beaucoup plus aisément que d’autres ce qu’on leur enseigne; et que bien que toutes nous signifient très facilement leurs impulsions naturelles, telles que la colère, la crainte, la faim, ou autres états semblables, par la voix ou par d’autres mouvements du corps, jamais cependant jusqu’à ce jour on n’a pu observer 10 qu’aucun animal en soit venu à ce point de perfection d’user d’un véritable langage, c’est-à-dire d’exprimer soit par la voix, soit par les gestes quelque chose qui puisse se rapporter à la seule pensée et non à l’impulsion naturelle. Ce langage est en effet le seul signe certain d’une pensée latente dans le corps; tous les hommes en usent, même ceux qui 15 sont stupides ou privés d’esprit, ceux auxquels manquent la langue et les organes de la voix, mais aucune bête ne peut en user; c’est pourquoi il est permis de prendre le langage pour la vraie différence entre les hommes et les bêtes.» De la pensée, il faut donc bien accorder tout ou rien aux animaux. Il faut donc bien concevoir également la pensée comme une nature rationnelle, indépendante de notre conformation matérielle. C'est ce qui permet de comprendre que Descartes attribue avec confiance la pensée aux «stupides» et «privés d'esprit», quoique certains d'entre eux n'émettent que des grognements semblables aux cris des animaux, et que d'autres soient cloîtrés dans le silence. Le fou, ainsi, reste une personne et reste homme. B. Le langage est bien le propre de l'homme En conséquence, si l'on recherche un caractère extérieur, empirique, propre à l'humain, il est «permis de prendre» la possession du langage, mais seulement en ce qu'elle est généralement corrélée à ce qui fait intrinsèquement l'homme, à savoir la pensée, dont le siège est le for intérieur de chaque individu, le langage n'en étant que la manifestation. C. L'homme pensant serait donc seul dans la nature La pensée cartésienne réserve donc bien une place à part à l'homme dans le monde. Seul être pensant de la nature, l'homme en est légitimement «comme maître et possesseur», selon les termes du Discours de la méthode. Il peut donc y déployer son activité technique, y poursuivre ses propres fins, sans douter du caractère naturel et légitime de son anthropocentrisme. C'est ainsi que Descartes peut ajouter un peu plus loin, non sans gourmandise: «Mon opinion [que les bêtes ne pensent pas] n'est pas si cruelle aux animaux qu'elle est favorable aux hommes, je dis à ceux qui ne sont point attachés aux rêveries de Pythagore, puisqu'elle les garantit du soupçon même de crime quand ils mangent ou tuent les animaux.»
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« 0 Les clés du sujet BIEN LIRE LE TEXTE ~ Les termes de ce texte ne présentent guère de difficulté d'interpré­ tation.

Il faut toutefois prendre garde à ne pas sous-estimer l'intensité de qualifications comme «stupide» (débile mental) et «privé d'esprit» (fou), et à bien comprendre «latente» non au sens courant de «en puis­ sance» mais au sens propre de «présent mais caché».

L'analyse de l'ar­ gumentation, en revanche, demande une grande attention, portée tant aux articulations du texte qu'aux nuances significatives («véritable langage», «permis de prendre»), et aux oppositions lexicales («nous signifient»/« exprimer») introduites par Descartes.

~ Thème: le fondement de la distinction entre l'homme et l'animal.

~ Thèse: un véritable langage est le propre de l'homme, ce qui suffit à prouver qu'il est le s.eul être pensant de la nature.

~ Plan du texte : -lignes 1 et 2 : le but de la démonstration est de prouver que les bêtes ne pensent pas; - lignes 2 à 9: concessions apparentes à la thèse adverse: quelques comportements semblent rapprocher les bêtes de l'homme; - lignes 9 à 16: démonstration de la thèse: a) lignes 9 à 14: l'expérience ne présente aucun cas d'animal doué de langage véritable (exprimant un état de la pensée), seule mani­ festation extérieure de la pensée; b) lignes 14 à 16: tous les hommes en revanche utilisent un tel langage; - lignes 16 à 18: conclusion: la possession du langage prouve donc la différence de nature entre l'homme et les animaux.

RECHERCHER L'INTÉRÊT PHILOSOPHIQUE ~ Ce texte est intéressant à plusieurs titres, et d'abord du point de vue de l'anthropologie, en ce qu'il reconnaît en l'homme un cas unique dans la nature.

Mais il apporte aussi des éléments de poids à la réflexion sur le langage, qu'il ne permet pas de réduire à un simple système de signes.

Dans ses thèses et dans sa méthode, ce texte concerne également les questions liées à la connaissance du vivant.

Est-il possible, démonstra­ tivement, de conclure, à partir de l'examen empirique (donc concernant la substance étendue) des animaux, à l'absence en eux de quelque chose. »

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