Devoir de Philosophie

DESCARTES: Savoir, s'il est mieux d'être gai ou content, en imaginant les biens qu'on possède être plus grands et plus estimables...

Publié le 17/04/2009

Extrait du document

descartes
Madame, je me suis quelquefois proposé un doute : savoir, s'il est mieux d'être gai ou content, en imaginant les biens qu'on possède être plus grands et plus estimables qu'ils ne sont, et ignorant ou ne s'arrêtant pas à considérer ceux qui manquent, que d'avoir plus de considération et de savoir, pour connaître la juste valeur des uns et des autres, et qu'on devienne plus triste. Si je pensais que le souverain bien fût la joie, je ne douterais point qu'on ne dût tâcher de se rendre joyeux, à quelque prix que ce peut être, et j'approuverais la brutalité de ceux qui noient leurs déplaisirs dans le vin, ou les étourdissent avec du pétun . Mais je distingue entre le souverain bien, qui consiste en l'exercice de la vertu, ou, ce qui est le même, en la possession de tous les biens dont l'acquisition dépend de notre libre arbitre, et la satisfaction d'esprit qui suit de cette acquisition. C'est pourquoi, voyant que c'est une plus grande perfection de connaître la vérité, encore même qu'elle soit à notre désavantage, que l'ignorer, j'avoue qu'il vaut mieux être moins gai et avoir plus de connaissance. Ainsi je n'approuve point qu'on tâche à se tromper, en se repaissant de fausses imaginations; car tout le plaisir qui en revient, ne peut toucher que la superficie de l'âme, laquelle sent cependant une amertume intérieure, en s'apercevant qu'ils sont faux. DESCARTES

La vérité est un des plus importants problèmes de la tradition classique. Sa recherche a constitué le but de la philosophie au moins jusqu’à Nietzsche. Pour Platon, par exemple, seule la philosophie pouvait permettre aux hommes d’accéder aux vérités, c’est-à-dire aux Idées intelligibles. Pourtant, comme l’ont affirmé beaucoup de philosophes la connaissance peut faire souffrir. Comme le disait Pascal, par exemple, seul l’homme connaît sa misère parce qu’il a une conscience et cette connaissance le pousse à se divertir pour oublier. Descartes prend donc acte de ce lien entre connaissance et souffrance et se demande dans ce texte ce qui est préférable : la vérité ou la joie. En effet, si l’illusion nous rend heureux, ne faut-il pas persévérer dans l’erreur ? Pourquoi choisir la vérité ? Quel bien nous donne-t-elle ?

 

• Il s'agit ici de « connaissance « de quoi? • Sur quoi repose la position de Descartes? Qu'en pensez-vous? — Que pensez-vous de la distinction entre ce en quoi consiste le souverain bien et la satisfaction d'esprit qui suit cette acquisition ? — Que pensez-vous de l'identification entre «exercice de la vertu « et « possession de tous les biens dont l'acquisition dépend de notre libre-arbitre «?

descartes

« - Une opinion commune affirme en effet que l'ignorant est plus heureux que celui qui sait.

Sophocle affirmait ainsidans Ajax que « ne pas penser est le charme de la vie ».

De même l'Ecclésiaste de L'ancien testament déclare que « là où il a beaucoup de sagesse, il a beaucoup de douleurs » Longtemps après( au XIXème siècle), Schopenhauerreprendra le thème en affirmant que le génie, ayant vu la vérité et possédant une vision plus pénétrante et plusclaire du monde, souffrira d'autant plus. - Descartes est conscient de la souffrance qu'entraîne la connaissance, alors que l'ignorance est rattachée à la joie.En effet, celui qui ne possède que des connaissances limitées aura par suite un jugement limité.

Ainsi, enconsidérant ce qu'il a, il ne peut ou veut point voir la véritable nature de ces biens puisqu'il ne peut comparer avecd'autres.

Descartes parle aussi de « ne pas voir ceux qui manquent » : il désigne alors un esprit qui ne s'interrogepas sur lui-même et sur le monde.

Le philosophe marque bien l'erreur de jugement : l'ignorant voit les biens qu'ilspossèdent « plus grands et plus estimables qu'ils ne le sont ».

Dès lors, on comprend pourquoi l'ignorance ou l'erreurpeuvent rendre heureux : parce qu'elles nous montrent les choses comme étant plus belles, plus favorables. - A l'inverse, celui qui a plus de « savoirs » et qui voit les choses dans leur vérité, a par suite un jugement juste cequ'il possède autant en lui-même qu'à l'extérieur.

Il sait la piètre valeur de ce qu'il a et de ce qu'il peut faire, parcomparaison à une multitude d'autres choses.

Ainsi, par exemple, l'enfant sera content avec une pièce de 50 centspensant avoir beaucoup d'argent, alors que l'adulte, comme il connaît le système monétaire, sait très bien la valeurde cette pièce.

L'homme donc qui a connaissance des vraies valeurs de ce qu'il possède n'éprouve pas la joie decelui qui se trompe. Le souverain Bien n'est pas la joie - Pourtant, nous dit Descartes, la vérité est préférable à l'illusion qui nous rend heureux.

Il avance comme raisonque la joie n'est pas le souverain Bien, c'est-à-dire le but suprême de l'existence.

Pour les philosophes antiques, telAristote, le souverain Bien résidait dans le bonheur.

Cependant pour lui, le Bonheur consistait au plaisir résultant del'activité de contemplation, qui correspond à l'activité de l'âme qui cherche la vérité.

Le bonheur même chez lesAntiques ne consistait pas en la joie provenant de l'erreur.

Descartes nous dit que si la joie était le Bien parexcellence, alors tous les moyens pour y arriver seraient justifier.

L'auteur nous dit même qu'il approuveraitl'ivrognerie et tout autre moyen artificiel qui nous conduirait à la joie. - Cependant, le véritable Bien pour l'auteur réside dans l'exercice de la Vertu qu'il définit par « la possession detous les biens dont l'acquisition dépend de notre libre arbitre ».

Il écrit effectivement que cette possession et lavertu reviennent au même.

La vertu consiste donc à développer les facultés qui sont en notre pouvoir.

Descartesplace en effet la principale perfection de l'homme dans son libre-arbitre.

Ce dernier est la faculté qui permet àl'homme d'être libre, c'est-à-dire de pouvoir ses actions, ses jugements, ses opinions.

L'homme peut donc sedéterminer de façon rationnelle.

C'est cette utilisation de la raison que suppose le libre-arbitre qui constituel'attitude vertueuse. La vertu est donc cette activité qui a pour but de permettre à l'homme d'obtenir les biens qui dépendent de saliberté et non d'autres choses qui sont soumises à une autre volonté.

La construction de la phrase rappelle ladistinction que les Stoïciens font entre les choses qui dépendent de nous et les choses qui n'en dépendent pas.

- Descartes fait une différence entre l'exercice de la vertu et la « satisfaction d'esprit » qui en résulte.

Or, seul lavertu constitue le souverain Bien et non le sentiment qui accompagne l'exercice de la raison.

Peu importe que cesoit la tristesse ou la joie qui accompagne l'exercice de la raison, de la vertu.

Nous l'avons dit, c'est le choix enfaveur de la vérité que fait la volonté qui donne toute sa grandeur et sa perfection à l'homme. Il faut choisir la vérité - Dès lors pour Descartes, il vaut mieux connaître la vérité, faire usage de sa raison et de sa capacité à vouloir lebien, de son libre-arbitre que de s'illusionner.

Le texte semble ici faire de la recherche de la vérité une obligationmorale.

Ce qui doit nous pousser à préférer la vérité, c'est qu'elle est d'une « plus grande perfection », qu'elleconstitue le souverain Bien.

Le philosophe ne se soucie pas du sentiment et en particulier de la tristesse que peutressentir celui qui préfère la vérité. Pourtant, Descartes affirme paradoxalement que la joie que ressent l'âme en s'illusionnant sur ce qu'elle possèden'est pas une joie véritable.

Il parle en effet d'une joie qui n'atteint que « la superficie de l'âme » et n'agit pas enprofondeur.

Dans ces lignes, l'âme semble pouvoir se dédoubler : en effet, d'un côté, l'homme par « de faussesimaginations », par des illusions se trompent et cela leur procure de la joie mais d'un autre côté, l'âme sait qu'ilssont « faux ».

La joie superficielle se doublerait donc d'un sentiment désagréable d' « amertume ».

L'ignorance alorsne procurerait qu'une fausse joie et ne serait pas conforme au souverain Bien.

Descartes semble alors condamnerfermement le fait de se tromper soi-même et de se rendre ignorant.

Mais il semble que pour ce faire, il soit obliger derevenir sur ce qu'il a avancé au début du texte puisque l'ignorance ne donne pas une joie pleine et réelle. - Nietzsche s'opposera par suite à cette identité entre vérité et souverain Bien et réhabilitera le mensonge ou. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles