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En quoi le Mal pose-t-il un problème philosophique ?

Publié le 11/06/2009

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Le problème métaphysique est différent du problème moral, en ce qui concerne le Mal. Nous avons étudié, en Morale , le problème du Bien et du Mal comme dilemme de l'action morale et de l'examen de conscience. Ici c'est du problème métaphysique qu'il s'agit ; il englobe le problème moral dans la mesure où le mal moral est un cas particulier du Mal. L'existence du Mal soulève pour la réflexion philosophique de nombreuses questions et de nombreuses difficultés. La liste des maux constatables serait longue. On convient de distinguer trois genres : Le mal physique (infirmités, douleurs physiques, maladies) ; Le mal moral (faute morale, délits et crimes) ; Le mal métaphysique (constatation que notre monde est imparfait de toutes les manières, qu'une injustice métaphysique règne sur l'Univers, fléaux en tous genres, morts d'innocents, catastrophes naturelles ou cosmiques, possibilité des deux autres ordres de maux.) Le Mal pose des problèmes qui se situent à des plans différents ou qui retentissent sur des plans différents. — I — Les faux problèmes du Mal. Certaines consciences tourmentées ou dépressives posent le problème du Mal en des termes pseudo-philosophiques et relèvent de la psycho-pathologie. Elles dramatisent et exagèrent le problème du Mal. 1 — L'angoisse. L'angoisse est une maladie de la conscience (névrose d'angoisse) lorsqu'elle devient un état quasi-permanent ou une série de crises éclatant dans la conscience sans que celle-ci soit dans une situation réelle actuelle angoissante, et sans que l'angoisse ait un objet précis. La névrose d'angoisse est un genre de névrose obsessionnelle et elle se soigne.

« transmise par Cicéron, formule nettement combien le Mal est incompatible avec toute religion (le la ProvidenceDivine : Ou bien Dieu veut supprimer les maux et il ne le peut, ou il le veut et le peut ; s'il le veut et ne le peut,c'est qu'il est sans force, ce qui répugne à Dieu ; s'il le peut et ne le veut, c'est qu'il nous hait, ce qui n'est pasmoins contraire à Dieu ; s'il ne le peut ni ne le veut, il n'a ni force ni amour, il n'est donc point Dieu ; s'il le veut et lepeut — et c'est la seule solution qui lui convienne —, d'où viennent donc les maux et pourquoi ne les supprime-t-ilpas ? » (Cicéron.

De Natura Deorum).Bergson, dans Les deux Sources de la Morale et de la Religion a montré que le problème de la mort est un problèmeposé par l'intelligence et que celle-ci, livrée à elle-même, en déduirait qu'il ne sert à rien d'agir, ce qui paralyserait lavie.

La religion interviendrait alors comme une force anti-intellectuelle, neutralisant le problème de la mort eninventant les Dieux et la vie éternelle.C'est pourquoi parmi les problèmes que pose le Mal, celui de la Mort est le plus facilement résolu par la religion.

Ellele nie même comme mal.

Elle utilise l'anxiété du post-mortem pour moraliser la conduite.Mais le Mal physique, social, métaphysique met en question la toute puissance et l'infinie bonté de Dieu.La tendance spontanée réactionnelle, qui est d'ailleurs celle de l'empirisme naïf, est d'imaginer une « explication »dualiste : le Mal existe, de même que le Bien, et ces deux forces se disputent le Monde.

Telle est l'essence dumanichéisme, doctrine vivace enracinée dans l'âme populaire qui éprouve les deux états de santé et de maladie, debonheur et de malheur, de bien-être et de malaise, de même qu'il y a le jour et la nuit, la lumière et l'ombre, les bonset les méchants, l'âme et le corps...

De là la personnification de ces deux forces dans l'imagerie populaire, reprisepar certaines religions :— Un prince des lumières, prince du Bien, Dieu de Lumière, régnant au ciel.— Un prince des ténèbres, prince du Mal, Malin-Génie ou Maudit, régnant sous la terre, dans les régions de l'enfer.Les deux images du « Bon Dieu » et de « Satan » sont des expressions de ce même manichéisme dont chaquereligion particulière s'accommode avec plus ou moins de subtilités, puisqu'il faut concilier ces deux propositionsinconciliables : le Mal règne sur la Terre (« Satan conduit le bal »), Dieu est le plus fort.La résolution strictement religieuse du problème se fait en invoquant des points de dogme différents qui retentissentclans ce domaine. 3 — Enfin l'existence du Mal pose des problèmes à la philosophie.

Aucun système philosophique ne peut ignorer leMal.

Nous avons vu ci-dessus que la découverte du Mal ou de la mort comme problèmes, est un des aiguillons de laréflexion philosophique. A — Le pessimisme philosophique est autre chose que le pessimisme moral.

Celui-ci (La Rochefoucauld) ne croit pasen la vertu ni en l'altruisme.

Le pessimisme philosophique pense que l'existence est souffrance et qu'il n'y a pasd'espoir.De là des philosophies tragiques (Schopenhauer, Kierkegaard, Unamuno), qui aboutissent soit à une évasioncompensatrice dans l'art (Schopenhauer), soit à un quichottisme ( Unamuno ), soit au désespoir, lui-même assumé (Kierkegaard) ou nié dans le suicide (Jules Lequier ). B — La négation du Mal métaphysique.

C'est la théorie de Leibniz qui est l'illustration la plus célèbre de cetteposition qui est en même temps alliée, chez lui, à une Théodicée.

« Tout est pour le mieux dans le meilleur desmondes possibles ».

C'est cette formule que Voltaire a voulu stigmatiser et ridiculiser en écrivant le conte « Candide».

Leibniz voulait dire que notre monde, quoique comportant le Mal, en comporte le moins possible, et que ce malfait partie du plan harmonique de l'Univers.Une manière plus ancienne et plus radicale de nier le Mal métaphysique remonte à Démocrite et à Épicure.

Lamatière étant précisément matière, et lieu de mécanismes aveugles ou de rencontres fortuites, il n'y a de « mal »que du point de vue de la conscience humaine.

Parmi les maux les plus dangereux, Épicure dénonce la crainte desDieux, source de terreurs inutiles. La négation — ou la minimisation — du Mal métaphysique entraîne l'optimisme philosophique et les philosophies del'Espérance. C — La négation active du Mal comme néant.

Le Mal est un non-être, il serait seulement une ombre, soit une erreurd'optique, soit un égarement de la conduite par manque de connaissance.

De là l'attitude stoïcienne (négationactive de la douleur et de la souffrance morale par l'impassibilité), ou certaines conceptions morales, de Platon àDescartes et à Spinoza (« Nul n'est méchant volontairement »). — III — La Mort.

« Il y a une liaison privilégiée entre le Mal et la Mort », écrit Lavelle (Traité des Valeurs, II,444).

La mort est considérée comme le pire des maux parce qu'elle affecte l'aspect d'un retour au néant. 1 — La mort fait partie de la définition essentielle de la vie, non seulement sur le plan biologique (« la vie estl'ensemble des forces qui luttent contre la mort ») mais aussi sur le plan métaphysique.

« La réalité humaine » ditHeidegger, « est un être-pour-la-mort ».

L'existence, selon Heidegger, est toujours une instance et un sursis, que lamort éteint sans apporter d'achèvement.

De plus la mort n'est problème et réalité que pour celui qui meurt, pas pourles autres : « La mort, il faut que chaque humain l'assume respectivement lui-même.

Dans la mesure même où elleest, la mort est essentiellement toujours la mienne » (Qu'est-ce que la Métaphysique ?, page 123).

Les humainsfuient dans une pseudo-rationalisation (« On sait qu'on doit mourir un jour ») et se comportent comme si la mortétait toujours la mort des autres.

Par là, ils sont « inauthentiques», dit Heidegger.

L'authenticité consisterait àéprouver l'existence comme une détresse d'abandon dans l'angoisse de la mort.2 — La mort ne peut pas être la signification de la vie.

Ce n'est pas parce que la mort est la fin de la vie qu'elle en. »

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