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Éthique de la conviction ou éthique de la responsabilité ?

Publié le 15/02/2004

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Le sujet propose une alternative entre deux types d'éthique, pour savoir laquelle il faut privilégier, laquelle doit être à la base de certains actes. L'éthique de la conviction prend en compte uniquement les raisons pour lesquelles il faut accomplir l'action sans se soucier des conséquences. L'éthique de la responsabilité privilégie quant à elle les conséquences de l'action, ce sont ces dernières qui priment, et de ce fait, il faut tout mettre en oeuvre pour que ces conséquences soient les moins lourdes possibles, et cela parfois au mépris de certaines que l'on se serait fixées à soi-même, et que l'on considèrerait comme étant les meilleures car les plus pures. Cette alternative, cette question de savoir ce que l'on doit faire se pose quand il y a cas de conscience, déchirement entre deux devoirs contradictoires. Ici, le devoir n'est plus pensé indépendamment de toute expérience et des aspirations individuelles, il faut prendre en compte le contexte et les conséquences.             Se pose donc la question de savoir quels sont les critères qui vont permettre de déterminer l'éthique il faut suivre. Autrement dit, que faut-il prendre en compte, dans quelles circonstances, et quelles sont les conditions qui nous feront adopter une éthique plutôt que l'autre ?

« Lorsque l'on décide d'agir de telle manière plutôt que de telle autre, il est évident que l'on ne peut pasprévoir toutes les conséquences que notre acte aura.

De ce fait, il est possible d'envisager deux solutions : soit ontente d'évaluer de la manière la plus précise possible les risques que l'on prend et on prévoit l'imprévu, soit onconsidère que les choses peuvent de toute façon toujours nous échapper, et on considère de ce fait qu'il vautmieux agir selon nos propres convictions, en espérant que les conséquences de nos actes ne seront pas néfastes.

● C'est ce que cherche à savoir Kant dans La Critique de la raison pratique.

Selon lui, une action ne peutêtre absolument et véritablement bonne que dans ses intentions, quelles qu'en soient les conséquences.

C'est laraison pour laquelle lorsque l'auteur énonce les impératifs catégoriques, il donne non pas le contenu de l'action ou lerésultat auquel celle-ci doit parvenir, mais la forme que doit avoir l'action.

Autrement dit, l'impératif ne donne pas unobjectif auquel il faut parvenir, l'action n'est pas dirigée en vue d'une fin – par exemple faire en sorte que chaqueaction rende au oins un homme heureux – mais selon un principe de départ : agir de telle sorte que la maxime de mavolonté puisse en même temps valoir comme principe d'une législation universelle.

(I, §7 CRPra).

Penser de la sorteimplique que l'on agisse toujours selon ses convictions, selon les règles que l'on pense être bonnes.

Ainsi, lorsqueBenjamin Constant pose à Kant la question de savoir si il faut dénoncer un ami qui se trouve caché chez soi sousprétexte que l'on ne peut pas mentir, Kant répondra que si l'on veut être absolument moral, il faut répondre à laquestion des visiteurs et leur dire où se trouve l'ami caché. Selon Kant, il faut obéir au devoir moral sans se poser de question, et donc suivre une éthique de la conviction plutôt qu'une éthique de la responsabilité.

Le devoir est unenécessité d'accomplir une action par respect pour la loi, c'est agir pour la loielle-même.

Il faut donc lui obéir même si elle va contre mes inclinations :c'est l'intention qui compte, je dois agir avec une intention bonne, c'est-à-dire que ma volonté doit être déterminée uniquement par ma raison, et nonpas par ma sensibilité.

Il faut pour Kant une pureté de l'intention.

« La seulechose qui soit bonne véritablement, c'est une volonté bonne ».

idem.Autrement dit, une action devrait être jugée morale en fonction desconvictions qui l'inspirent, et non des conséquences qu'elle entraîne. II/ La pureté de l'intention n'implique pas une pureté desconséquences de l'action : Même si il va de soi que les conséquences de nos actes peuventparfois nous échapper, cela ne signifie pas qu'il faille capituler et renoncer àen gérer les conséquences.

Autrement dit, on ne peut pas se contenter d'agirselon une éthique de la conviction sous prétexte que le réel n'est pasmaîtrisable dans sa totalité.

En effet, même si l'intention est bonne, certainesactions ont parfois des conséquences désastreuses, et il est vain de vouloir se retrancher derrière une pureté del'intention et de nier ainsi sa responsabilité. C'est ce que montre indirectement Machiavel dans Le Prince.

Il est en effet possible de rendre l'exemplepolitique pour illustrer notre propos.

L'action politique vise explicitement à agir sur le destin des hommes, c'est saraison d'être.

Or une décision politique entraîne parfois des conséquences désastreuses pour la société tout entière,ou peut faire perdre une guerre.

En l'occurrence, l'innocence de son auteur, ou plutôt la pureté de ses intentions,ne peut pas suffire à l'excuser.

La décision est une prise de risque dont il convient d'évaluer toutes lesconséquences possibles, en faisant même la part de l'imprévisible.

Un homme politique ne peut pas se tenir pourirresponsable des conséquences de son action en se drapant dans la pureté de ses convictions.

Ainsi, lorsque degrands hommes comme Jules II agissent selon certains principes, il ne faut pas ériger ces derniers en règlesabsolues, ils ne doivent pas devenir des convictions sous prétexte qu'ils ont fonctionné une fois.

Au contraire, il fautprendre en compte tous les paramètres, ce que Machiavel appelle la « fortuna » pour pouvoir orienter au mieux sonaction. Autrement dit, il n'y a pas de constance dans les rapports entre les qualités du prince et la fortune – lescirconstances, il s'agit de rencontres particulières.

De ce fait, agir selon une éthique de la conviction est inutile, carles convictions sont vaines dans ce domaine.

Il n'est en effet pas possible de fonder une règle selon laquelle pourparvenir à tel résultat il faut employer tel moyen, parce qu'il est possible que « deux actions différentes produisentun même effet, et que deux actions pareilles ont des résultats opposés.

» XXV.

Tout dépend du contexte.

Certainsprinces ou grands (Jules II) ont prospéré par exemple en étant impétueux, c'est parce que cela correspondait bien àl'époque, c'était conforme aux temps et aux circonstances.

Mais si la fortune change, leur impétuosité nefonctionnera plus.

Il faut que le Prince sache changer de caractère et s'adapter à son temps.

Le véritable rince doitdonc agir selon une éthique de la responsabilité, il doit rendre en compte toutes les conséquences de ces actions etprévoir l'imprévisible, en sachant le résultat que son acte aura sur son peuple ou par exemple sur la guerre.

Il nedevra pas se retrancher derrière la pureté de ses principes pour dénier la responsabilité d'une action qui n'aura paseu le résultat escompté.

Pour ce faire, il faut donc que le prince ait quelques principes, mais qu'il les examine à lalumière des circonstances, et qu'il soit capable de prévoir les conséquences.. »

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