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Etre libre est-ce être indifférent à autrui ?

Publié le 22/02/2012

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• Ne manquez pas de rassembler vos connaissances sur ce sujet. Vous remarquez qu'il concerne, d'une part, la problématique de la liberté et, d'autre part, celle d'autrui. Qu'est-ce qu'être libre ? Être indifférent (au corps, au jugement d'autrui, etc.), comme le veut toute une tradition philosophique ?

« de toi, ne t'amuse point à réfuter ce qu'on a dit, mais réponds simplement : celui qui a dit cela de moi ignorait sansdoute mes autres vices. » (Épictète, Pensées, in Pensées et Entretiens d'Épictète, pp. 29 sq., Le Pot Cassé). Ainsi; Épictète s'élève par la pensée au-dessus de toutes les déterminations du réel et de l'existence et, en particulier, au-dessus du jugement de l'autre.

Méprisé, le stoïcien est heureux, puisque le jugement de l'autre nepeut l'atteindre ! Calomnié, il se trouve également heureux.

N'étant blessé par rien, le stoïcien a dépassé la sphère de l'esclavage, de la servitude et il a conquis sa liberté, qui est autonomie. « Pourquoi t'avises-tu de craindre un homme ? », nous dit Épictète.

Effectivement, aucun jugement d'autrui ne peut plus atteindre celui qui a gagné lasérénité de l'âme. Admirable éthique où, indifférents à toute opinion ou jugement de notre prochain, nous planons, par l'esprit, loin de tout...

Néanmoins, il nous faut questionner un type de réponse peut-être unilatéral.

N'oublions-nous pas ici lasituation réelle de l'homme ? B)Je ne me saisis vraiment (et ne suis libre) qu'à travers le processus de l'intersubjectivité et par la médiation dujugement d'autrui (antithèse). Malgré le message que nous délivrent les éthiques hellénistiques, on peut se demander si l'indifférence au jugement d'autrui n'est pas, par moments, ambiguë, génératrice de force et d'énergie, mais aussi, parfois, d'impuissance : être indifférent peut, en effet, par moments, déboucher « sur le vide ».

S'il semble plus authentique de ne pas prendre en compte le jugement d'autrui, n'y a-t-il pas quelque danger recélé en ce vouloir, quelque risque à s'efforcer de semaintenir, en une hautaine liberté, loin du jugement de l'autre ? À travers cette insularité de la conscience ainsicoupée d'autrui, est-ce qu'une dimension de moi-même ne m'échappe pas ? Le jugement d'autrui n'est-il pasnécessaire à la constitution de ma conscience et de ma liberté ? Sans ce jugement sur ce que je suis, peut-êtrebien ma propre essence disparaît-elle.

La conscience et la liberté ne sont pas une île séparée du reste du monde, del'Autre, de son jugement, de son action. Éliminons tout jugement d'autrui, rendons-nous absolument indifférents à cette opinion.

Que va-t-il bien demeurer,en cette opération ? Sûrement un immense orgueil, mais peut-être rien d'autre, et, finalement, un choix libre fortrestreint, des décisions privées de toute communication et donc de tout poids.

Si je suis indifférent au jugementd'autrui quand il s'agit d'évaluer un travail, ma liberté en grandit-elle toujours ? Pas forcément.

Elle ne s'appuie pas alors sur une évaluation objective et semble donc moins rationnelle.

Ma liberté n'est rien sans le jugement de l'autre: elle se prive alors, en cette « néantisation », du processus actif de l'intersubjectivité et donc de l'objectivité.

Pour que je sois quelque chose, il faut que je passe par le jugement de l'autre.

L'homme « se rend compte qu'il ne peut rien être (au sens où on dit qu'on est spirituel, ou qu'on est méchant, ou qu'on est jaloux) sauf si les autres lereconnaissent comme tel.

Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre.

L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'a la connaissance que j'ai de moi. » (Sartre, L'existentialisme est un humanisme, pp. 66 sq.) Ainsi, le jugement d'autrui m'aide à me construire.

Il n'est pas seulement facteur d'aliénation, mais aussi de liberté et de puissance.

En refusant le jugement d'autrui, en me rendant indifférent à lui, ce n'est pas seulement l'esclavage que je repousse, c'est aussi ma vraie liberté que je mets entre parenthèses.

Ne suis-je pas d'autant plus libre que je participe au jugement d'autrui et le comprends en sa signification réelle, objective, fondatrice ? L'opposition paraît dès lors insurmontable entre une thèse qui privilégie la culture de l'indifférence au jugement d'autrui et une antithèse qui me rappelle la nécessité de passer par ce dernier.

Mais peut-être ne l'est-elle qu'en apparence.

Peut-être s'agit-il finalement d'une simple question de vocabulaire, le terme d'indifférence devant être absorbé dans un autre, plus compré hensif tt dynamique. C) Liberté et indépendance par rapport à autrui : la reconnaissance' comme synthèse. Il me faut, d'une part, concevoir ma liberté comme autonomie face à l'autre (c'est bien la leçon de la thèse), et d'autre part Comme processus lié à l' intersubjectivité (leçon de l'antithèse). La dépendance absolue vis-à-vis d'autrui n'est pas, en effet, liberté ; quand je ne choisis que des objets désirés par un autre, quand je sombre dansl'universelle vanité, quand je suis la proie du jugement d'autrui, j'expérimente et un échec et la perte de maliberté.

Mais la solution de ia pure indifférence n'est ni souhaitable ni juste, car l'intersubjectivité m'appelle et fondema présence au monde.

Comment donc dénouer ce cercle ? C'est l'indépendance au sein du processusintersubjectif que nous devons conquérir, non point la simple indifférence.

Songeons à l'étude de l'altérité que Hegela conduite dans La Phénoménologie de l'esprit.

Quand deux consciences se rencontrent, elles luttent à mort pourla « reconnaissance ».

En cette lutte à mort de pur prestige, la leçon que nous donne le maître est d'importance.Il risque sa vie pour affirmer sa supériorité.

Il se conquiert dans ce mouvement d'indépendance et de lutte, où ils'affirme comme conscience libre, humaine, non point indifférente, mais indépendante à l'égard d'autrui etaffirmant ainsi sa supériorité.

Ici, le maître se fait d'autant plus libre qu'il risque tout et affirme sa force et sa «puissance » par rapport au jugement d'autrui.

Tel est le sens de la « maîtrise » : elle refuse une stricte soumissionau jugement d'autrui, mais sans nullement en venir à l'indifférence.

Liberté spirituelle et saisie de l'altérité s'unifientici au sein de l'indépendance et de la reconnaissance.

Car l'indépendance est infiniment plus dynamique etsynthétique que la simple indifférence.

Qu'est-ce que l'indépendance ? Le fait de ne pas être en situation desujétion, de connaître l'affranchissement actif, de ne pas être assujetti à une autre conscience.

Or, tel est bien lesens de la maîtrise » hégélienne : le maître combat, risque tout, affronte la présence et le jugement d'autrui sans. »

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