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Hegel: L'art a-t-il une finalité ?

Publié le 13/03/2006

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hegel
Éveiller l'âme : tel est, dit-on, le but final de l'art, tel est l'effet qu'il doit chercher à obtenir. C'est de cela que nous avons à nous occuper en premier lieu. En envisageant le but final de l'art sous ce dernier aspect, en nous demandant notamment quelle est l'action qu'il doit exercer, qu'il peut exercer et qu'il exerce effectivement, nous constatons aussitôt que le contenu de l'art comprend tout le contenu de l'âme et de l'esprit, que son but consiste à révéler à l'âme tout ce qu'elle recèle d'essentiel, de grand, de sublime, de respectable et de vrai. Il nous procure, d'une part, l'expérience de la vie réelle, nous transporte dans des situations que notre expérience personnelle ne nous fait pas et ne nous fera peut-être jamais connaître : les expériences des personnes qu'il représente, et, grâce à la part que nous prenons à ce qui arrive à ces personnes, nous devenons capables de ressentir plus profondément ce qui se passe en nous-mêmes. D'une façon générale, le but de l'art consiste à rendre accessible à l'intuition ce qui existe dans l'esprit humain, la vérité que l'homme abrite dans son esprit, ce qui remue la poitrine humaine et agite l'esprit humain. C'est ce que l'art a pour tâche de représenter, et il le fait au moyen de l'apparence qui, comme telle, nous est indifférente, dès l'instant où elle sert à éveiller en nous le sentiment et la conscience de quelque chose de plus élevé. C'est ainsi que l'art renseigne l'homme sur l'humain, éveille des sentiments endormis, nous met en présence des vrais intérêts de l'esprit. Nous voyons ainsi que l'art agit en remuant, dans leur profondeur, leur richesse et leur variété, tous les sentiments qui s'agitent dans l'âme humaine, et en intégrant dans le champ de notre expérience ce qui se passe dans les régions intimes de cette âme. Nihil humani a me alienum puto * : telle est la devise qu'on peut appliquer à l'art. *. Rien de ce qui est humain ne m'est étranger

Le thème qui est ici abordé par Hegel est celui du sens de l’art. Hegel soutient dans ce texte que l’art est le moyen par lequel l’homme découvre et explore son humanité essentielle. Cette thèse constitue en son temps une position philosophique révolutionnaire puisque les philosophes jusqu’à lors avaient coutume de considérer l’art comme une forme dégradée de la pensée, qui ne permettrait que de générer des illusions, et jamais d’atteindre la vérité. Cependant, il semble qu’Hegel parvienne par cette théorie à mettre en lumière certaines choses que les philosophes avant lui n’avaient pas réussi à expliquer lorsqu’ils glosaient sur l’art. Dans un premier temps, Hegel expose son postulat et montre sur quoi cette hypothèse s’appuie. Suite à cela, le philosophe montre dans un deuxième temps que cette hypothèse doit nous élever à la compréhension de l’humain comme étant intimement lié à l’art en tant que tel.

 

hegel

« à l'intuition ce qui existe dans l'esprit humain.

» L'être humain est donc placé au centre du débat sur l'art.

Lemouvement n'est pas celui de l'homme qui décrit le monde par l'art, il est celui de l'homme qui se découvre lui-mêmedans l'art.

Mais qui plus est, le mode opératoire de l'art, c'est l'intuition, c'est-à-dire quelque chose qu'on ressentimmédiatement, sans passer par le concours de la réflexion spéculative. b) De « C'est ce que l'art a pour tâche de représenter… » à « quelque chose de plus élevé » : Hegel nous expliqueici comment un tel miracle est possible : l'art représente au moyen de l'apparence.

L'art ne se sert pas de laspéculation rationnelle, il présente des apparences, ces phénomènes sensibles qui, depuis Platon, sont montrés dudoigt comme des choses trompeuses.

Hegel inverse ici la logique platonicienne.

L'art n'est pas pour lui une tromperiesur le monde réel, ce n'est pas une mauvaise imitation, c'est plutôt « la vérité choisie », comme l'écrivait Alfred deVigny dans son Journal d'un poète. L'apparence, dès lors, nous devient « indifférente », elle n'est plus néfaste puisqu'elle « sert à éveiller en nous le sentiment et la conscience de quelque chose de plus élevé.

» L'art est bienplutôt le moyen de prendre conscience des idées et des intérêts les plus élevés de son esprit en les rendantsensibles dans une apparence.

Hegel écrit d'ailleurs dans un autre passage que « le beau se définit comme lamanifestation sensible de l'idée.

» (Hegel, Esthétique ) c) De « C'est ainsi que l'art renseigne sur l'humain… » à la fin du texte : Hegel explicite en quelle manière on peut affirmer que l'art expose l'humanité en tant que telle, qu'il est l'expressionde l'humain.

L'art nous montre en réalité notre humanité profonde, il « éveille des sentiments endormis, nous met enprésence des vrais intérêts de l'esprit ».

L'art amène à l'expérience concrète ce qui reste caché abstraitement enl'âme humaine : il montre par l'apparence et nous donne ainsi l'intuition de nous-mêmes.

Il est un des moments où laconscience s'objective, où notre humanité sort de sa bulle spirituelle pour se heurter au monde matériel.

De la sorte,il est le moyen par lequel l'être humain prend conscience de lui-même : enfermé en lui, cette humanité resteraitaveugle et inconsciente, mais sortie de l'homme par le biais de l'art, l'homme est obligé de regarder son humanité enface.

Il en prend ainsi conscience, et cette prise de conscience lui permet de la posséder pleinement.

L'art est doncexpression de l'humanité inconsciente et l'art est donc proprement humain dans son fondement, comme il exprime lefond de l'humanité dans son sens.

On peut donc soutenir que la devise de l'art pourrait être : « Rien de ce qui esthumain ne m'est étranger », puisque l'art sort à proprement parler de l'homme pour venir au monde des humains, l'artest comme le double de l'homme qui projette son humanité sur le tableau de l'apparence. Conclusion : Ce texte a bien mis en avant que l'hypothèse d'après laquelle l'art devait « éveiller l'âme » était une hypothèse toutà fait tenable et judicieuse.

Il n'est en effet pas impossible, comme l'a ici montré Hegel, de considérer que l'art netrahisse pas la vérité, même s'il nous la restitue sans nous l'expliquer.

Cette interprétation hégélienne de l'art permetpar ailleurs de rendre compte du lien si puissant qui se tisse entre l'homme et l'activité artistique, elle expliquel'impressionnante force qu'exerce l'art sur chacun d'entre nous, et montre que l'art n'est pas pure vanité, mais qu'ilconstitue bien quelque chose d'essentiel puisqu'il est proprement humain, et qu'il est justement humain dans ce quel'humanité a de plus essentiel au fond de soi. HEGEL : Éveiller l'âme : tel est, dit-on, le but final de l'art, tel est l'effet qu'il doit chercher à obtenir.

C'est de cela que nous avons à nous occuper en premier lieu.

Enenvisageant le but final de l'art sous ce dernier aspect, en nous demandant notammentquelle est l'action qu'il doit exercer, qu'il peut exercer et qu'il exerce effectivement, nousconstatons aussitôt que le contenu de l'art comprend tout le contenu de l'âme et del'esprit, que son but consiste à révéler à l'âme tout ce qu'elle recèle d'essentiel, degrand, de sublime, de respectable et de vrai.

Il nous procure, d'une part, l'expérience dela vie réelle, nous transporte dans des situations que notre expérience personnelle nenous fait pas et ne nous fera peut-être jamais connaître : les expériences despersonnes qu'il représente, et, grâce à la part que nous prenons à ce qui arrive à cespersonnes, nous devenons capables de ressentir plus profondément ce qui se passe ennous-mêmes.

D'une façon générale, le but de l'art consiste à rendre accessible àl'intuition ce qui existe dans l'esprit humain, la vérité que l'homme abrite dans son esprit,ce qui remue la poitrine humaine et agite l'esprit humain.

C'est ce que l'art a pour tâchede représenter, et il le fait au moyen de l'apparence qui, comme telle, nous estindifférente, dès l'instant où elle sert à éveiller en nous le sentiment et la conscience de quelque chose de plus élevé.

C'est ainsi que l'art renseigne l'homme sur l'humain, éveille des sentiments endormis,nous met en présence des vrais intérêts de l'esprit.

Nous voyons ainsi que l'art agit en remuant, dans leurprofondeur, leur richesse et leur variété, tous les sentiments qui s'agitent dans l'âme humaine, et en intégrant dansle champ de notre expérience ce qui se passe dans les régions intimes de cette âme.

Nihil humani a me alienum puto* : telle est la devise qu'on peut appliquer à l'art. *.

Rien de ce qui est humain ne m'est étranger. »

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