Kant et la culture
Publié le 03/04/2009
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La perfectibilité est une qualité, un attribut bien particulier, car elle n'est pas définie dans l'expression concrètequ'elle va prendre.
Cette expression concrète est en puissance plutôt qu'en acte (pour reprendre la distinctiond'Aristote).
C'est un pur potentiel.
Voilà pourquoi cette faculté est « presque illimitée ».
On ne peut pas savoirjusqu'où elle entraînera l'homme, en particulier au niveau de l'espèce.
Avec la découverte de l'écriture, quipermet une transmission du savoir et notamment technique et scientifique, les progrès dans la manipulation dela matière n'ont, jusqu'à présent, rencontré aucune limite.Cette faculté si particulière, la perfectibilité, est la mère des autres facultés humaines, elle développesuccessivement toutes les autres, en ce sens que les autres facultés en sont l'expression concrète.
C'estparce que l'homme est né indéfini, avec un potentiel ouvert, qu'il a inventé mille manières d'être au monde etqu'il s'est forgé un monde culturel et social qui n'a plus rien à voir avec le monde naturel.
Ainsi on peut définirl'homme comme l'être qui est né non déterminé, un « avorton » resté au stade fœtal, à la différence des autresêtres vivants, nés terminés, déterminés par l'instinct à des comportements précis.
Cette indétermination del'homme lui permet d'être réceptif à la culture et à l'accumulation du savoir qu'elle représente.
En ce sens onpeut dire que la culture peut être libératrice au sens où elle donne les moyens à ce manque d'instinct naturelde se transformer en qualité d'exception qui va faire de l'homme un animal à part.
la culture est libératrice dansla mesure où elle offre à l'homme les conditions de possibilité d'une émancipation de sa propre part d'animalitéen lui à la faveur d'un développement de sa part d'humanité.
Si l'homme manque d'instinct c'est d'abord etavant tout parce qu'il est un être doué de raison, c'est-à-dire capable de se donner à lui-même ses propresfins, autrement dit de constituer un véritable projet.Et c'est parce que la culture apparaît comme l'expression de l'humanité en l'homme, ce par quoi tout progrèsest possible, qu'elle est dès lors conçue comme un devoir : si c'est par la culture que l'homme se distingue del'animal et acquiert sa spécificité, alors c'est un devoir pour l'homme que de développer ses facultés naturelleset de les élever par la culture. - 2e MOUVEMENT « Au contraire, à supposer qu'il puisse être satisfait de ce qu'il y a d'inné dans sa capacité de prendre en charge ses besoins naturels, il faut cependant que sa raison instruise d'abord par des principes cette satisfactionprocurée par le degré plus développé de ses capacités - cela parce que l'être humain, en tant qu'être capable deconcevoir des fins (de se proposer des objets comme fins), doit être redevable de l'usage de ses forces, non passeulement à l'instinct de la nature, mais bien à la liberté, par laquelle il détermine le degré de telles capacités.
» Il apparaît cependant que l'homme peut parfois se satisfaire de ce qu'il a déjà accompli ou de ce que la naturelui a donné.
Cependant, c'est la raison qui est en l'homme qui doit toujours rester le principe organisateur detoutes ses conduites.En réalité, cette capacité naturelle, innée, qu'a l'homme de « prendre en charge ses besoins naturels », c'est-à-dire encore de se donner à soi-même ses propres fins (à savoir concevoir un projet et appliquer les moyenspropre à le réaliser) n'est pas tant l'effet d'un don de la nature en elle-même mais bien plutôt l'expression de saliberté.La culture apparaît alors comme un devoir non seulement parce qu'elle est le signe de la raison en l'homme (paropposition à l'instinct en l'animal) mais aussi, et fondamentalement parce qu'elle est l'expression de la liberté del'homme (ce que témoigne encore la présence de la raison).Pour ne pas s'étioler dans un rapport stérile, morne, et infécond de l'homme au monde, la culture se doit derester toujours dynamique et créatrice.
Pour ce faire, et pour éviter du même qu'elle ne dérive vers satendance inhérente à la barbarie, elle doit elle-même être cultivée.
L'on se doit, en tant qu'homme, en tantqu'il y a une humanité en nous (qui est toujours en devenir), de créer les conditions d'épanouissement de laculture.
La culture doit être l'objet d'une vigilance extrême puisqu'elle est ce par quoi l'homme va se libérer (etde l'animalité et de l'objectivité qui fait souffrir), soit ce par quoi il va s'aliéner lui-même (dans une dérivepathologique, mais intrinsèque à toute culture).
C'est parce qu'elle est capable d'aboutir à ces deux dimensionsopposées, que l'humain se doit – et c'est un devoir envers lui-même et envers l'humanité tout entière – decréer les conditions de l'épanouissement dynamique de la culture. - 3e MOUVEMENT « Il n'y a donc pas à considérer l'avantage que la culture de sa capacité (en vue de toutes sortes de fins) peut procurer à l'homme, car une telle considération finirait peut-être (selon les principes de Rousseau) par tourner àl'avantage de la grossièreté du besoin naturel; mais c'est un commandement de la raison moralement pratique etun devoir de l'homme envers lui-même que de cultiver ses facultés [...] » C'est d'ailleurs dans cette perspective que l'on pourrait reprendre l'analyse kantienne de l'éducation, qui estperçu comme une obligation morale, considérée sous l'angle de l'activité providentielle : selon Kant , la nature a voulu que l'homme conquière sa liberté dans la culture, c'est-à-dire en développant ses virtualités par letravail ; une obligation morale car c'est un devoir de l'homme envers lui-même de développer ses facultés,sans lesquelles il resterait inachevé.
Dès lors, le devoir d'éducation pourrait être conçue – sinon vécue – non.
»
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- Donc, au degré de culture auquel est parvenu le genre humain, la guerre est un moyen indispensable pour la perfectionner encore. Kant, Sur les débuts de l'histoire humaine. Commentez cette citation.