Devoir de Philosophie

KANT: Etre bienfaisant... est un devoir...

Publié le 02/05/2005

Extrait du document

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Être bienfaisant, quand on le peut, est un devoir, et de plus il y a de certaines âmes si portées à la sympathie, que même sans un autre motif de vanité ou d'intérêt elles éprouvent une satisfaction intime à répandre la joie autour d'elles et qu'elles peuvent jouir du contentement d'autrui en tant qu'il est leur oeuvre. Mais je prétends que dans ce cas une telle action, si conforme au devoir, si aimable qu'elle soit, n'a pas cependant de valeur morale véritable, qu'elle va de pair avec d'autres inclinations, avec l'ambition par exemple qui, lorsqu'elle tombe heureusement sur ce qui est réellement en accord avec l'intérêt public et le devoir, sur ce qui par conséquent est honorable, mérite louange et encouragement, mais non respect ; car il manque à la maxime la valeur morale, c'est-à-dire que ces actions soient faites, non par inclination, mais par devoir. Supposez donc que l'âme de ce philanthrope soit assombrie par un de ces chagrins personnels qui étouffent toute sympathie pour le sort d'autrui, qu'il ait toujours encore le pouvoir de faire du bien à d'autres malheureux, mais qu'il ne soit pas touché de l'infortune des autres, étant trop absorbé par la sienne propre, et que, dans ces conditions, tandis qu'aucune inclination ne l'y pousse plus, il s'arrache néanmoins cette insensibilité mortelle et qu'il agisse, sans que ce soit sous l'influence d'une inclination, uniquement par devoir, alors seulement son action a une véritable valeur morale. KANTVoici un texte de Kant tout à fait classique, extrait de l'ouvrage moral le moins difficile de cet auteur, à savoir les Fondements de la métaphysique des moeurs. Nous vous conseillons de bien réfléchir sur ce sujet, dans la mesure où sa structure est nette et, de ce point de vue, vous apporte une méthodologie précieuse. Considérez bien l'architecture interne de ce petit texte. » Mais l'analyse de ces lignes est enrichissante pour vous à un deuxième titre : l'utilisation de l'exemple. Car il y a, dans ce texte, deux exemples (ou peut-être un seul exemple dont la face s'inverse). Ces deux exemples, Kant en tire toute la moelle et toute la substance philosophique. Si vous éprouvez quelque embarras devant l'utilisation de l'exemple en philosophie, réfléchissez sur un texte qui relie harmonieusement exemples et élucidations philosophiques de ces exemples. C'est toute la méthodologie de votre dissertation qui est ici en jeu. 2. L'extrême densité de ce texte rend paradoxalement difficile l'extraction des termes et expressions les plus significatifs. Vous retiendrez essentiellement : — être bienfaisant... est un devoir; — âmes si portées à la sympathie ; — satisfaction intime ; — jouir du contentement d'autrui. — Une telle action... n'a pas cependant de valeur morale véritable. — Ces actions soient faites non par inclination mais par devoir. — Il ne soit pas touché par l'infortune des autres. — Aucune inclination ne l'y pousse plus. — Uniquement par devoir. — Véritable valeur morale.

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« L'argumentation est conduite en détail en personnalisant l'expression ("je prétends que").

La bienveillance n'est pasbonne moralement en tant que telle, elle peut être une inclination comme une autre, par exemple comme l'ambition.Certes, si on regarde le fonctionnement de la société, et l'intérêt social (ce qui est bon pour l'ensemble de la sociétéet de ses citoyens), on doit reconnaître que certaines inclinations (l'ambition, la bienveillance) peuvent être bonnes.Pour en juger, il faut s'en rapporter au résultat -conforme ou non à l'intérêt public.

Le législateur, dans son souci del'intérêt public, édicte des lois qui sont intériorisées dans les consciences sous la forme de devoirs à accomplir.L'action conduite par inclination peut aboutir à de bonnes choses: elle peut toucher heureusement "sur ce qui estréellement en accord avec l'intérêt public".

Il convient dès lors, dit Kant, de la reconnaître comme "honorable", de luiaccorder "louange" et "encouragement".Mais ne sommes-nous pas pour autant dans la sphère de la moralité, qui est celle des principes qui commandent laformule (la maxime) de l'action même si nous sommes dans celle de l'intérêt public? Aussi ne pouvons-nous pas avoirdu "respect" à l'égard de telles actions.

Seule l'action (morale) faire par devoir mérite le respect. 3) Pour se faire mieux comprendre, Kant abandonne l'argumentation pour en venir à l'analyse concrète.

Au début dutexte, il s'agissait de bienveillance.

Maintenant, il s'agit d'un homme conduit par cette inclination favorable: un"philanthrope".

Kant affirmait son point de vue ("je prétends"); maintenant, il sollicite l'imagination de soninterlocuteur supposé ("supposez donc").

Sous forme de "chagrins personnels", le malheur va fondre sur cet homme.Ce qui était dans son cas inclination heureuse ne relevait pas d'une nature profonde, mais était déterminé par lesévénements mêmes de la vie.

L'inclination bienveillance disparaît.

Le tableau est noirci à souhait: la sympathie pourle sort d'autrui s'effondre, l'infortune des autres n' a plus de puissance sur les sentiments de notre philanthroped'antan.

Le lecteur anticipe de quelques mesures le développement de Kant.

Il pressent l'inéluctable, l'égoïsme, lerepli sur soi, le dessèchement de l'âme (une "insensibilité mortelle").

Il n'y a plus d'actions morales.

Mais le lecteur aété trop vite.

Kant opère un retournement brutal, dont la violence aide à faire admettre sa thèse.

Le lecteuremporté par la rhétorique s'est fourvoyé.

Cet homme jadis bienveillant, qui a perdu toute inclination vers autrui,s'est élevé à l'action morale, justement parce qu'il a perdu toute raison d'être bienveillant."Son action a une véritable valeur morale" dans la mesure où elle est faite par devoir.

Certes l'argumentation estd'une logique implacable -mais renvoie-t-elle à la réalité concrète? Ce philanthrope qui a perdu sa bienveillancenaturelle et qui dès lors s'élève à la moralité n'est sans doute qu'une fiction.

D'autant que rien ne nous prouve, nousdit lui-même Kant, que jamais une quelconque action ait été faite par devoir. KANT (Emmanuel). Né et mort à Königsberg (1724-1804).

Fils d'un sellier d'origine écossaise, il fit ses études à l'Université de Königsberg, et s'intéressa davantage à la physique et à la philosophie qu'à la théologie.

En 1755, ilest privat-dozent de l'Université de sa ville natale, puis il est nommé professeur extraordinaire de mathématiques etde philosophie.

En 1770, il devient titulaire de la chaire de logique et de métaphysique.

Il vécut dans une demi-retraite pendant onze ans ; puis, commença la publication de ses grands livres, les trois Critiques.

La Révolutionfrançaise l'enthousiasma, et l'on raconte qu'il ne se détournait de sa promenade, minutieusement réglée, que pouren aller apprendre les nouvelles.

Il fut, en 1793, réprimandé par Frédéric-Guillaume II pour deux ouvrages sur lapolitique et la religion.

A la mort du Roi, il reprit sa plume et dévoila l'affaire.

Kant mourut le 12 février 1804, aprèsune très longue agonie.

— A ses débuts, Kant fut un disciple de Leibniz et de Wolff.

Il considère la science commeun fait, dont la possibilité, plus que l'existence, doit nous préoccuper.

La lecture de Rousseau lui fait aussiconsidérer la moralité comme un fait.

Nous retrouvons, en conclusion du système kantien, comme postulats, lescroyances dont Kant a ruiné la valeur dogmatique.

Lui-même a défini son entreprise ainsi : « J'ai remplacé le savoirpar la foi.

» — Le monde sensible est seul donné à notre expérience et à notre connaissance : ce sont les faits, lesdonnées de la sensation.

Le monde intelligible est une« illusion théorique».

Le pouvoir de la raison pure est illusoire.Les principes de l'entendement pur ne sont pas applicables aux noumènes, mais seulement aux phénomènes ; c'estla dialectique transcendante.

La raison doit reconnaître ses propres limites ; limiter la raison, c'est réaliser sonobjectivité.

— La connaissance se ramène à deux éléments : le monde sensible, ou phénomènes liés à l'espace et autemps et le monde intelligible, ou chose en soi, noumènes, pur objet de pensée.

L'intuition et le concept sont lessources de la connaissance.

— Mais, intellectuellement, il nous est impossible de parvenir à la connaissance dumonde intelligible.

— L'espace et le temps sont les conditions de toute connaissance ; pour qu'un objet possède uneréalité objective, il faut qu'il soit placé dans l'espace et le temps.

L'espace et le temps sont les formes a priori detoutes les données empiriques.

C'est ce qu'analyse Kant dans son esthétique transcendantale ou analyse de lasensibilité.

Les représentations données par ces deux éléments sont liées entre elles par la raison finie, à l'aide descatégories, ou principes de l'entendement pur.

Les catégories (analytique transcendantale) qui dessinent les limitesde la vérité, sont les produits d'une force et non pas l'attribut d'une substance.

Elles sont posées à l'occasion del'expérience, mais la dépassent.

La quantité, la qualité, la relation et la modalité sont les classes de jugement ;. »

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