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la confusion des sentiments

Publié le 27/09/2014

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Comment traiter La Confusion des sentiments sans évoquer, même brièvement, son auteur et le contexte dans lequel il a vécu ? Zweig (1881-1942) est peut-être plus connu encore pour sa vie que pour son œuvre. De sa biographie mouvementée, tâchons de retenir que notre homme est l’anti-écrivain engagé. L’horreur nazie, il ne s’y attend pas : c’est incrédule que l’auteur de langue allemande le plus lu au monde verra ses livres brûlés en place publique. Un être aussi près des sommets de la pensée ne pouvait s'habituer à la brutalité du monde. Il vit donc en dehors des réalités, au-dessus d’elles, ce qui lui attire les reproches de ses contemporains, qui le voient comme un privilégié : Hanna Arendt écrira que « le monde que Zweig décrit n’est pas le monde d’hier et il ne vivait pas vraiment dans le monde mais sur ses marges ». Zweig, c’est en fait un homme pour qui « la littérature n’est pas la vie » mais « un moyen d’exaltation de la vie, un moyen d’en saisir le drame de façon plus claire et plus intelligible ». Il s’agit bien de décrire, non pas d’agir, et de décrire si possible ce qu’il y a de plus difficile à appréhender : l’homme et ses passions. Car Zweig est avant tout un humaniste, non un idéologue : c’est l’homme qui l’intéresse, plus que les idées, la Renaissance plus que les Lumières. L’homme non pas pour le juger, mais pour mieux le connaître. Zweig ne se veut donc pas moraliste : « en dernière instance » écrit-il dans son Casanova, « ce qui compte, ce n'est pas la moralité, c'est l'intensité ». Comme Dostoïevski, il pensera que « la vie est plus belle que le sens de la vie ». C’est là l’idée maîtresse de son œuvre, et ce qui en fait tout le sel, tout l’intérêt. Freud ne s'y est pas trompé : l'écriture des nouvelles de Zweig est digne d'être psychanalysée. Zweig se délivre de ses démons en écrivant, comme d'autres en venant parler sur leur divan. A propos de La Confusion des sentiments Freud a écrit « La nature humaine est bisexuelle. Cette démonstration se fait chez Zweig avec tant d'art, de franchise et d'amour du vrai, elle est si libre de tout mensonge et de toute sentimentalité propre à notre époque que je reconnais volontiers ne rien pouvoir m'imaginer de plus réussi ».    Qu’en est-il du contexte dans lequel Zweig s’est mis à la littérature ? Au début du XIXe, l’Autriche-Hongrie est un empire multinational immense de cinquante millions d’habitants, en pleine effervescence mais vieillissant car figé sur le plan politique à un système de double monarchie conservatrice. Le pays va vers sa chute mais personne ne s’en rend compte. C’est donc dans une atmosphère de crise permanente que se développe une vie culturelle intense mais aussi une critique intellectuelle de la situation politique. On est en pleine inconscience, dans une ambiance qui va pourtant permettre l’éclosion d’intellectuels comme Hofmannsthal, Ernst Mach, ou encore Schnitzler, qui se penche sur la misogynie en vigueur à Vienne, illustration d’une crise sur le rapport entre hommes et femmes qu’illustre assez bien le couple platonique du vieux professeur et de sa jeune femme dans La Confusion des sentiments. Crise du rapport entre homme et femme, donc, crise de l’individu, crise du langage, crise de l’identité juive, tout cela a façonné l’œuvre littéraire de Zweig, qui arrive un peu tardivement dans cet univers déjà constitué de la « modernité viennoise », dans laquelle il trouve sa source, son inspiration, jusque dans son style. Il y entre très jeune, publie et rencontre immédiatement le succès, à l’instar de Hofmannsthal. Ami de Freud, qui ouvre des voies nouvelles à l'exploration de l'âme humaine, Zweig fera preuve d'une acuité psychologique extraordinaire, analysera avec précision les formes les plus marginales ou les plus extrêmes de la sensibilité humaine, de la psychologie féminine et masculine. Zweig, c’est aussi l’homme des grandes capitales européennes : viennois, berlinois, l’écrivain francophile, qui, tout jeune, a traduit Verlaine et Baudelaire, dévoré Balzac et Zola, a aussi sa place à Paris. Né dans la Vienne cosmopolite et brillante de la fin de l’Empire, la Vienne de Schnitzler et de Freud, Stefan Zweig est issu d’un milieu intellectuel juif assez aisé. Sur son suicide, car il s’est suicidé, un ...

« un empire multinational immense de cinquante millions d'habitants, en pleine effervescence mais vieillissant car figé sur le plan politique à un système de double monarchie conservatrice.

Le pays va vers sa chute mais personne ne s'en rend compte.

C'est donc dans une atmosphère de crise permanente que se développe une vie culturelle intense mais aussi une critique intellectuelle de la situation politique.

On est en pleine inconscience, dans une ambiance qui va pourtant permettre l'éclosion d'intellectuels comme Hofmannsthal, Ernst Mach, ou encore Schnitzler, qui se penche sur la misogynie en vigueur à Vienne, illustration d'une crise sur le rapport entre hommes et femmes qu'illustre assez bien le couple platonique du vieux professeur et de sa jeune femme dans La Confusion des sentiments.

Crise du rapport entre homme et femme, donc, crise de l'individu, crise du langage, crise de l'identité juive, tout cela a façonné l'oeuvre littéraire de Zweig, qui arrive un peu tardivement dans cet univers déjà constitué de la « modernité viennoise », dans laquelle il trouve sa source, son inspiration, jusque dans son style.

Il y entre très jeune, publie et rencontre immédiatement le succès, à l'instar de Hofmannsthal.

Ami de Freud, qui ouvre des voies nouvelles à l'exploration de l'âme humaine, Zweig fera preuve d'une acuité psychologique extraordinaire, analysera avec précision les formes les plus marginales ou les plus extrêmes de la sensibilité humaine, de la psychologie féminine et masculine. Zweig, c'est aussi l'homme des grandes capitales européennes : viennois, berlinois, l'écrivain francophile, qui, tout jeune, a traduit Verlaine et Baudelaire, dévoré Balzac et Zola, a aussi sa place à Paris.

Né dans la Vienne cosmopolite et brillante de la fin de l'Empire, la Vienne de Schnitzler et de Freud, Stefan Zweig est issu d'un milieu intellectuel juif assez aisé. Sur son suicide, car il s'est suicidé, un de ses plus grands biographes, André Maurois, a écrit que « beaucoup d'hommes de coeur ont dû méditer sur la responsabilité qui est celle de tous et sur la honte qu'il y a, pour une civilisation, à créer un monde ou un Stefan Zweig ne peut vivre ».

Certains ont vu dans ce suicide de Zweig, européen de coeur, l'un des symboles les plus terribles du destin tragique de la civilisation européenne ; nous savons désormais que « les civilisations sont mortelles » écrit Paul Valéry.

L'oeuvre de Zweig est nettement influencée par les travaux de Freud ; et La Confusion des sentiments a ceci de commun avec la plupart des romans de Zweig que ce livre traite, encore et toujours, de la passion et de ses ressorts : passion du jeu dans Le joueur d'échecs, d'un homme pour une femme dans Amok, d'une femme pour un homme dans Lettre d'une inconnue et Vingt-quatre heures de la vie d'une femme, passion impossible dans La pitié dangereuse, passion. »

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