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LA CONSCIENCE DE SOI

Publié le 18/01/2020

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conscience
Le moi
La conscience de soi redouble les questions que pose en général le terme « conscience ».
Sentir, éprouver, comprendre, juger, désirer, vouloir, imaginer sont autant d’événements ou d’opérations qui mettent la conscience en relation avec autre chose qu’elle-même : une partie du corps, un stimulus physico-chimique, un mot du langage, un comportement d’autrui, un partenaire sexuel, un projet à réaliser.
La conscience fascinée
S’il est douteux que l’animal ait conscience de son animalité, il est certain que l’homme est fasciné par l’animal, en face duquel il prend conscience du caractère énigmatique de sa propre humanité. En particulier, le face à face avec le singe supérieur, ce singe que le cardinal de Poli-gnac apostrophait en termes cartésiens : « Parle, et je te baptise!», ouvre à la conscience humaine une suite d’interrogations sur sa propre spécificité. L’humanité paraît nue, désarmée, démunie et terriblement vulnérable au regard d’une animalité sans problèmes, sans complexes, richement dotée, puissamment installée dans la Nature (cf. «La fable de Prométhée et d’Épiméthée», pp. 105 sq). L’animal serait-il un homme sans angoisse, sans ce « péché originel » qui justifie Dieu, selon Pascal et saint Augustin, des maux qui accablent même «les petits enfants»? Serait-il l’être «libéré», dont l’insouciante vitalité n’aurait nul besoin de se payer de mots? On retrouve l’écho de ces thèmes dans la philosophie de Nietzsche, mais aussi dans celle d’un Freud ou d’un Bergson. Or, la fascination de l’animalité donne lieu, sous sa forme extrême, à toutes sortes d’idéologies qui célèbrent les vertus régénératrices de la barbarie, la supériorité de l’instinct sur l’intelligence, les avantages de tout comportement bestial qui s’avère créatif et performant sans l’interminable détour par l’instruction ou sans le passage obligé par une éducation castratrice. Au contraire, une stricte démarcation est tracée entre l’animal et l’homme par Platon, Descartes, Kant, Auguste Comte - et par tous ceux qui, commençant par définir l’homme comme un « animal », ajoutent que cet animal est « raisonnable», qu’il parle, qu’il fabrique des outils, qu’il vit en «société», qu’il est capable de rire et de pleurer, aussi bien que de faire la guerre, de torturer et d’humilier ses congénères -, ce qui revient à dire qu’il est autre chose qu’un animal. Non pas nécessairement supérieur, mais àutre. Cette altérité n’est autre que celle de la conscience de soi.
Mais le sujet conscient peut se prendre lui-même comme objet : cette opération de retournement de la conscience sur elle-même, est, selon Kant, le privilège de l’homme :
«Le fait que l’homme puisse avoir le Je dans sa représentation l’élève infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivant sur la terre. »
Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique, I, §1.
Cette possibilité de dire Je. à laquelle, comme le remarquait Kant, l’enfant n’accède qu’assez tard après avoir jusque-là parlé de lui à la troisième personne (Karl veut manger, marcher, etc.), constitue un moment décisif et irréversible : «Il semble que ce soit pour lui comme une lumière qui vient de se lever quand il commence à dire Je ; à partir de ce jour, il ne revient jamais à l’autre manière de parler. »
Quelle que soit la valeur attribuée au Moi, l’accès réservé à l’homme de la simple conscience spontanée à cette conscience de soi est à tous égards déterminant. Comme le résume brièvement Kant : «Auparavant, l’enfant ne faisait que se sentir, maintenant il se pense ».
Ce moi une fois découvert fournit matière à des descriptions et à des appréciations contradictoires.

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Cependant l’unité objective du monde n’est jamais entièrement satisfaisante pour une conscience humaine. La conscience d’un sujet qui agit, parmi d’autres sujets, est une conscience «déchirée», qui oppose au monde tel qu’il est le monde tel qu’il devrait être. La conscience humaine est ainsi, essentiellement, d’ordre moral. Quand elle fait retour sur elle-même, la conscience de soi, qui est bien loin d’être connaissance de soi, aperçoit en chacun non point ce qu’il est, mais ce qui lui manque pour être ce qu’il veut être. Ainsi, la conscience humaine n’indique pas seulement ce qu’il y a à voir, mais ce qu’il y a à faire. À l’unité d’un monde d’objets, tel que le constitue la science, là conscience oppose, comme son fondement premier et comme sa visée ultime, l’unité du monde des sujets.
Métaphysique du sentiment
En un sens, toute activité consciente est une quête. Toute existence est aussi, à sa manière, une quête, une recherche non pas à proprement parler inconsciente mais ignorante de son objet. Cette ignorance se manifeste à la conscience d’un sujet sous les espèces du sentiment, du désir, de l’appétit ou de l’angoisse. Ne peut-on dire dès lors qu’une telle conscience, en quête de quelque fin que ce soit (le bonheur, la béatitude, la paix perpétuelle ou le néant), est au fond non seulement conscience de soi mais mémoire de soi, comme si tout homme avait la nostalgie d’une « vie antérieure» (Baudelaire), du «paradis perdu» (Milton), du séjour au royaume des Idées (Platon), de la vérité divine dont il procède (saint Augustin) ou d’un état primitif d’indivision et d’inertie (Freud) ? Ne faut-il pas présupposer que toute conscience, dans sa visée du futur, est animée par la mémoire de son origine qui constitue son être véritable? Cette interrogation peut se traduire aussi bien dans le langage de la théologie ou de la biologie, de la métaphysique ou de la métapsychologie. Elle signifie en tout cas que le devenir conscient est un moment décisif de la subjectivité ; Que ce moment soit appelé « émergence » plutôt que sentiment, il n’en reste pas moins qu’il constitue, selon là formule de Feuerbach, «un changement qualitatif de l’être tout entier» qui distingue essentiellement l’homme de l’animal.
«Le matérialiste dépourvu d’esprit déclare : “L’homme se distingue de l’animal uniquement par la conscience, il est un animal, mais doué de conscience”, oubliant par là que chez un être qui s’éveille à la conscience, il se produit . un changement qualitatif de l’être tout entier. »
Ludwig Feuerbach, L’Essence du christianisme. Introduction, §1.
Le visage et l’empreinte de l’Humanité
Dans Les Mots et les Choses, Foucault évoquait la disparition de l’humànité - ou plutôt la fin de l’humanisme -

conscience

« 208 La problématique du sujet comportement bestial qui s'avère créatif et performant sans l'interminable détour par l'instruction ou sans le pas­ sage obligé par une éducation castratrice.

Au contraire, une stricte démarcation est tracée entre l'animal et l'homme par Platon, Descartes, Kant, Auguste Comte -et par tous ceux qui, commençant par définir l'homme comme un « animaf », ajoutent que cet animal est «raison­ nable», qu'il parle, qu'il fabrique des outils, qu'il vit en «société», qu'il est capable de rire et de pleurer, aussi bien que de faire la guerre, de torturer et d'humilier ses congénères -, ce qui revient à dire qu'il est autre chose qu'un animal.

Non pas nécessairement supérieur, mais autre.

Cette altérité n'est autre que celle de la conscience de soi.

Mais le sujet conscient peut se prendre lui-même comme oJ?jet : cette opération de retournement de la conscience sur· elle-même, est, selon Kant, le privilège de l'homme : «Le fait que l'homme puisse avoir le Je dans sa repré­ sentation l'élève infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivant sur la "terre.

» Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique, 1, § 1.

Cette possibilité de dire Je.à laquelle, comme le remar­ quait Kant, l'enfant n'accède qu'assez tard après avoir jusque-là parlé de lui à la troisième personne (Karl veut manger, marcher, etc.), constitue un moment décisif et irré­ versible : «Il semble que ce soit pour lui comme une lumière qui vient de se lever quand il commence à dire Je; à partir de ce jour, il ne revient jamais à l'autre manière de parler.» Quelle que soit la valeur attribuée au Moi, l'accès réservé à l'homme de la simple conscience spontanée à cette conscience de soi est à tous égards déterminant.

Comme le résume brièvement Kant : «Auparavant, l'enfant ne faisait que se sentir, maintenant il se pense».

Ce moi une fois découvert fournit matière à des des­ criptions et à des appréciations contradictoires.. »

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