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LA LIBERTÉ : ASSUMER LA DIFFÉRENCE

Publié le 24/03/2015

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Dégagez l'intérêt philosophique de ce texte à partir de son étude ordonnée 1 :

« La valeur d'une chose réside parfois non dans ce qu'on gagne en l'obtenant, mais dans ce qu'on paye pour l'acquérir, — dans ce qu'elle coûte. Je cite un exemple. Les institutions libérales cessent d'être libé­rales aussitôt qu'elles sont acquises : il n'y a, dans la suite, rien de plus foncièrement nuisible à la liberté que les institutions libérales. On sait bien à quoi elles aboutissent : elles minent sourdement la volonté de puissance, elles sont le nivellement de la montagne et de la vallée érigé en morale, elles rendent petit, lâche et avide de plaisirs, — le triomphe des bêtes de troupeau les accompagne chaque fois. Libéralisme : autrement dit abêtissement par troupeaux. (...)

Qu'est-ce que la liberté ? C'est avoir la volonté de répondre de soi. C'est maintenir les distances qui nous séparent. C'est être indifférent aux chagrins, aux duretés, aux privations, à la vie même. C'est être prêt

à sacrifier les hommes à sa cause, sans faire exception de soi-même. Liberté signifie que les instincts joyeux de guerre et de victoire prédominent sur tous les autres instincts, par exemple sur ceux du « bonheur «.

NIETZSCHE

Ce bon devoir a pu être d'autant plus apprécié qu'il montre des qualités qui ne se rencontrent pas très fréquem¬ment dans la série D. Il est rédigé avec aisance, il est métho¬dique, il fait preuve d'une réelle culture philosophique.

Le candidat aurait pu indiquer plus nettement sa méthode et les articulations tant de sa pensée que du texte; mais on voit qu'il a une méthode et que sa pensée est construite. Il prend le texte partie par partie; pour chacune, il résume, explique, puis il compare avec d'autres positions philoso¬phiques, et discute. C'est une méthode parfaitement légi¬time, parmi toutes celles que l'on peut employer pour trai¬ter le sujet-texte. Il est indispensable, pour ce type de sujet, qu'un candidat sache exactement ce qu'il veut faire et quel procédé de réflexion il veut employer; ce qu'il doit éviter avant tout, c'est ce qu'un correcteur a appelé .un jour « la bouillie paraphrastique «. Bien des candidats, surtout en série D, choisissent le texte parce qu'ils se figurent qu'on arrivera toujours à s'en tirer en délayant ce texte; cette illusion les conduit à des catastrophes qu'il leur aurait été pourtant facile d'éviter. Ici, au contraire, le candidat procède avec fermeté et le texte ne lui est pas un prétexte pour se dispenser de connaissances.

« à sacrifier les hommes à sa cause, sans faire exception de soi-même.

Liberté signifie que les instincts joyeux zo de guerre et de victoire prédominent sur tous les autr7s instincts, par exemple sur ceux du « bonheur ».

NIETZSCHE La liberté est la condition fondamentale de l'épa­ nouissement de la personnalité d'un être humain.

L'esclave qui n'a pas choisi sa condition, ne possède pas de dignité, le sait, et en souffre.

Nietzsche, en définissant « la valeur d'une chose », prend dans ce texte l'exemple de la liberté, et est amené ainsi à exprimer précisément ce que liberté signifie pour lui.

Nietzsche a été le premier philosophe à soulever le problème de valeurs en refusant par exemple les 10 valeurs morales posées par le christianisme, comme humilité et charité.

« La valeur d'une chose », écrit-il, «réside parfois non dans ce qu'on gagne en l'obtenant, mais dans ce qu'on paye pour l'acquérir, -dans ce qu'elle « coûte ».

C'est-à-dire que la valeur n'est pas 1 j dans la possession de la chose, mais dans la lutte et l'effort pour parvenir à cette possession.

Nietzsche prend lui-même l'exemple de la liberté : « les institu­ tions libérales cessent d'être libérales aussitôt qu'elles sont acquises ».

La valeur de la liberté repose donc zo dans l'effort que l'homme fait pour instituer la liberté.

Mais une liberté instituée est bâtie sur des lois, et les lois deviennent pour Nietzsche des entraves à la liberté, car « elles minent sourdement la volonté de puis­ sance ».

La volonté de puissance est chez Nietzsche la Zj condition première d'une vie humaine qui se veut digne et libre.

Elle représente le désir de possession de l'homme sur le monde, et sur lui-même, afin qu'il se transcende et devienne un maître, un surhomme.

Les institutions libérales donnent immédiatement à 30 l'homme la liberté qu'il n'a plus la peine de conquérir, l'homme ne cherche plus à se dépasser, à être fort et puissant, il devient semblable à tous les autres, «petit, lâche et avide de plaisirs ».

Les institutions libérales sont « le nivellement de la montagne et de la vallée 31 érigé en morale ».

Olivier Reboul, dans Nietzsche - 141 -. »

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