La morale peut-elle juger la politique ?
Publié le 15/02/2004
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Selon Machiavel, la politique ne se définit pas par un but qui convergerait avec les valeurs morales de bien et de juste, mais comme unart, c'est-à-dire un ensemble de techniques et de stratégies, visant àprendre le pouvoir et à le conserver.
Son ouvrage, Le prince , envisage, comme son titre l'indique, la politique du point de vue de celui qui gouverne etnon de celui du bonheur des citoyens gouvernés.
La morale et la justice nepeuvent juger les procédés que le Prince emploie pour conserver le pouvoir :ces procédés peuvent en effet être éventuellement immoraux, mais ils sontsurtout amoraux, c'est-à-dire qu'ils se situent hors de toute morale.L'exercice du pouvoir demande en premier lieu d'être réaliste, et de prendreen compte la concurrence pour le pouvoir.
Pour conserver le pouvoir, le Princedoit s'arranger pour ne pas être haï de ses sujets : mais cela ne revient pas àdire qu'il doit juger ses actions à partir de la morale, car les sujets eux-mêmesne sont pas des êtres moraux : les moyens à utiliser sont donc la ruse, latromperie et la force.
Si la morale ne peut juger la politique, c'est parce quela perspective adoptée part du postulat réaliste que dans la sphère pratiqueet concrète, que ce soit celle des sujets ou celle des dirigeants, la moralen'est pas ce qui guide les actions des hommes.
Ceux-ci sont bien plutôtguidés par leurs intérêts et leurs passions : ceci est un état de fait qui ne sesitue pas au même niveau que le jugement du bien et du mal.
3° Il existe un système moral pour la politique, différent et plus souple que la morale qui vaut au niveau individuel
La perspective de Machiavel peut poser problème si l'on pense qu'il justifie le caractère amoral de la politique par l'idée que de fait, les hommes ne sont pas moraux : en effet, la visée même de la morale n'est-elle pas decorriger cet état de fait ? Ne peut-on alors penser qu'il est possible à la fois de prendre en compte le réalismepolitique et la visée de la morale, sans laquelle la canalisation de la violence et de l'abus de pouvoir ne peut êtregarantie ? Hume, dans le Traité de la nature humaine , propose l'idée qu'il existe, pour les dirigeants politiques et pour les relations entre les nations, une morale différente de la morale qui guide les actions des individus.
Des actespolitiques comme les déclarations de guerre ne peuvent être jugés par la morale individuelle, car un individu et unensemble d'individus constituant un Etat sont des entités qui diffèrent par nature.
Mais ceci n'empêche pasl'existence d'une justice morale au niveau politique, qui peut juger ces actes, et qui prend en compte, par exemple,les règles de commerce basées sur la stabilité de la propriété et le consentement pour son transfert, ou encorel'accomplissement des promesses conclues par traité.
Il ne s'agit donc pas de dire que la morale qui peut juger lapolitique est de moindre étendue que celle qui juge les individus, car les princes ont autant de devoirs que lesindividus, mais qu'elle a plus de souplesse, et qu'elle peut être transgressée, au nom de l'intérêt de l'Etat, pour desmotifs qui ne seraient pas légitimes à une échelle individuelle.
Conclusion
La morale peut être légitimée à juger la politique si l'on assigne à la politique des buts qui sont ceux de la morale, à savoir le bien et le juste : l'action politique doit alors non pas seulement être jugée, mais être guidée parla sagesse morale.
Cependant, le réalisme dans la considération des actions humaines peut amener à penser lapolitique comme un domaine amoral, ce qui est fondé sur l'amoralisme des rapports entre les hommes dans lasociété : la morale n'a alors aucun droit pour juger la politique.
On peut cependant penser qu'il peut être possible deprendre en compte à la fois les exigences des valeurs morales, notamment celle de justice, tout en prenant encompte la spécificité de la sphère politique, en pensant que la morale qui peut juger la politique n'est pas la moralede l'individu, mais une morale propre à la politique et réglant les rapports entre les nations.
« On a [...] parlé de l'opposition de la morale et de la politique et de l'exigence que la première commande à la.
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