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La mort ajoute-t-elle à la valeur de la vie ?

Publié le 17/01/2022

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Remarquez le caractère paradoxal de la question : il semble que la mort ôte quelque chose plutôt qu'elle n'augmente la valeur de la vie La mort, c'est du néant ; elle n'est rien pour nous. (cf. Epicure) De plus, le pessimiste raisonne ainsi : à quoi bon s'efforcer de vivre, si l'on songe que la mort rendra vaines la plupart de nos actions ? L'intérêt de la question devient évident lorsque l'on s'interroge sur l'effet que la certitude d'une mort inévitable peut avoir sur l'existence de l'homme. Existence et mort sont liées et constituent l'essentiel de la condition humaine : en effet, il n'y a existence que pour un être qui est i « inscient de safinitude, de sa condition de mortel. Parmi les êtres vivants, il est le seul à savoir qu'il mourra ; et la conscience de la mort fait de l'homme un animal métaphysique (car il n'est pas naturel de penser à la mort ; cf. Rousseau, Second Discours, I). Allez jusqu'au bout du paradoxe : contrairement à ce que l'on pense généralement, on peut soutenir que l'homme serait misérable s'il était immortel, (cf. la nouvelle de J.-L. Borges : L'immortel dans l'Aleph) Attardez-vous sur le mot "valeur" dans le sujet. La vie n'est pas en soi quelque chose de précieux (la nature n'est pas avare) ; mais c'est la manière dont elle est perçue par l'homme qui la rend précieuse, Borges écrit : "La mort (ou son allusion) rend les hommes précieux ou pathétiques. (...) Chaque acte qu 'ils accomplissent peut être le dernier. (...) Tout, chez les mortels, a la valeur de l'irrécupérable et de l'aléatoire." L'existence s'accompagne alors d'une certaine angoisse, issue de l'idée du temps qui passe. La mort est l'horizon de notre existence (Heidegger).
La mort tient une place centrale dans la pensée humaine. Et pourtant nul homme ne sait ce qu'elle est, puisque, ainsi que l'observait Kant, « personne n'en peut faire l'expérience en elle-même (car faire l'expérience relève de la vie), mais on ne peut que la percevoir chez les autres « (Anthropologie, § 27). Toutefois, si la connaissance de la mort est impossible, si même, comme le dit Alain, « la mort ne s'imagine point «, l'homme reste obsédé par elle et s'efforce de l'expliquer : ainsi pourra-t-il l'envisager soit comme une autre vie, soit comme un anéantissement. Mais ces représentations de la mort seront-elles sans incidence sur sa conception de la vie ? À ses yeux, la mort ajoute-t-elle à la valeur de la vie, ou, au contraire, l'amoindrit-elle?
  • 1) La mort comme dévalorisation de la vie.
  • 2) La mort ajoute un supplément de sens à l'existence humaine.
  • 3) L'homme, un être pour la mort (Heidegger)

« « On ne cesse de penser à la mort qu'en cessant de penser.

» Marcel Conche, La Mort et la Pensée, 1973. « Que la mort, l'exil et tout ce qui te paraît effrayant soient sous tes yeux chaque jour; mais plus que tout, lamort.

Jamais alors tu ne diras rien de vil, et tu ne désireras rien outre mesure.

» Épictète, Manuel, vers 130 apr. J.-C. « En s'occupant de philosophie comme il convient, on ne fait pas autre chose que de rechercher la mort et l'étatqui la suit.

» Platon, Phédon, Ive s.

av.

J.-C. « Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions tranchées qu'ils ont sur les choses; parexemple, la mort n'a rien d'effrayant, [...] mais c'est l'opinion tranchée selon laquelle la mort est effrayante qui estelle-même effrayante.

» Épictète, Manuel, vers 130 apr.

J.-C. « La mort, si nous voulons nommer ainsi cette irréalité, est la chose la plus redoutable.

» Hegel, La Phénoménologie de l'Esprit, 1807. « Ce qui, pour l'homme, est le principe de tous les maux et de sa bassesse d'âme et de sa lâcheté, ce n'est pas lamort, mais bien plutôt la crainte de la mort.

» Épictète, Entretiens, vers 130 apr.

J.-C. « Le courage consiste à ne pas craindre la mort.

Or, comme la mort est la séparation de l'âme d'avec le corps,cette séparation ne saurait effrayer celui qui aime à être seul.

» Plotin, Ennéades, Ille s.

apr.

J.-C. « Ne méprise pas la mort, mais fais-lui bon accueil, comme étant une des choses voulues par la nature.

» Marc- Aurèle, Pensées pour moi-même, IIe s.

apr.

J.-C. « Dès qu'un humain vient à la vie, il est déjà assez vieux pour mourir.

» Heidegger, Être et Temps, 1927. « [La] condition nécessaire à la possibilité même d'une évolution, c'est la mort.

Non pas la mort venue du dehors,comme conséquence de quelque accident.

Mais la mort imposée du dedans, comme une nécessité prescrite, dèsl'oeuf, par le programme génétique même.

» François Jacob, La Logique du vivant, 1970. La mort est en effet inscrite dans le programme génétique de toute cellule vivante.

C'est elle qui rend lareproduction (et donc la perpétuation de l'espèce) possible.

Sans la mort, il n'y aurait pas de vie. « La croyance à la nécessité interne de la mort n'est peut-être qu'une de ces nombreuses illusions que nous noussommes créées pour nous rendre "supportable le fardeau de l'existence".

» Freud, Essais de psychanalyse, 1923. « Familiarise-toi avec l'idée que la mort n'est rien pour nous, car tout bien et tout mal résident dans la sensation;or, la mort est privation de toute sensibilité.

» Épicure, Lettre à Ménécée, ive s.

av.

J.-C. « Celui des maux qui fait le plus frémir n'est rien pour nous, puisque tant que nous existons, la mort n'est pas, etque, quand la mort est là, nous ne sommes plus.

» Épicure, Lettre à Ménécée, IIIe s.

av.

J.-C. L'homme « s'indigne d'avoir été créé mortel; il ne voit pas que dans la mort véritable il n'y aura plus d'autre lui-même demeuré vivant pour pleurer sa fin et, resté debout, gémir de voir sa dépouille devenue la proie des bêtes etdes flammes.

» Lucrèce, De la Nature, 1er s.

av.

J.-C.. »

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