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LA NATURE DE L'HOMME DANS LES PENSEES DE PASCAL

Publié le 23/03/2011

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Grandeur et misère. — Rôle de la Pensée. — Le divertissement. — La religion chrétienne.    Jusqu'ici, l'originalité de Pascal s'est révélée dans l'invention et l'analyse des idées particulières, beaucoup plutôt que dans le choix d'un point de vue ; Pascal ne nous a paru original que dans les détails ou les conséquences, non dans le principe.    Il s'est, en effet, cantonné sur le même terrain que les prédicateurs et les moralistes chrétiens de ce temps et de tous les temps. Il a pris le parti de mettre devant l'esprit de l'indifférent la fragilité de la vie, l'imminence de la mort, les risques de vie future, et il a proposé la religion comme une assurance à la fois contre les craintes provoquées en nous par ces risques et contre ces risques eux-mêmes.    En cela, à part les formules saisissantes, dont il use, « grossières « comme un coup de pierre, à part les observations psychologiques qu'il ajoute sur la « machine «, sur « l'incertain «, sur la « coutume «, sur le « cœur «, sur « l'ordre « et sur les limites de la raison, que dit-il qui n'ait été dit mille fois dans la chaire chrétienne, et dans les livres de dévotion, ou dans les simples manuels de morale séculière ?

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« qu'il passe et infiniment estimable en tant qu'il aboutit à l'éternité ». Cette même dualité de l'homme est sans cesse répétée par les poètes. Je sens deux hommes en moi, chantera un jour Racine, et Louis XIV dira qu'il connaît bien ces deux hommes. Or, pour Racine ou pour Bossuet ou pour tous les moralistes ce sont deux états qui se succèdent, en s'excluant.Méprisable, l'homme n'est que méprisable ; grand, il n'est que grand.

S'il s'abaisse, il est tout avili ; s'il se relève, ilest tout ennobli. Pascal a constaté sans cesse la vérité de ce doubla état.

Il l'a exprimé par les notions de grandeur et de misère. Mais, de ces deux états, il n'a fait qu'un seul état, comme les deux bras de la balance sont une seule balance. * * * Ne dites pas qu'il entend les choses comme La Rochefoucauld, son voisin d'esprit, et que pour lui, comme pourl'auteur des Maximes, l'état de l'homme est un état mixte où se mêlent confusément le bien et le mal, la vertu et levice, la grandeur et la misère, sans qu'il soit possible de les séparer, sauf par une vue de l'esprit à laquelle, dans laréalité, rien ne répondrait. La position de Pascal est encore différente : selon l'auteur des Pensées, l'esprit même ne peut imaginer en l'hommela grandeur séparée de la misère et la misère séparée de la grandeur : parce que la grandeur provient de la misère,et la misère de la grandeur.

Sans grandeur, point de misère, sans misère, point de grandeur ! Il faut reprendre lacomparaison des deux plateaux de la balance : si un plateau ne s'abaisse pas, l'autre ne s'élève point. J'indique tout de suite et par anticipation, qu'il n'y aura jamais, selon Pascal, un état de grandeur sans misère ou demisère sans grandeur, sauf en allant plus haut que l'humanité ou plus bas qu'elle, dans un état où la mort seule nousplacera. Il est assez difficile de « réaliser » cette corrélation : grandeur-misère, si on ne se met au point de perspective oùdoit se placer le savant, le physicien en particulier, devant la nature.

Elle est claire pour un esprit familier, parexemple, avec les notions d'équilibre mathématique, définies par Pascal.

L'auteur du Traité de l'Equilibre des Liqueursdevait la trouver tout à fait naturelle et simple dans sa complexité. Au reste, il s'applique à la formuler avec force et netteté à diverses reprises.

Le fragment le plus explicite est le N°416. La misère se concluant de la grandeur, et la grandeur de la misère, les uns ont conclu de la misère d'autant plusqu'ils en ont pris pour preuve la grandeur, et les autres concluant la grandeur avec d'autant plus de force qu'ils l'ontconclue de la misère même, tout ce que les uns ont pu dire pour montrer la grandeur n'a servi que d'un argumentaux autres pour conclure la misère, puisque c'est être d'autant plus misérable qu'on est tombé de plus haut ; et lesautres, au contraire.

Ils se sont portés les uns sur les autres par un cercle sans fin : étant certain qu'à mesure queles hommes ont de lumière, ils trouvent et grandeur et misère en l'homme.

En un mot, l'homme connaît qu'il estmisérable : il est donc misérable, puisqu'il l'est ; mais il est bien grand, puisqu'il le connaît. * * * Ce fragment nous indique déjà un troisième terme de la conception Pascalienne. Une balance ne se définit point complètement par deux bras qui s'équilibrent, il faut aussi, pour qu'elle existe etfonctionne, le point d'appui, sur qui elle s'articule, le couteau, comme on dit. Dans le rapport grandeur-misère, il y a aussi le couteau de la balance. C'est la pensée. Sur la pensée, oscille le levier grandeur-misère. L'homme n'est misérable, que parce qu'il pense ; s'il ne pensait pas, s'il ne se savait pas misérable, il ne le serait pasplus qu'un arbre ou une linotte. Mais, d'autre part, se connaître misérable (ce qui est « être misérable »), c'est une grandeur. La grandeur de l'homme est grande en ce qu'il se connaît misérable. Un arbre ne se connaît pas misérable. C'est donc être misérable que de se connaître misérable.

Mais c'est être grand que de connaître qu'on est misérable.. »

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