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La religion est-elle intolérante ?

Publié le 07/03/2004

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religion
 » Tous les préjugés des hommes reposent donc sur une conception anthropomorphique de la nature (« Les hommes supposent communément que toutes les choses de la nature agissent comme eux en vue d'une fin »), qui culmine dans l'idée que Dieu agit comme un être humain : il est pourvu d'une volonté et dirige tout selon ses buts et ses fins. Dès lors tout phénomène naturel sera compris comme s'expliquant par la volonté de Dieu. Il deviendra donc impossible d'expliquer la nature par elle-même : tout phénomène (une maladie par exemple) ne sera pas compris par ses causes naturelles, mais saisi comme manifestation, comme signe de la volonté divine (la colère de Dieu, qui pour punir les hommes leur envoie la maladie en question). Il vaut la peine de suivre la démonstration de Spinoza. Celui-ci pose en principe un fait indéniable, celui qui veut que : « Tous les hommes naissent sans aucune connaissance des causes des choses, et que tous ont un appétit de rechercher ce qui leur est utile, et qu'ils en ont conscience. » Nous avons conscience de nos désirs, mais non de leurs causes. Par suite les hommes croient désirer librement, croient que leurs désirs naissent d'eux-mêmes (comme un ivrogne sous l'emprise de l'alcool croit désirer librement sa bouteille). Or une autre caractéristique des êtres humains est qu'ils agissent toujours dans un but, en poursuivant une fin, une utilité. Pour les hommes, comprendre la nature, c'est donc rechercher dans quel but telle ou telle chose existe, quelle est son utilité. Quand nous regardons un objet, notre première impulsion est de nous demander à quoi il sert, comme si son utilité rendait raison  de son existence.
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« avidité.

» La boucle est bouclée : Dieu ou les Dieu x sont conçus comme des personnes, agissant dans un but, favorisant les hommes en échange d'un culte.

C'est une conception anthropomorphique du divin, puisque Dieu est conçu sur le modèle de l'humanité.

Le monde est expliqué en dépit du bon sens. Toute Révélation, tout dogme et toute Église conduisent au fanatisme et à la guerre (problème toujours actuel des« guerres de religions »).

De ce constat découle l'intérêt du déisme (chez Voltaire) ou du théisme (chez Rousseau),qui se tiennent à l'écart des dogmes. Vous ne voyez dans mon exposé que la religion naturelle : il estbien étrange qu'il en faille une autre.

Par où connaîtrai-je cettenécessité ? De quoi puis-je être coupable en servant Dieu selon leslumières qu'il donne à mon esprit et selon les sentiments qu'ilinspire à mon coeur ? Quelle pureté de morale, quel dogme utile àl'homme et honorable à son auteur puis-je tirer d'une doctrinepositive, que je ne puisse tirer sans elle du bon usage de mesfacultés ? Montrez-moi ce qu'on peut ajouter, pour la gloire deDieu, pour le bien de la société, et pour mon propre avantage, auxdevoirs de la loi naturelle, et quelle vertu vous ferez naître d'unnouveau culte, qui ne soit pas une conséquence du mien.

Les plusgrandes idées de la Divinité nous viennent par la raison seule.Voyez le spectacle de la nature, écoutez la voix intérieure.

Dieun'a-t-il pas tout dit à nos yeux, à notre conscience, à notrejugement ? Qu'est-ce que les hommes nous diront de plus ? Leursrévélations ne font que dégrader Dieu, en lui donnant les passionshumaines.

Loin d'éclaircir les notions du grand Être, je vois que lesdogmes particuliers les embrouillent ; que loin de les ennoblir, ilsles avilissent ; qu'aux mystères inconcevables qui l'environnent ilsajoutent des contradictions absurdes ; qu'ils rendent l'hommeorgueilleux, intolérant, cruel ; qu'au lieu d'établir la paix sur laterre, ils y portent le fer et le feu.

Je me demande à quoi bon toutcela sans savoir me répondre.

Je n'y vois que les crimes des hommes et les misères du genrehumain.On me dit qu'il fallait une révélation pour apprendre aux hommes la manière dont Dieu voulait êtreservi ; on assigne en preuve la diversité des cultes bizarres qu'ils ont institués, et l'on ne voit pas quecette diversité même vient de la fantaisie des révélations.

Dès que les peuples se sont avisés de faireparler Dieu, chacun l'a fait parler à sa mode et lui a fait dire ce qu'il a voulu.

Si l'on n'eût écouté que ceque Dieu dit au coeur de l'homme, il n'y aurait jamais eu qu'une religion sur la terre.Il fallait un culte uniforme ; je le veux bien : mais ce point était-il donc si important qu'il fallût toutl'appareil de la puissance divine pour l'établir ? Ne confondons point le cérémonial de la religion avecla religion.

Le culte que Dieu demande est celui du coeur ; et celui-là, quand il est sincère, est toujoursuniforme. Rousseau appelle Dieu la « volonté puissante et sage » qui « meut l'univers et ordonne toutes choses ».

Il enconçoit l'existence nécessaire par l'usage de sa raison ; il le discerne dans « le spectacle de la nature » ; ils'adresse à lui mais ne le prie pas, car lui demander quelque chose reviendrait à contester l'ordre du mondeétabli par sa sagesse, plutôt que de changer la volonté de l'homme ; enfin, il lui rend un culte par l'ouverturede son coeur : sa pratique religieuse se réduit à une morale du sentiment.Telle est la religion naturelle ou théisme : elle consiste à remonter, par les lumières de la raison, depuis l'ordrede l'univers jusqu'à son auteur, l'« architecte », I'« horloger » dont parle Voltaire.

Cet Être suprême, le Dieudes philosophes, a peu à voir avec le Dieu des religions historiques ; il est d'ailleurs accessible sans lamédiation d'une révélation, d'un arsenal de dogmes, ou d'une Église, qui ont pour seul effet de répandrel'intolérance, « les crimes des hommes et les misères du genre humain ».L'audace de telles affirmations, sous l'Ancien Régime, explique la condamnation de l'Émile par l'archevêque deParis, et sa censure par les docteurs de la Sorbonne. Cependant, peut-il y avoir une foi sans dogmes ? Plus moderne, bien que déjà préconisé par Spinoza, le souci d'unÉtat laïc, comme garant de pluralisme et de tolérance, situe résolument le problème sur un plan politique. Une religion tolérante C.

Il convient de reformuler le type de relation entre religion et tolérance, afin de nuancer la position : la foireligieuse peut être compatible avec la tolérance, et peut même l'alimenter.

Si l'on admet la citation de Bernanos («C'est la foi chancelante qui fait les fanatiques »), c'est que l'on considère que l'adhésion ferme à une vérité conduità une confiance en l'autre et en l'avenir ; c'est au contraire le doute, l'incertitude, l'ébranlement des repères, qui. »

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