La souffrance d'autrui est une chose qui doit s'apprendre et jamais elle ne peut etre apprise pleinement... Nietzsche
Publié le 21/04/2005
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n'est que le résultat d'une longue construction historique, rendue possible d'abord par la soumission desindividus à l'État.
De même, contrairement à ce que pense Schopenhauer, la pitié n'est pas un sentimentpremier.
Certes Nietzsche s'est autrefois converti à la philosophie sous l'influence de Schopenhauer, maismaintenant il rejette la théorie qui ferait de la pitié, comme commisération à l'égard de la souffrance d'autrui,le fondement de la morale, le moyen privilégié de s'identifier à autrui :« La pitié a aussi peu le plaisir d'autrui pour but que comme j'ai dit, la méchanceté ne se propose la douleurd'autrui en soi.
»Dans sa dénonciation de la pitié, Nietzsche s'inspiredirectement de La Rochefoucauld dont il cite l'« auto-portrait » de 1659.
La Rochefoucauld déclare, en effet,qu'à l'égard d'une personne affligée :« On doit tout faire, jusqu'à lui témoigner même beaucoup de compassion de son mal, car les misérables sontsi sots que cela leur fait le plus grand bien du monde ; mais je tiens aussi qu'il faut se contenter d'entémoigner, et se garder soigneusement d'en avoir.
C'est une passion qui n'est bonne à rien au-dedans d'uneâme bien faite, qui ne sert qu'à affaiblir le coeur et qu'on doit laisser au peuple qui, n'exécutant jamais rienpar raison, a besoin de passions pour le porter à faire les choses.
»Mais Nietzsche va plus loin encore, jusqu'à renverser la situation et à faire du faible, dont on a pitié, un fort.La pitié que les spectateurs éprouvent à l'égard des faibles et des souffrants est une consolation pour lesmalheureux, parce que ces derniers reconnaissent alors avoir au moins encore un pouvoir, en dépit de leurfaiblesse : le pouvoir de faire mal.
C'est dans l'aphorisme 50 du même chapitre que Nietzsche ditexpressément :« Le malheureux prend une espèce de plaisir à ce sentiment de supériorité dont lui donne conscience letémoignage de pitié ; son imagination s'exalte, il est toujours assez puissant encore pour causer de ladouleur au monde.
Ainsi la soif de pitié est une soif de jouissance de soi-même, et cela aux dépens de sessemblables.
»Cette méfiance, et le mot est évidemment trop faible, de Nietzsche à l'encontre de la pitié, n'est passeulement protestation contre la morale de la pitié de Schopenhauer.Elle est plus encore dénonciation de la morale chrétienne, celle qui ouvre, après le socratisme, un nouveautemps de décadence.
Au contraire, Nietzsche exalte les temps anciens du progrès et de la vitalité commecelui de l'instinct hellénique, ou plus près de nous celui de la Renaissance.
Dans ce temps des époquesvigoureuses, dit-il dans Le Crépuscule des idoles :« Les cultures nobles voyaient dans la pitié, dans l"'amour du prochain", dans le manque d'égoïsme etd'indépendance quelque chose de méprisable.
»Et Nietzsche dans toute son oeuvre, en tant qu'adversaire de cette « honteuse effémination du sentiment »qui croit faire d'autrui un prochain, n'en finit pas de mettre en cause les valeurs du non-égoïsme, lesinstincts de renoncement, d'abnégation, de pitié, jusqu'à appeler parfois à la rescousse les grandsphilosophes.
Ce qu'il fait dans la préface à La Généalogie de la morale :«Chez les philosophes, cette préférence, cette estimation exagérée et toute moderne de la pitié est, eneffet, quelque chose de nouveau : jusqu'à présent c'était précisément sur la valeur négative de la pitié queles philosophes étaient tombés d'accord.
Qu'il me suffise de nommer Platon, Spinoza, La Rochefoucauld etKant, ces quatre esprits aussi différents que possible l'un de l'autre, mais unis sur un point : le mépris de lapitié.
»
NIETZSCHE (Friedrich-Wilhelm). Né à Rocken en 1844, mort à Weimar en 1900. Il fit ses études à l'école de Pforta, puis, renonçant à la carrière ecclésiastique, il les termina aux Universités deBonn et de Leipzig.
La lecture de Schopenhauer et la rencontre avec Wagner sont les événements capitaux decette période.
En 1868, Nietzsche est nommé professeur de philologie grecque à l'Université de Bâle ; il conserva ceposte jusqu'en 1878, date à laquelle il fut mis en congé définitif pour raisons de santé.
Commence alors la série desvoyages de Nietzsche en Italie : Gênes, l'Engadine, Rapollo, Nice, la Sicile, Rome, Venise, lisant Empédocle, jouantChopin et Rossini.
Il découvrit Stendhal et Bizet.
Il passe les mois d'été à Sils-Maria, dans une petite chambre, faceà la montagne.
C'est à Turin, en janvier 1889, qu'il fut terrassé dans la rue par une crise de démence, probablementd'origine syphilitique, et qui se termina par la paralysie générale.
Ramené à Bâle, Nietzsche dut être interné quelquetemps dans une maison de santé ; puis, sa soeur l'accueillit auprès d'elle, à Weimar, où il mourut le 25 août 1900.
Laphilosophie de Nietzsche se caractérise par un amour passionné de la vie.
Ses premiers écrits concernent l'Art ;reprenant la terminologie de Schopenhauer, volonté et représentation, 'Nietzsche distingue l'art dionysien (musique): c'est l'exaltation tragique de la vie, l'état où l'homme a tendance à se confondre dans le monde ; et l'art apollinien(arts plastiques) : le principe apollinien est le principe contemplatif.
Le rêve apollinien s'oppose à l'ivresse.
»
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