La tradition est-elle toujours une forme d'asservissement à un passé révolu ?

? Que devons-nous entendre par tradition ? a) La tradition est « ce qui, dans une société (petite ou grande) et particulièrement dans une religion, se transmet d'une manière vivante, soit par la parole, soit par l'écriture, soit par les manières d'agir » (Lalande). b) Elle désigne à la fois l'acte de transmettre et le contenu de cette transmission, contenu qui peut aussi bien être une doctrine qu'une pratique, ou les deux à la fois, le geste pouvant être aussi un savoir. c) Il conviendrait peut-être de réserver le terme de tradition à celles qui possèdent une dimension religieuse. La tradition n'est en effet pleinement telle qu'en tant qu'elle s'impose, qu'elle ne peut être remise en cause, parce qu'elle apparaît comme supra-humaine, sacrée. En perdant ce caractère, en se faisant profane, elle devient une coutume qui n'est plus impérieuse, une habitude bientôt vouée à disparaître. ? Nous essaierons, dans une perspective phénoménologique, de dégager l'essence de la tradition en l'étudiant dans les sociétés dites « primitives » ou archaïques, où sa place est prépondérante, au point que l'on a pu qualifier ces sociétés de « traditionnelles ». Deuxième partie : La tradition et le temps a) Le phénomène de la tradition dans les sociétés archaïques traduit une ontologie spécifique. ? De même qu'une chose n'a de réalité et de sens que dans la mesure où elle participe à une réalité transcendantale, un geste n'a de réalité et de sens que s'il reproduit un geste archétypal, c'est-à-dire posé à l'origine par un dieu ou un héros. ? Le devenir, en tant qu'il éloigne de l'originel, ne peut donc être conçu que comme une dégradation.