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La vie et les oeuvres de Nietzsche

Publié le 21/03/2011

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     Dans un passage de son livre Aurore, Nietzsche reproche à certains philosophes antérieurs (Kant et Schopenhauer) de n'avoir pas fait de leur pensée « l'involontaire biographie d'une âme «. On ne peut lui adresser pareille critique. Entre sa vie et ses ouvrages la parenté est étroite. L'une des façons d'aborder l'œuvre de Nietzsche, c'est d'y voir, — comme l'écrit l'un de ses meilleurs commentateurs français, M. Henri Lichtenberger, professeur à la Sorbonne, — « une sorte de journal intime « ; — « la confession sincère et passionnée d'une âme d'essence rare «.

   Ainsi, pour Nietzsche plus que pour n'importe quel penseur, il importe de bien connaître la vie avant d'aborder la doctrine, ou les doctrines.    Cette vie est, d'ailleurs, singulièrement intéressante. Dans un autre passage d'Aurore, Nietzsche demande à ceux qui se donnent pour connaisseurs d'hommes : « Avez-vous vécu de l'histoire au fond de vous-mêmes, des commotions et des secousses, de longues et de vastes tristesses, les coups de foudre de la joie ? « Si on lui avait posé la même question, il aurait pu hardiment répondre : oui.

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« à voir dans leur religion la vérité absolue en laquelle ils croyaient.

Protestant, il se juge autorisé à se créer une foipersonnelle, à base de libre critique.

Mais peu à peu la critique est la plus puissante, la foi s'affaiblit, disparaît. Un jour, il écrit à sa sœur : « Voici comment se partagent les voies des hommes : si tu veux le repos de l'âme et lebonheur, crois ; si tu veux être un disciple de la vérité, alors, cherche...

» Il renonce à la théologie à laquelle il s'était d'abord destiné.

Il décide de se consacrer à la philologie, sous l'influencede son maître Ritschl, qui ne réduit point cette science à une simple histoire des formes littéraires, mais y voit unevaste étude de la pensée et des institutions. Nietzsche espère satisfaire ainsi sa curiosité, qui s'étend à tous les sujets, sans tomber dans le dilettantisme, et enfaisant à la nécessité de la spécialisation une juste part. De 1865 à 1869, il passe, à l'Université de Leipzig, quelques années d'étudiant, coupées par le service militaire,qu'interrompt un accident de cheval nécessitant des soins prolongés. Sous la direction de Ritschl, il fait des travaux originaux de philologie, notamment sur les œuvres de Diogène Laërce,le biographe des philosophes grecs. Un jour, par hasard, il entr'ouvre l'œuvre du grand philosophe pessimiste Schopenhauer, et il est saisi d'admiration.

«L'illumination fut soudaine, — écrit M.

Charles Andler, — comme celle de Malebranche découvrant Descartes ». Nietzsche achète le vaste ouvrage, l'emporte chez lui, consacre deux semaines à le lire presque sans interruption,sauf pendant quelques rares heures de sommeil.

Momentanément, il abandonne la philologie pour la philosophie,dépose un sujet de thèse, — qui est refusé, — sur certains aspects de la doctrine schopen-hauérienne.

Il initie sesamis, notamment Erwin Rohde, à la grande philosophie pessimiste. Il rêve d'aller avec Rohde et quelques autres camarades, après leur dernière année d'étude, à Paris, représenter, «en flânant sur les boulevards.

le germanisme et Schopenhauer » : « Oublions notre savoir, — leur écrit-il, —dépédantisons-nous ; connaissons le divin cancan, l'absinthe verte »., Il ne réalisera pas ce projet. En novembre 1868, un événement sensationnel bouleverse la vie de Nietzsche.

Depuis quelque temps, il admire fortRichard Wagner, se plaît à entendre sa musique aux concerts, et à en jouer soit pour lui-même, soit chez des amisOr Wagner vient à Leipzig rendre visite à sa sœur, la femme de l'orientaliste Brockhaus; il s'étonne de constater queMme Brockhaus et l'amie de sa sœur, Mme Ritschl, connaissent déjà l'un des lieds de ses Maîtres-chanteurs ; ildésire entrer en rapport avec l'admirateur inconnu qui contribue ainsi à révéler son œuvre et répandre sa gloire.

Unsoir de pluie et de neige, Nietzsche se rend chez les Brockhaus, honteux de sa pauvre vieille redingote noire, maistout ému à la pensée de rencontrer le maître.

Il lui exprime sa « vénération ».

Tous deux causent, notamment deSchopenhauer.

Le grand artiste et son jeune admirateur se sentent profondément d'accord. Sur ces entrefaites, le canton de Bâle cherche pour son Université un professeur de grec et de latin.

Ritschlconseille de prendre Nietzsche, en dépit de ses vingt-quatre ans : « C'est un génie », écrit-il.

Le jeune homme estnommé professeur de philologie classique à l'Université de Bâle. Il arrive à Bâle le 19 avril 1869.

Il y donne à ses élèves un consciencieux enseignement.

Il y fréquente l'historien dela civilisation, Jacob Burckhardt, puis le professeur d'histoire de l'Eglise Overbeck, à qui le liera une durable amitié. Surtout, il a la joie d'être invité par Wagner à lui rendre visite en sa maison de Tribschen, aux environs de Lucerne.Il y va pour la première fois en mai 1869.

Il y vit des jours d'enthousiasme, « les plus beaux jours de sa vie »(comme il l'écrit à sa sœur).

Wagner lui apparaît « le génie le plus grand et le plus grand homme de notre temps » ;le génie tel que l'a décrit Schopenhauer.

Pour la première fois, Wagner se juge compris, se sent admiré comme ildésire l'être. Avec Wagner vit la fille de Liszt, femme divorcée du chef d'orchestre Hans von Bulow, Cosima, que Wagner épouserapeu après.

Cette femme intelligente et ardente suscite chez Nietzsche une admiration passionnée : elle est « laseule femme de style supérieur qu'il ait connue ».

Comme le remarque M.

Andler, l'âge rapproche plus Cosima deNietzsche que de Wagner, déjà presque sexagénaire.

Ainsi débute, — écrit M.

Andler, —- « un des grands romansd'amour platonique du XIXe siècle, un roman silencieux et douloureux, resté inconnu presque jusqu'à nos jours ».Cosima sera « l'Ariane » dont rêve Nietzsche.

Mais c'est seulement en 1888, au moment où il sombrera dans la folie,qu'il osera lui écrire : « Ariane, je t'aime ». De 1869 à 1872 (année où le ménage Wagner s'installe à Bayreuth), Nietzsche fera à Tribschen vingt-trois visites ouséjours. 1870...

La déclaration de guerre entre la France et l'Allemagne stupéfie Nietzsche.

Il s'indigne, d'abord, contre lepeuple qu'il juge l'agresseur-, contre « le tigre français ».

Citoyen suisse depuis qu'il est professeur à Bâle, il ne peutfaire de service armé.

Il demande à être volontaire dans un corps d'ambulanciers.

Il va connaître par expérience,non les atrocités de la bataille, mais les suites horribles des combats.

Il se sent « le cœur brisé de compassion ».

Aucontact de blessés malades, qu'il ramène en Allemagne, il prend la diphtérie et la dysenterie.

Il tombe très. »

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