Devoir de Philosophie

La violence est-elle un mal nécessaire ?

Publié le 19/10/2005

Extrait du document

que la passion nous permette d'aimer un être autre que nous ? Il n'en est rien et, en aimant le passé, nous n'aimons que notre propre passé, seul objet de nos souvenirs. On ne saurait aimer le passé d'autrui ; par contre, l'amour peut se porter vers son avenir, et il le doit, car, aimer vraiment, c'est vouloir le bien de l'être qu'on aime, et l'on ne peut vouloir ce bien que dans le futur. Tout amour passion, tout amour du passé, est donc illusion d'amour et, en fait, amour de soi-même. Il est désir de se retrouver, et non de se perdre ; d'assimiler autrui, et non de se donner a lui ; il est infantile, possessif et cruel, analogue à l'amour éprouvé pour la nourriture que l'on dévore et que l'on détruit en l'incorporant à soi-même. L'amour action suppose au contraire l'oubli de soi, et de ce que l'on fut ; il implique l'effort pour améliorer l'avenir de celui que l'on aime.Et si souvent l'aveuglement, et l'on ne sait quelle complaisance pour nos caprices, nous font désirer d'être passionnément aimés, il n'en reste pas moins que celui qui est aimé ainsi sait confusément qu'il n'est pas l'objet véritable de l'amour qu'on lui porte ; il devine qu'il n'est que l'occasion, pour celui qui l'aime, d'évoquer quelque souvenir, et donc de s'aimer lui-même. A cette tristesse chez l'aimé correspond chez l'aimant quelque désespoir, car le passionné sent bien que sa conscience ne peut parvenir à sortir de soi, à atteindre une extériorité, à s'attacher à une autre personne.Ainsi s'explique que l'inconstance des passions coïncide souvent avec leur violence. La violence de la passion vient de ce que sa source est l'égoïsme, sentiment d'une grande force, et souffrant mal les obstacles.

La violence est un usage de la force portant atteinte à autrui, que ce soit physiquement – la violence d’un coup – ou moralement – la violence d’une attitude, d’une parole. On peut également envisager la violence dans un cadre politique : la violence est alors un usage de la force assumé par le pouvoir officiel, souvent dans le but d’obtenir un résultat auquel d’autres moyens plus doux ne seraient pas parvenus. Le sujet porte ici sur la pertinence de la position qui envisagerait la violence comme un mal nécessaire. La violence est donc présupposée comme étant un mal – la perspective prise sur elle n’est pas neutre. Mais il faut s’arrêter sur l’expression « mal nécessaire «. Dans le langage courant, elle désigne un acte désagréable, voire violent ou répugnant, dont on ne peut pourtant se passer pour parvenir à une fin que l’on considère comme bonne. Il y aurait donc dans la formulation du sujet l’idée que la violence a quelque chose d’inévitable, d’inéluctable, d’autant plus que le sens philosophique du mot « nécessaire « est un sens fort, puisque ce mot s’applique à ce qui ne peut pas ne pas être, ni être autrement. La question porte donc sur la nature de la violence prise sous un angle déjà bien défini. Pour mesurer la pertinence de cet angle, on pourra s’interroger sur l’origine de la violence - donc sur ce qui explique son existence, ce qui devrait permettre de décider si elle est nécessaire ou évitable -, mais aussi sur son efficace – la violence apparaîtrait alors comme un mode de comportement doté d’une puissance d’action forte qui justifierait qu’on y ait recours dans certains cas. La réponse à ces questions peut être recherchée aussi bien dans le domaine de la philosophie de la conduite de la vie individuelle que dans la philosophie politique – la violence n’étant peut être pas à considérer de la même façon dans ces deux domaines. Il faudra donc tenter d’expliquer le phénomène de la violence, dans ces deux domaines, et voir si – et à quelles conditions – elle peut être envisagée comme inévitable et nécessaire.

« considérer dans la nature de la Guerre, comme elle l'est dans la nature du Beau et du Mauvais Temps.

Car, de mêmeque la nature du Mauvais Temps ne réside pas seulement dans une ou deux averses, mais dans une tendance à lapluie pendant plusieurs jours consécutifs, de même la nature de la Guerre ne consiste pas seulement dans le faitactuel de se battre, mais dans une disposition reconnue à se battre pendant tout le temps qu'il n'y a pas assurancedu contraire. Transition : après avoir proposé une description des processus violents et une explication de leurs origines, il faut maintenant mesurer le degré de nécessité des éléments mis en évidence – fonctionnement des systèmes de pouvoir,caractère incontrôlable des mouvements passionnels : ces éléments sont-ils indépassables ? II.

L'efficacité et l'inévitabilité de la violence On peut soutenir que la violence est dotée d'une puissance que rien ne peut surpasser : la violence politique estalors un moyen très sûr d'exercer un pouvoir, et on peut même aller jusqu'à penser qu'elle est nécessaire aufonctionnement de toute autorité.

De la même façon, la violence est un stimulant individuel puissant, et l'homme quirefuse de l'assumer ne peut s'accomplir.

La violence serait alors un mal nécessaire, parce que rien ne peut être pluspuissant qu'elle. Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live Qu'un fondateur de république, comme Romulus, mette à mort son frère, qu'il consente ensuite au meurtre de TitusTatius, associé par lui à la royauté ; ces deux traits, aux yeux de bien des gens, passeront pour être d'un mauvaisexemple : il semblerait convenu que les citoyens peuvent, à en juger d'après la conduite de leur prince, par ambitionou désir de commander, se défaire de leurs rivaux.Cette opinion serait fondée si l'on ne considérait la fin que se proposait Romulus par cet homicide.Il faut établir comme règle générale que jamais, ou bien rarement du moins, on n'a vu une république ni unemonarchie être bien constituées dès l'origine ou totalement reformées depuis, si ce n'est par un seul individu ; Il luiest même nécessaire que celui qui a conçu le plan fournisse lui seul les moyens d'exécution.

Ainsi, un habile législateur qui entend servir l'intérêt commun et celui de la patrie plutôt que le sien propre et celuide ses héritiers, doit employer toute son industrie pour attirer à soi tout le pouvoir.

Un esprit sage ne condamnerajamais quelqu'un pour avoir usé d'un moyen hors des règles ordinaires pour régler une monarchie ou fonder unerépublique.

Ce qui est a désirer, c'est que si le fait l'accuse, le résultat l'excuse ; si le résultat est bon, il estacquitté ; tel est le cas de Romulus.

Ce n'est pas la violence qui restaure, mais la violence qui ruine qu'il fautcondamner.

Le législateur aura assez de sagesse et de vertu pour ne pas léguer à autrui l'autorité qu'il a prise enmain : les hommes étant plus enclins au mal qu'au bien, son successeur pourrait bien mésuser de l'autorité dont poursa part il aura bien usé ; d'ailleurs un seul homme est bien capable de constituer un État, mais bien courte serait ladurée et de l'État et de ses lois si l'exécution en était remise aux mains d'un seul ; le moyen de l'assurer, c'est de laconfier aux soins et à la garde de plusieurs.

En effet autant une assemblée est peu propre à bien fonder un État, vula diversité des avis sur ce qui est le bien de cet État, autant, ce bien une fois connu, est-elle unanime à ne pas lelaisser échapper. Nietzsche, Par-delà bien et mal S'abstenir réciproquement de s'offenser, d'user de violence, de s'exploiter, considérer la volonté d'autrui commel'égale de la sienne : cela peut, en un sens grossier, devenir entre individus une règle de bonne conduite quand lesconditions nécessaires se trouvent réunies (c'est-à-dire quand leurs forces et leurs critères sont effectivementanalogues, et qu'ils sont apparentés à l'intérieur d'un même corps social).

Mais si l'on voulait étendre ce principe etaller jusqu'à en faire le principe fondamental de la société, il révélerait aussitôt ce qu'il est : la négation de la vie, unprincipe de décomposition et de décadence.

Il faut ici aller au fond des choses et se défendre de toute faiblessesentimentale : vivre c'est essentiellement dépouiller, blesser, subjuguer l'étranger et le faible, l'opprimer, lui imposerdurement nos propres formes, l'incorporer et au moins, au mieux, l'exploiter mais pourquoi toujours employer cesmots auxquels s'attache de tout temps une intention calomnieuse ? Même ce corps à l'intérieur duquel, comme nousvenons de le supposer, les individus se traitent en égaux, c'est le cas dans toute saine aristocratie, doit, s'il estvivant et non moribond, faire contre d'autres corps tout ce dont les individus qui le composent s'abstiennent àl'égard l'un de l'autre : il lui faudra être la volonté de puissance incarnée, il voudra grandir, occuper de plus en plusd'espace, accaparer, devenir prépondérant, non pas en vertu d'une moralité ou d'une immoralité quelconque, maistout simplement parce qu'il vit et parce que la vie est volonté de puissance.

Mais sur aucun chapitre la communeconscience des Européens n'est plus rebelle à se laisser convaincre : partout à l'heure actuelle on rêve avecenthousiasme, et même en leur prêtant un déguisement scientifique, d'états futurs de la société d'où aura disparutout « caractère d'exploitation » : cela sonne à mes oreilles comme si on promettait d'inventer une vie quis'abstiendrait de toute fonction organique.

L'« exploitation » n'est pas le fait d'une société corrompue ou imparfaiteet primitive, elle est inhérente à la nature même de la vie ; elle est sa fonction organique fondamentale, uneconséquence de la volonté de puissance proprement dite, qui est tout bonnement la volonté de vivre.

Et si cettethéorie semble nouvelle, la réalité, elle, est le fait primordial de toute l'histoire ; ayons donc enfin l'honnêteté de lereconnaître ! Transition : cette deuxième partie donne au sujet une réponse affirmative très nette.

On peut cependant lui opposer l'idée selon laquelle la violence ne serait pas tant un mal nécessaire qu'un pis-aller, et qu'il serait préférable,au lieu d'y consentir, de chercher des moyens non-violents de produire les mêmes effets qu'elle.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles