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L'Assommoir - Gueule d'Or - extrait du chapitre VI

Publié le 22/03/2010

Extrait du document

Et Gervaise, en face de la Gueule-d'Or, regardait avec un sourire attendri. Mon Dieu ! que les hommes étaient donc bêtes ! Est-ce que ces deux-là ne tapaient pas sur leurs boulons pour lui faire la cour ! Oh ! elle comprenait bien, ils se la disputaient à coups de marteau, ils étaient comme deux grands coqs rouges qui font les gaillards devant une petite poule blanche. Faut-il avoir des inventions, n'est-ce pas ? Le coeur a tout de même, parfois, des façons drôles de se déclarer. Oui, c'était pour elle, ce tonnerre de Dédèle et de Fifine sur l'enclume ; c'était pour elle, tout ce fer écrasé ; c'était pour elle, cette forge en branle, flambante d'un incendie, emplie d'un pétillement d'étincelles vives. IIs lui forgeaient là un amour, ils se la disputaient, à qui forgerait le mieux. Et, vrai, cela lui faisait plaisir au fond ; car enfin les femmes aiment les compliments. Les coups de marteau de la Gueule-d'Or surtout lui répondaient dans le coeur ; ils y sonnaient, comme sur l'enclume, une musique claire, qui accompagnait les gros battements de son sang. Ça semble une bêtise, mais elle sentait que ça lui enfonçait quelque chose là, quelque chose de solide, un peu du fer du boulon. Au crépuscule, avant d'entrer, elle avait eu, le long des trottoirs humides, un désir vague, un besoin de manger un bon morceau ; maintenant, elle se trouvait satisfaite, comme si les coups de marteau de la Gueule-d'Or l'avaient nourrie. Oh ! elle ne doutait pas de sa victoire. C'était à lui qu'elle appartiendrait. Bec-Salé, dit Boit-sans-Soif, était trop laid, dans sa cotte et son bourgeron sales, sautant d'un air de singe échappé. Et elle attendait, trés rouge, heureuse de la grosse chaleur pourtant, prenant une jouissance à être secouée des pieds à la tête par les dernières volées de Fifine.

Plan de l'étude

Situation du passage dans le roman.

L'enjeu de la scène - l'érotisme connoté

L'énonciation : la variété des points de vue, un des caractères de l'écriture naturaliste

Conclusion

À travers Gervaise, l'image qui est donnée de la femme et du peuple -

Présentation

Situation du passage

Le passage est extrait du chapitre VI ; Gervaise, après avoir été abandonnée par Lantier, a trouvé du travail au lavoir, puis comme blanchisseuse. Son courage a forcé l'admiration de deux hommes, un ouvrier zingueur, Coupeau, et un forgeron Goujet. Tous deux s'éprennent

d'elle. Elle épouse le premier. À force de travail et d'économie, ils s'apprêtent à acheter uneblanchisserie ; Gervaise va ainsi réaliser son rêve de devenir patronne, et par là bourgeoise.

Goujet et sa mère sont disposés à lui prêter la somme qui lui manque pour cette installation. Au dernier moment, Coupeau est victime d'un accident ; dès lors il va se mettre à boire, et sa déchéance est certaine. 

« prête l'argent nécessaire, et qui, pour l'aider fait embaucher son fils Étienne dans la forge où il travaille ; Gervaise prend ce prétexte pour venir à la forge, où elle sait qu'elle verra Goujet dont l'amour non déclaré et plein de pudeur la trouble. L'enjeu Cette scène met en présence deux hommes qui se disputent, sans que rien ne soit avoué, une femme qui les observe.

Une comparaison donne la tonalité du passage "ils étaient comme deux grands coqs rouges qui font les gaillards devant une petite poule blanche" (4).Cette comparaison animalise les trois personnages, et réduit l'amour à la sexualité ; dans la nature, la finalité de l'amour est la procréation, et la pérennité de l'espèce, de la vie. L'érotisme connoté Dans ce passage, bien qu'il soit, dans la pensée du personnage, question du coeur ("Le coeur a tout de même, parfois, des façons drôles de se déclarer" ,[5 - 6]) tout un champ lexical , par connotation et sous-entendu, renvoie à l'acte sexuel , l'accent étant mis à la fois sur la femme dont le désir est montré réel mais mal défini, qui est dite en attente d'un plaisir peu à peu satisfait, et à la fois sur l'homme qui est peint dans l'accomplissement de l'acte, jusqu'à son achèvement : "cette forge en branle - emplie dun pétillement d'étincelles vives - ils lui forgeaient là un amour - cela lui faisait plaisir - les coups de marteau ...

répondaient ...

qui accompagnaient les gros battements de son sang - ça lui enfonçait quelque chose là, quelque chose de solide, un peu du fer - le long des trottoirs humides, un désir vague , un besoin de manger un bon morceau - elle se trouvait satisfaite , comme si les coups de marteau...

l'avaient nourrie - C'était à lui qu'elle appartiendrait - elle attendait, très rouge , heureuse de la grosse chaleur , prenant une jouissanc e à être secouée des pieds à la tête par les dernières volées de Fifine". L'Assommoir - Gueule d'or 2 On voit, par la remarque qui évoque le "besoin de manger un bon morceau", que pour Gervaise le désir et le plaisir passent par le ventre seulement. L'énonciation - la variété des procédés pour traduire les points de vue, l'écriture naturaliste - Une des caractéristiques de l'écriture de Zola est de faire entendre, le plus possible et de la façon la plus variée qui soit, la voix de ses personnages.

L'énonciation adopte donc, tour à tour les points de vue du narrateur ou des personnages, à travers les procédés suivants : 1) le narrateur omniscient a la parole ; c'est le système du récit, utilisé normalement ; 2) le narrateur a la parole, mais il introduit dans le récit des mots qui n'appartiennent pas à son registre de langue, mais à celui du personnage ; 3) le narrateur rapporte au discours indirect introduit les propos du personnage ; 4) le narrateur se masque pour faire entendre le personnage, tout en conservant le système. »

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