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Le but de l'art est-il de nous divertir ?

Publié le 23/03/2011

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 Avant de s'empresser de répondre par l'affirmative ou par la négative à cette question, il convient de l'analyser. Nous ne répéterons jamais assez qu'il ne faut pas se précipiter sur le sujet. La question posée porte sur le but de l'art, sur sa finalité. C'est un point important qu'il s'agit de souligner. Mais avant même de s'interroger sur le but de l'art, il importe de savoir ce que l'on entend au juste par « art «. Nous conseillons aux élèves de ne pas négliger cette interrogation sous peine de tomber dans une suite de banalités. Reste bien sûr le verbe « divertir «. Nous ne pensons pas qu'un rapide examen qui ferait de divertir le simple synonyme d'amuser soit suffisant. Là encore il serait bon de procéder à une analyse minutieuse de la notion de divertissement. Il pourrait être fort utile de se référer à Pascal. Nous suggérons même aux élèves de commencer par cette analyse tout de suite après l'introduction. Ce n'est pas là contourner la question, c'est au contraire contribuer à la mieux poser.

« La chose semble se caractériser par sa présence spontanée.

Elle a en quelque sorte une plénitude naturelle.

Mais ilapparaît que la plénitude de l'œuvre d'art n'est justement pas naturelle.

Il convient de faire intervenir un troisièmeterme, intermédiaire entre la chose et l'œuvre d'art : le produit.

Celui-ci se définit par le couple forme-matière.

C'estune matière ouvragée.

« Le produit, par exemple le produit « chaussures », repose en lui-même comme la chosepure et simple ; mais il n'a pas la spontanéité du bloc de granit.

Par ailleurs, le produit révèle aussi une parenté avecl'œuvre d'art, dans la mesure où il est fabriqué de main d'homme.

Mais, à son tour, l'œuvre d'art, par cette présencese suffisant à elle-même qui est le propre de l'œuvre, ressemble plutôt à la simple chose reposant pleinement encette espèce de gratuité que la' spontanéité de son être lui confère.

Cependant nous ne classons pas les œuvresparmi les simples choses » (Heidegger, Chemins..., p.

21). L'œuvre d'art est ainsi la mise en œuvre de la vérité et l'art nous fait voir ce qu'il y a à voir.

Nous pressentons déjàque dans ces conditions le but de l'art n'est sans doute pas de nous divertir soit au sens faible du terme soit ausens fort.

Mais abordons maintenant notre troisième et dernière étape en examinant ce point de plus près.

Nouspouvons, en nous aidant de certaines remarques de l'Esthétique de Hegel, essayer de cerner le but final de l'art, etpar là la finalité des œuvres d'art.

Hegel refuse plusieurs interprétations.

Par exemple, l'art ne doit pas se borner àimiter la nature.

Il n'a pas non plus à « éveiller l'âme », ni à adoucir les mœurs.

L'art ne doit pas viser à l'édificationmorale.

L'idéal moral n'a vraiment selon Hegel rien à gagner à se laisser représenter dans une œuvre d'art, qu'ils'agisse d'une tragédie ou d'un tableau.

« Si l'on veut assigner à l'art un but final, ce ne peut être que celui derévéler la vérité » (Hegel, Esthétique, tome I, p.

111).

Ce que Hegel nous permet de saisir, c'est qu'il ne faut pasfaire de la question du but final de l'art une question d'utilité en croyant que « le but existerait en soi et que l'artremplirait à son égard l'office d'un moyen » (id„ ibid., p.

111).

« Le détour qu'on prend pour assigner à l'œuvre d'art,comme but final, un essentiel qui se trouve en dehors de lui, est donc tout à fait superflu » (id., ibid., p.

112).

Cespropos de Hegel, nous laissent clairement entendre que le but de l'art ne lui est pas extérieur. Le but de l'art n'est pas de nous divertir, le but de l'art en tant qu'art, est de révéler la vérité.

« L'éclat de la miseen œuvre de la vérité, en renversant tout simplement le saisissable et ce qu'on tenait pour tel, ouvre par làl'insaisissable » (Heidegger, Chemins..., p.

59).

Devant l'œuvre d'art, nous nous trouvons « devant le Rien qui est lavérité » (Mallarmé, Propos sur la Poésie, p.

59).

C'est rien et pourtant ce rien nous est vital.

Un art divertissant,quel que soit le sens donné au verbe divertir, n'est pas un art même si certains voudraient faire du divertissementun art de vivre.

Renvoyant dos-à-dos la lourdeur et la frivolité, refusant de faire de leur art un alibi ou un tremplin,les artistes qui font l'épreuve de l'essentiel avancent sur le chemin de la rigueur et de la nuance.

Ils savent que leurmétier, pour reprendre l'expression du poète, est un « métier de pointe » (René Char).. »

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