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Le Caravage

Publié le 26/02/2010

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Michelangelo Merisi naquit en Lombardie dans la ville de Caravaggio qui lui donna son nom. Orphelin à onze ans, il entra en apprentissage chez un peintre de Milan, Peterzano. Attiré par la ville de Rome, il partit s'y installer vers 1588. Ses premières années romaines furent difficiles ; il travaillait à des oeuvres grossières pour des peintres achalandés. Au bout de cinq années ingrates, il parvint à vendre ses premières oeuvres personnelles par le biais d'un marchand d'art qui attira sur lui l'attention d'un mécène influent de la cour pontificale, le cardinal Francesco del Monte. Grâce à la protection du cardinal qui lui assurait une pension, un toit et des relations, Le Caravage reçut sa première commande importante en 1497 : la décoration de la chapelle Contarelli dans l'église Saint-Louis-des-Français à Rome. Il composa trois grands tableaux inspirés de la vie de saint Matthieu, qui affirmaient un réalisme éclatant et violent au travers de l'utilisation magistrale de la fonction dramatique de la lumière. Ces réalisations marquèrent un tournant dans sa carrière et il fut bientôt couvert de commandes religieuses et privées. De cette époque glorieuse datent les chefs-d'oeuvre de La Crucifixion de saint Pierre et de la Mort de la Vierge (tableau dont le réalisme cru fut condamné par les carmélites). Mais le caractère violent et l'esprit anarchique du peintre lui valurent de nombreux démêlés avec la police. Il dut finalement s'enfuir de Rome en 1606, accusé de meurtre à la suite d'un duel. Après un court séjour à Naples, il arriva à Malte en 1608. Il peignit dans la cathédrale la Décollation de saint Jean-Baptiste qui lui valut d'être admis au rang de chevalier de l'Ordre de Malte, titre honorifique qui lui sera enlevé lors de son arrestation. Caravage s'évada, menant durant deux ans la vie tourmentée d'un fugitif. Rattrapé dans sa fuite par la malaria, il mourut en 1610 sur une plage de Porto Ercole.

« quatre tableaux ; car la première version de Saint Mathieu et l'Ange, qui appartient au Musée de Berlin, lui futrefusée et il dut la refaire ; premier témoignage des résistances que rencontraient ces innovations. Celles-ci sont manifestes ; c'est certainement un approfondissement dans la science de la composition ; sûre avecle Saint Mathieu de Berlin, savante et rigoureusement équilibrée dans le Martyre, elle tombe dans l'inutile virtuositéavec le Saint Mathieu en place pour toucher à la réussite totale avec la Vocation où la ligne mystérieuse et sensiblequi part de la main du Christ pour aller frapper la poitrine de l'apôtre donne tout son sens et son mouvement à cettescène en apparence immobile.

C'est ensuite le naturalisme que nous connaissons déjà : le bourreau du Martyre etsurtout le Saint Mathieu de Berlin avec son front ridé, ses grosses jambes fatiguées, son aspect de paysan lourd etborné, dépassé par ce qui l'entoure, en sont des preuves ; mais c'est encore et surtout dans la Vocation que cetrait apparaît : toute la moitié gauche du tableau, avec ses changeurs et ses ruffians aux costumes éclatants,rappelle les premières oeuvres, mais évoque aussi et à la fois les Peseurs d'or de Metsys et les conversationsgalantes de Dirck Hals et des petits maîtres nordiques. Mais c'est surtout l'effet de lumière qui est frappant : très sensible dans le tableau de Berlin, il est l'essentiel dansles deux grandes scènes.

Nous ne pouvons plus savoir si, en les peignant, Caravage s'est plié aux conditionsd'éclairage propres à la chapelle où il travaillait mais, ce que nous savons, c'est que cette grande ombre, cetteobscurité de cave où baignent le péager et ses compagnons, ce jour avare qui fait saillir les maigres pommettes duvisage du Christ et qui illumine sa main impérieuse, donnent à la toile de la sonorité, une lourde puissance, uneéloquence intérieure irrésistibles, une poésie enfin de mystère et de conjuration.

A côté de cette réussite, lesgrandes taches de nuit du Martyre, ces traînées fuligineuses et pesantes qui subitement, sans transition, serésolvent en plages éclatantes, nous offrent quelque chose de systématique qui nous gêne un peu, une terribilità unpeu voulue, et la mimique forcenée de certains personnages, comme le petit garçon qui s'enfuit en hurlant deterreur, n'est pas pour atténuer cette impression. A ces formules, Caravage, pendant presque tout le reste de sa carrière, reste fidèle.

Et pourtant, tous nel'acceptent pas ; on lui a déjà contesté un Saint Mathieu ; la Madone des palefreniers et surtout la Mort de laVierge, du Louvre, seront ou refusées ou âprement discutées.

Malgré les résistances, Caravage va se consacrer àpeu près exclusivement à la peinture religieuse et y développer le système qu'il a inauguré à la chapelle Contarelli. Dans l'art religieux, le grand art par excellence, l'art noblé, empreint de majesté, sinon de pompe, Caravagetransporte purement et simplement ses habitudes de peintre de scènes réalistes. Remarquons d'abord qu'il n'a jamais peint à fresque.

Cette manière est étrangère à la peinture de genre, et lepeintre, qui devait connaître ses limites, ne l'adoptera pas.

On peut d'ailleurs se demander si le caractère voulu,concerté, concentré de son art se serait accommodé du faire large et rapide que réclame la peinture murale. Il commence par renoncer délibérément à une certaine rhétorique traditionnelle : point de costumes héroïques,aucun effort de reconstitution historique et surtout aucune tendance à l'idéalisation des personnages.

Lorsqu'ilreçoit mission d'illustrer le texte d'une bulle de Pie V où il est dit que la Vierge a écrasé le serpent avec l'aide de sonFils, il représente une jeune paysanne qui met le pied sur la tête d'une couleuvre ; son Fils fait peser son pied sur lesien et une vieille femme considère la scène ; sans les auréoles, on ne saurait point que l'on se trouve devant laVierge, sainte Anne et le Christ.

Un de ses rares tableaux profanes, une de ses plus belles oeuvres d'ailleurs,représente l'Amour vainqueur.

Celui-ci est entouré d'une foule d'accessoires, qui sont autant d'admirables naturesmortes, mais il est impossible de deviner le symbolisme qui devait leur être attribué, tant Caravage resteprosaïquement docile au programme qui lui a été donné : encore une fois, manque d'imagination. Quant aux détails naturalistes, ils sont innombrables : les pieds souillés de poussière du pèlerin de la Vierge deLorette, les veines gonflées sur les jambes d'un des bourreaux de la Crucifixion de saint Pierre, la table chargéed'aliments du Christ à Emmaüs, de la National Gallery, bien d'autres encore.

Le corps ballonné, hydropique de laVierge dans le tableau du Louvre en est l'exemple le plus mémorable et l'on comprend que le tableau ait été refusé.Cette brutalité, ce caractère sans pitié, presque espagnol, ne pouvaient pas ne pas choquer l'esprit romain.

Maisc'est cette violence même qui devait sauver Caravage.

Il est un autre peintre qui a peint quelques scènesreligieuses avec le même scrupule réaliste, la même vulgarité dans l'observation : c'est Jan Steen.

Et pourtant, il neviendrait à l'esprit de personne de le comparer à Caravage.

C'est que celui-ci introduit dans ses scènes un climat deparoxysme, de pathétique farouche et bouleversant qui sont de toute grandeur. Depuis que Caravage a découvert les ressources d'un éclairage arbitraire et violent, il va sans cesse élargissant laportée de sa découverte.

Cette lumière qui tombe brutalement sur les visages en accuse puissamment les traits, faitsaillir les rides et les muscles, enfonce les yeux dans l'ombre et le mystère, souligne le délabrement du corps usé desaint Pierre ou le faciès émacié du saint Dominique de la Vierge au rosaire.

Il n'y a plus de visage souriant chezCaravage car, avec ce système, le sourire deviendrait grimace ; plus guère de jeunes gens : des visages tendus,tourmentés, dévorés par une flamme intérieure qui danse en leurs prunelles hagardes ou jaillit de leurs bouchesnoires. D'autre part, cette lumière, qui plaque ses grands pans brutaux, sculpte les formes et trace des arêtes précises.

Lesvolumes se simplifient pour permettre à l'effet de s'exprimer : une main, un bras, un torse se comportent comme unsolide simple, sans vaine modulation de modelé.

Ils acquièrent quelque chose de solide et de massif, de sculptural.Ces corps, ce sont des statues robustes sous l'éclairage parcimonieux d'une lampe : ainsi la Flagellation, ruinée, de,. »

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