Devoir de Philosophie

Le désir du vrai n’est-il que l’expression d’un sentiment religieux ?

Publié le 01/06/2012

Extrait du document



 
 
           Il est un paradoxe : comment le désir du vrai pourrait-il apparaître immédiatement comme expression d’un sentiment religieux ? Pour nous, de prime abord, le désir de la vérité n’a pas d’autre nom que la philosophie, qui selon son étymologie, est, dit le grec philein, désirer, sophos, Sophia, la sagesse. La philosophie serait d’emblée le désir de la vérité tant théorétique que pratique. Et pourtant il est dit dans le texte sacré : « Je suis la Voie, la Vérité, la Vie « (Jean, 14, 16).
           En effet, si vérité il y a, celle-ci doit être inconditionnée, absolue et indivisible. Cette parole de l’Évangile marque excellemment ce qu’est Dieu pour la conscience religieuse. Dès lors tout désir n’est-il pas désir de Dieu, désir d’Éternité ? Le sentiment religieux repose sur la foi comme vérité révélée, comme sens du sacré par opposition au profane, par contraste à la vérité scientifico-philosophique ; mais surtout par élévation vers le divin. Faut-il rappeler que le vrai scientifique, philosophique s’oppose parfois frontalement à la vérité théologique ? Le désir peut-il être perçu comme désir de possession, de consommation du vrai ? Le désir du vrai, de la vérité n’est-il pas désir de Dieu, de la vérité absolue ? 

« dire rechercher la vérité en vue d’une vie sage et raisonnable.

Philosopher permet, en effet, qu’acquérir la connaissance de vrais biens, de ceux qui apportent une satisfaction juste à l’individu comme à la Cité.

Le savoir rationnel permet d’orienter l’action en vue du bonheur sans se laisser aller par des mirages.

Le désir du vrai apparaît alors comme l’ ex-pression du désir de bonheur .

Mais Socrate va plus loin, plus hautement, plus profondément.

Le désir de la vérité n’est pas en dernière analyse une simple expression du désir de bonheur, du désir d’Éternité.

Il faut retourner cette proposition : le désir du vrai est le désir fondamental de l’existence humaine dont le bonheur n’est que la satisfaction.

Le savoir authentique, la pleine possession du vrai, donne le bonheur suprême dans la mesure où il comble le désir qui définit notre être essentiel, c’est- à-dire l’âme : le désir de toute connaissance.

C’est pourquoi la mort ne peut inquiéter Socrate : elle est « un raccourci qui nous mène au but, puisque tant que nous aurons le corps assoc ié à l’âme dans notre recherché, nous attiendrions jamais complètement ce que nous désirons, et nous disions que l’objet de nos désirs, c’est la vérité ».

( Phédon, 66b).

Tout amour , tout désir, est amour , désir du vrai.

Ce désir de connaissance du vrai, P laton nous montre que c’est lui qui se révèle derrière ce qui a première vue nous paraît en être fort éloigné : l’amour.

Dans Le Banquet, Socrate observe, en effet, que l’ amour -désir qui ne serait dirigé que vers la beauté des corps serait vite source de souffrance et de déception ; en revanche, l’amour peut conduire à la félicité si, par une « dialectique ascendante », nous parvenons à passer de l’amour des beaux corps à celui des belles âm es et enfin à la contemplation du B eau lui-même .

C’est-à -dire à ce savoir absolu du fondement de toutes les beautés particulières .

Le Beau en soi qui est l’éclat du Bien et du Vrai en soi.

Le mouvement ascensionnel , ascendant de l’amour épouse donc exactement celui d u désir du vrai.

Aussi, chez Platon, le désir du vrai est in fine sentiment du rel igieux dans la stricte mesure où l’ascension dialectique progressive nous permet de s’élever de la beauté des choses matérielles à la beauté absolue, qui n’est que « l’illumination de vrai » (Ion ).

Mais l’analyse socratique qui voit dans le désir du vrai le désir fondamental de l’homme, n’est- t-elle pas victime d’une illusion, ne repose- t-elle pas sur une méconnaissance de ce qui est réellement le désir existentiel de l’être humain ? Ne prend-il pas en effet ce que le désir croit être pour ce qu’il n’ est pas ? Tel est le renversement de Nietzsche.

Pour Nietzsche, le désir du vrai e st bien un désir de bonheur, mais il masque le refus d’une vérité que l’être humain n’a pas la force de renoncer : qu’il y a pas de vérité, puisque la vérité est « le flux éternelle toutes choses » dans lequel s’abîment toutes les vérités.

Le « vrai », le « savoir » ne son t que des illusions substituées à d’autres illusions, une surestimation des seules valeurs qui puissent rendre « heureux » ceux qui, à travers elles, évitent de rencontrer l’insupportable tragédie du Devenir, de la Vie Paradoxalement, donc, le désir du vrai masque le désir de ne pas connaître la vérité.

Le désir du v rai, l’entreprise philosophique toute entière c omme la recherche scientifique apparaissent alors comme autant de fuites devant la mortelle Vérité.

Ces deux modes de connaissance doivent être compris comme une quête de « vérités » illusoires, mais utiles puisqu’ils permettent de réconforter d es hommes malades : ce bonheur par le savoir –illusoire engourdit comme un narcotique.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles