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Le monde a-t-il besoin de moi ?

Publié le 02/11/2005

Extrait du document

Sophocle, Antigone « Il est bien des merveilles en ce monde, il n'en est pas de plus grande que l'homme.  Il est l'être qui sait traverser la mer grise, à l'heure où soufflent le vent du Sud et ses orages, et qui va son chemin au milieu des abîmes  que lui ouvrent les flots soulevés. Il est l'être qui tourmente la déesse auguste entre toutes la Terre,  la Terre éternelle et infatigable, avec ses charrues qui vont chaque année la sillonnant sans répit, celui qui la fait labourer par les produits de ses cavales. Les oiseaux étourdis, il les enserre et il les prend,  tout comme le gibier des champs et les poissons peuplant les mers, dans les mailles de ses filets,  l'homme à l'esprit ingénieux. Par ses engins il se rend maître  de l'animal sauvage qui va, courant les monts, et, le moment venu, il mettra sous le joug et le cheval à l'épaisse crinière et l'infatigable taureau des montagnes. Parole, pensée vite comme le vent, aspirations d'où naissent les cités, tout cela, il se l'est enseigné à lui-même, aussi bien qu'il a su, en se faisant un gîte,  se dérober aux traits du gel ou de la pluie, cruels à ceux qui n'ont d'autre toit que le ciel.  Bien armé contre tout, il ne se voit désarmé contre rien de ce que lui peut offrir l'avenir. Contre la mort seule,  il n'aura jamais de charme permettant de lui échapper, bien qu'il ait déjà su contre les maladies les plus opiniâtres imaginer plus d'un remède.     Mais, ainsi maître d'un savoir dont les ingénieuses ressources dépassent toute espérance, il peut prendre ensuite la route du mal tout comme du bien.  Qu'il fasse donc dans ce savoir une part aux lois de sa ville et à la justice des dieux, à laquelle il a juré foi !  Il montera alors très haut dans sa cité, tandis qu'il s'exclut de cette cité le jour où il laisse le crime le contaminer par bravade.

Ce sujet porte sur notre place dans le monde et sur le sens de notre existence au sein de ce monde, et pose cette question sous l’angle particulier de la nécessité. Le « monde « est ici compris comme l’ensemble de ce qui nous entoure, de ce qui entoure tout être humain ; autrement dit, ce n’est pas le monde compris objectivement comme l’ensemble de la réalité matérielle, mais le monde tel que le perçoit chacun. Il inclut alors la réalité matérielle telle qu’elle est perçue par nous, mais aussi ce que nous comprenons du fonctionnement de cette réalité, les affects qu’elle nous inspire, etc. Avoir besoin de quelque chose, c’est reconnaître que cette chose nous est nécessaire, que nous ne pouvons pas nous en dispenser. « Moi « doit être compris ici dans un sens indéterminé – la question est alors : « le monde a-t-il besoin de telle existence humaine en particulier, quelle que soit cette existence ? «. La réponse peut sembler assez évidente : je ne suis nécessaire à rien dans le monde, le monde peut fonctionner sans moi. Pourtant la seconde question qui se pose est celle du sens de ce monde si je n’en fais pas partie. Deux pistes sont alors ouvertes : le première consiste à considérer que je suis l’être qui donne son sens au monde, en ce qu’il le perçoit et le conçoit – le monde tel que je le perçois et le conçois a donc besoin de moi pour exister. La seconde est un élargissement de la première : le monde n’existe objectivement que par la somme de toutes les consciences humaines. Alors, le monde a besoin de toutes les consciences humaines pour accéder réellement à l’existence ; sans elles, il existe matériellement mais il n’y a aucune instance pour le penser, pour en avoir une conscience globale, ou pour en produire un concept. Le monde a donc besoin de toutes les consciences humaines pour exister autrement que comme amas de matière – il a donc, entre autres, besoin de moi.

« aussi bien qu'il a su, en se faisant un gîte, se dérober aux traits du gel ou de la pluie, cruels à ceux qui n'ontd'autre toit que le ciel.

Bien armé contre tout, il ne se voit désarmé contre rien de ce que lui peut offrir l'avenir.

Contre la mort seule, iln'aura jamais de charme permettant de lui échapper, bien qu'il ait déjà su contre les maladies les plus opiniâtresimaginer plus d'un remède.

Mais, ainsi maître d'un savoir dont les ingénieuses ressources dépassent toute espérance, il peut prendre ensuite laroute du mal tout comme du bien.

Qu'il fasse donc dans ce savoir une part aux lois de sa ville et à la justice des dieux, à laquelle il a juré foi ! Ilmontera alors très haut dans sa cité, tandis qu'il s'exclut de cette cité le jour où il laisse le crime le contaminer parbravade.

Ah ! qu'il n'ait plus de part alors à mon foyer ni parmi mes amis, si c'est là comme il se comporte ! » Transition : Reste à déterminer si le monde a besoin de « moi » en un sens individuel, ou s'il n'a besoin de l'homme que comme ensemble indéterminé.

La phénoménologie va permettre de penser un rapport individuel nécessaire entrel'homme et le monde. III.

Le monde a besoin de ma conscience pour exister La phénoménologie ne conçoit pas le monde sans concevoir en même temps le rapport que l'homme entretient aveclui par la pensée, rapport par lequel l'homme crée le monde plutôt qu'il ne le reçoit.

Ce rapport ne peut se concevoirqu'entre la conscience d'un homme particulier et le monde.

Tout homme est alors nécessaire au monde en tant qu'ilest une conscience singulière.

Nous sommes invités à nous placer sur le point de vue de l'individu plutôt que del'espèce humaine en général : cela nous donne un moyen de concevoir un rapport de nécessité entre le monde etl'individu singulier que je suis. Dufrenne « Le monde sans l'homme n'est point encore le monde : non que le monde attende l'homme pour être réel, mais ill'attend pour recevoir son sens de monde.

» Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception « Nous n'avons pas d'autre manière de savoir ce que c'est qu'un tableau ou une chose que de les regarder et leursignification ne se révèle que si nous les regardons d'un certain point de vue, d'une certaine distance et dans uncertain sens, en un mot si nous mettons au service du spectacle notre connivence avec le monde.

Le sens d'uncours d'eau, ce mot ne veut rien dire si je ne suppose pas un sujet qui regarde d'un certain lieu vers un autre.

Dansle monde en soi, toutes les directions comme tous les mouvements sont relatifs, ce qui revient à dire qu'il n'y en apas.

Il n'y aurait pas de mouvement effectif et je n'aurais pas la notion du mouvement si, dans la perception, je nelaissais la terre, comme « sol » de tous les repos et de tous les mouvements en deçà du mouvement et du repos,parce que je l'habite, et de même il n'y aurait pas de direction sans un être qui habite le monde et qui, par sonregard, y trace la première direction-repère.Pareillement le sens d'une étoffe ne s'entend que pour un sujet qui peut aborder l'objet d'un côté ou de l'autre, etc'est par mon surgissement dans le monde que l'étoffe a un sens.

De même encore, le sens d'une phrase, c'est sonpropos ou son intention, ce qui suppose encore un point de départ et un point d'arrivée, une visée, un point de vue.De même, enfin, le sens de la vue c'est une certaine préparation à la logique et au monde des couleurs.

Sous toutesles acceptions du mot sens, nous retrouvons la même notion fondamentale d'un être orienté ou polarisé vers ce qu'iln'est pas (...).

Le monde est inséparable du sujet, mais d'un sujet qui n'est rien que projet du monde, et le sujet estinséparable du monde, mais d'un monde qu'il projette lui-même.

» Conclusion Le monde pris comme ensemble des phénomènes existant n'a certainement pas besoin de mon existence pourfonctionner.

Cependant, parce que je suis un homme, je peux penser le monde comme « monde » et pas seulementcomme accumulation de matières interagissant les unes par rapport aux autres, et parce que je suis un hommeunique je peux construire un rapport singulier au monde, par lequel j'existe pour le monde mais aussi par lequel lemonde existe pour moi.

Ce rapport de nécessité réciproque est un moyen d'affirmer que le monde a besoin de moi.. »

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