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Le prisonnier est-il libre ?

Publié le 07/03/2005

Extrait du document

  • Bien définir les termes du sujet :

- « Le prisonnier « : désigne une personne qui est détenue dans une prison pour différentes raisons. C’est donc quelqu’un qui est enfermé ou maintenu dans un endroit, une position où il perd toute liberté d’action, de mouvement. Le prisonnier se définit donc couramment comme « celui qui n’est pas libre. «

- « Etre libre « : le plus généralement, c'est pouvoir se mouvoir sans contraintes extérieures, juger et agir en pleine conscience. C'est le pouvoir de se déterminer rationnellement sans y être contraint par une force extérieure.

  • Construction de la problématique.   

            Au premier abord, le sujet semble poser une question évidente, dont la réponse se trouve dans la définition même des termes utilisés : le prisonnier se définit avant tout comme celui qui a perdu sa liberté. La question de savoir s’il peut ou non être libre paraît donc inadéquate. Mais justement, le simple fait de poser la question remet en cause cette évidence et l’examine. Il se pourrait qu’il n’y ait finalement pas contradiction entre les termes de « prisonnier « et de « libre «.

             Si le prisonnier est celui qui a perdu la liberté de ses mouvements, et si le sujet semble admettre qu’il soit tout de même libre, il faut voir s’il n’existe pas une autre sorte de liberté. Quelle liberté est donc compatible avec la contrainte physique ? Mais il est aussi possible de se demander si être prisonnier se réduit à être enfermé.

I/ La liberté dans un cachot ou attaché à une charrette :     

II/ Nous nous pensons libres alors que nous sommes prisonniers :

III/ Nous nous pensons libres alors que nous sommes prisonniers :         

 

« Le rationalisme cartésien nous montre déjà qu'une volonté infiniment libre,mais privée de raison, est une volonté perdue.

Plus nous connaissons, plusnotre liberté est grandie et fortifiée.

Si nous développons notre connaissanceau point de saisir dans toute sa clarté l'enchaînement rationnel des causes etdes effets, nous saisirons d'autant mieux la nécessité qui fait que telle chosearrive et telle autre n'arrive pas, que tel phénomène se produit, alors que telautre ne viendra jamais à l'existence.

Pour Spinoza, une chose est libre quandelle existe par la seule nécessité de sa propre nature, et une chose estcontrainte quand elle est déterminée par une autre à exister et à agir.

Ausens absolu, seul Dieu est infiniment libre, puisqu'il a une connaissanceabsolue de la réalité, et qu'il la fait être et exister suivant sa proprenécessité.

Pour Spinoza et à la différence de Descartes, la liberté n'est pasdans un libre décret, mais dans une libre nécessité, celle qui nous fait agir enfonction de notre propre nature.

L'homme n'est pas un empire de liberté dansun empire de nécessité.

Il fait partie du monde, il dispose d'un corps,d'appétits et de passions par lesquelles la puissance de la Nature s'exerce ets'exprime en nous, tant pour sa propre conservation que pour la nôtre.

Biensouvent nous croyons être libres, alors que nous ne faisons qu'être mus, parl'existence de causes extérieures :la faim, la pulsion sexuelle, des goûts ou des passions qui proviennent de notre éducation, de notre passé, de notre culture.

Nul homme n'étant coupé du milieu dans lequel il vit et se trouveplongé, nous sommes nécessairement déterminés à agir en fonction de causes extérieures à notre propre nature."Telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent d'avoir et qui consiste en cela seul que les hommessont conscients de leurs désirs, et ignorants des causes qui les déterminent." L'homme, qu'il soit prisonnier ou libre, c'est-à-dire avec ou sans entraves est quoi qu'il en soit prisonnierdans son ignorance.

Le premier pas vers la liberté consiste tout d'abord à se défaire de nos passions - véritablesforces extérieures qui nous font agir sans que nous le décidions vraiment – pour apprendre à examiner les chosessous le crible de la raison – qui nous permet de décider parmi les choses ce qui est ou non réellement bon pournous.

La véritable liberté consiste donc en l'autonomie d'un individu lorsque ses actions sont le résultat de causesinternes, c'est-à-dire le résultat de l'essence de l'individu – à savoir son désir passé par le crible de la raison.

Cesont des actions adéquates, elles relèvent d'une causalité interne, et ne sont pas dues à des passions.

La libertéest une action autonome et adéquate qui provient d'idées vraies, elle est le déploiement d'une action posée par ledésir autonome, et par la connaissance vraie.

Etre libre, c'est donc d'abord se libérer des passions en ayant une connaissance adéquates des objets (grâce à un travail de la raison) et de soi-même.

C'est agir non pas selon des causes externes, comme despassions, mais selon une causalité interne, selon ma propre essence.

Le prisonnier et l'homme libre sont donc tousdeux prisonniers en un sens différent.

III/ Nous nous pensons libres alors que nous sommes prisonniers : Mais il existe aussi des hommes qui se savent libres et qui pourtant se déclarent prisonniers, en général pour des raisons de confort.

Le prisonnier ne l'est donc qu'en apparence ; bien plus, c'est une liberté sans limite,angoissante et responsabilisante qui s'ouvre devant lui.

C'est ce que pense Sartre dans L'Etre et le Néant, lorsqu'il prend pour exemple ceux qu'il déclare être de« mauvaise foi ».

En effet, certains individus s'enferment dans un carcan social et décident que s'ils sont tel ou tel,voleur par exemple, c'est parce que leur mère était prostituée et leur père alcoolique.

Autrement dit, ils trouventune excuse à leur situation pour ne pas avoir à assumer leur échec.

C'est ce comportement que Sartre caractérisecomme étant de mauvaise foi.

Cette dernière consiste à fuir sons être libre en tentant de se voir comme coïncidantavec soi.

Ce mensonge fait vis-à-vis de soi-même vise à éviter l'angoisse en se donnant les qualités du pour-soi.Autrement dit, je suis comme ça parce qu'il est dans ma nature d'être comme ça et je ne peux rien y changer.

Ilexiste donc pour Sartre des prisonniers volontaires qui s'enferment dans des rôles pour ne pas avoir à affronter leurliberté.

Il n'en reste pas moins que ces prisonniers volontaires sont fondamentalement libres.

« En fait nous sommesune liberté qui choisit mais nous ne choisissons pas d'être libres : nous sommes condamnés à la liberté.

» Si nous pouvons nous déclarer prisonnier, c'est seulement de notre liberté.

Le prisonnier est donccomplètement libre, d'autant plus s'il est prisonnier d'un carcan social.

Nous nous définissons en effet – en tant queconscients - avant tout comme projet, et chacun de mes projets particuliers s'inscrit dans le cadre d'un projetultime – je suis en terminale S (projet particulier) parce que je veux être médecin (projet ultime).

Orienter monaction selon mon projet ultime, tel est l'acte fondamental de la liberté.

Si ce projet est libre, et il doit l'être, alorschacun des actes qui cherche à l'accomplir l'est aussi.

La liberté ne se situe donc que dans les actes, et la véritableliberté doit être capable de renverser la vapeur, de changer de projet ultime à tout moment.

« Ainsi, nous sommesperpétuellement engagés dans notre choix, et perpétuellement conscient de ce que nous-mêmes pouvonsbrusquement inverser ce choix et renverser la vapeur.

» L'Etre et le Néant, IV, 1. Si certains individus se déclarent, malgré cette liberté qu'ils possèdent, prisonniers, c'est donc parce qu'ils ont décidé de ne pas assumer l'angoisse et la responsabilité que les choix impliquent.

Ils n'ont donc pas à regretterleur situation puisqu'ils ont eux-mêmes librement choisis d'être prisonniers.

Quant à ceux qui sont réellementprisonniers, dont les mouvements sont entravés, cela est dû à une action qu'ils ont librement choisi et dont ils. »

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