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LE TEMPS PHYSIQUE ET LA DURÉE CONSCIENTE

Publié le 24/01/2015

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Revenons maintenant au temps. Ces deux relations : celle du couple présence-absence (besoin) et celle du couple appui-élan (mouvement), vont, en se conjuguant, expliquer la genèse psychologique du temps. En effet, qu'est-ce que le présent ? C'est d'abord la présence. Avant de nous apparaître figurativement comme un moment intercalé entre le passé et l'avenir sur une ligne idéale, le présent existe seul. Seul il est appréhendé directement : c'est le « privilège du présent ». Mais aussi, nous le savons, la conscience affectée par le besoin pose en dehors du présent une absence encore indéterminée. C'est précisément à partir du présent vécu que nous posons les deux formes de l'absence : le passé et l'avenir, auxquelles répondent les sentiments spécifiques comme le regret et l'espoir. Le présent est donc bien la cellule génératrice de la durée.Ces problèmes se retrouvent au niveau psychologique. Le temps qui s'écoule pour la conscience est-il continu ou discontinu ? Fluide ou articulé ? En décrivant la durée comme une mélodie où chaque note se fond dans la suivante, Bergson renouvelait profondément le problème du temps et celui de la liberté. A l'époque des Données immédiates de la conscience (1889) on en était encore à figurer les « états psychologiques " comme des éléments qui s'agrégeaient, se désagrégeaient, et dont on pouvait mesurer l'intensité, donc soumises à un déterminisme. Bergson, dans des analyses demeurées célèbres, démonte tout ce mécanisme. Il montre que sensations et sentiments n'ont pas proprement d'intensité, mais seulement une coloration affective variable ; ils ne sont ni isolables, ni mesurables, mais qualitatifs, donc imprévisibles. Il en résulte que la durée, propre à la conscience, diffère du temps physique comme l'hétérogène de l'homogène. Les phases de la conscience se nuancent à l'infini comme les nuances de la gorge de la colombe ; leurs aspects se « compénètrent )). La durée est comme une cc phrase musicale )) où chaque note retentit dans les suivantes. Sous le moi social superficiel où les états se morcèlent en concepts et en mots, il y a le moi profond où s'accumulent des poussées.
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« LB TBMPS PHYSIQUE BT LA DURÉB CONSCIBNTE 41 alors, comme le dit Aristote, « le nombre du mouvement selon l'antérieur-postérieur '" Cependant la possibilité de mesurer le temps se heurte à des difficultés théoriques considérables, pour ne rien dire des pratiques.

Elles tiennent pour une bonne part à la nature même de l'acte de mesurer.

Qu'est-ce que mesurer une longueur par exemple ? C'est essentiellement appliquer une longueur­ étalon choisie comme unité (pied, mètre) à la longueur considérée (table, coupon de tissu) en reportant cette unité sur la longueur à mesurer autant de fois qu'il le faut.

S'il y a un reste, ce qui est presque toujours le cas, on décompose l'unité en sous-unités (centimètres, milli­ mètres).

A partir des longueurs, on mesurera les surfaces et les volumes, en observant le rapport des nombres dans les quantités composées (10, 100, 1000).

Jusqu'ici, aucune difficulté théorique.

Mais il est clair que cette définition et cette technique ne conviennent rigoureu­ sement qu'à des grandeurs spati·ales : seul l'espace est mesurable directement parce qu'il est superposable à lui­ mhne.

Quant au temps, sa nature successive s'oppose à ce traitement.

Comme l'observe Leibniz, on ne peut superposer des durées, jours, heures, minutes.

On s'en tire par des artifices, notamment en traduisant le temps en espace.

Ainsi que le montre Bergson (r), quand on croit mesurer du temps, c'est toujours de l'espace qu'on mesure : l'écoulement d'une certaine quantité d'eau (clepsydre), le déplacement de l'ombre d'un bâton (gno­ mon), le déroulement d'une corde (horloge à poids) ou la détente retardée d'un ressort spiral avec échappement.

Quand nous lisons l'heure, ce ne sont que des positions des aiguilles sur le cadran que nous observons, jamais le (1) Essai rur les données immédiates de la conscience, chap.

II.. »

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