Devoir de Philosophie

Les différences sont-elles des inégalités ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

Elle a trait à notre conduite envers les autres hommes. On ne saurait être « juste » ou « injuste » envers soi-même (Éthique à Nicomaque, V, 15, 1138 a 26). Comme l'a vu Platon, c'est la vertu toute entière. Mais en un sens plus spécial, c'est elle qui préside aux partages (justice « distributive ») ; c'est elle aussi qui redresse (justice « réparatrice ») ce qui a été faussé lorsqu'un tort a été causé ; enfin elle intervient pour régler les échanges et les transactions commerciales.La justice distributive préside à la répartition des charges, des biens et des honneurs dans la cité. Elle ne procède pas selon l'égalité arithmétique, car elle tient compte des inégalités effectives de mérite. Le juste, alors, est proportionnel aux services rendus et aux qualités manifestées par les membres de la communauté politique, à leur degré de participation à la réalisation du bien commun (Éthique à Nicomaque, V, 5, 1130 b 30).En revanche la justice réparatrice ou corrective repose sur la stricte égalité. On ne demandera pas si l'homme qui a subi un préjudice est un misérable et s'il a été lésé par un homme de bien. Ici, la justice doit procéder au rétablissement d'une égalité que le délit (vol, coup, meurtre) a rompue ; le jugement ne fait pas acception des personnes.

« Dire que les différences ne doivent pas être des inégalités, c'est revendiquer l'égalité entre les hommes.

Mais cettedernière n'implique-t-elle pas du même coup le nivellement ou la négation des différences? « Un homme, un vote » ladevise américaine définit bien cet aspect élémentaire de la justice.

Le fait d'être plus riche ne donne pas plus depoids dans la décision publique.

On ne peut parler de droits universels qu'en faisant abstraction des différencesindividuelles.

Au niveau individuel, je ne peux reconnaître et promouvoir la différence de l'autre qu'en mettant(provisoirement) la mienne entre parenthèses. Les limites de l'égalitarisme. Jusqu'où faut-il aller dans ce processus ? Bien des régimes politiques, notamment ceux qui s'inspiraient du marxisme-léninisme, ont voulu imposer d'un seul coup l'égalité parfaite, en abolissant tous les signes extérieurs de différence ;mais le résultat d'une telle « révolution culturelle » n'est plus l'égalité mais l'uniformité.

L'égalitarisme risque donc denuire à la liberté sans renforcer la fraternité. Les difficultés de la justice proportionnelle. Comment peut-on alors établir l'égalité sans abolir les différences ? Il faudrait passer de la justice « arithmétique »(à chacun la même chose, de façon égale) à la justice « géométrique » ou proportionnelle (à chacun selon sonmérite et selon ce qu'il est, selon sa différence propre).

La première établit l'égalité, la seconde vise l'équité.

Laseconde est plus satisfaisante pour l'esprit, mais aussi bien plus difficile à mettre en oeuvre sans aboutir à de gravesinjustices: Platon disait que seuls les dieux sont capables d'une évaluation assez fine pour pratiquer une tellejustice. "De la justice particulière et du juste qui y correspond, unepremière espèce est celle qui intervient dans la distribution deshonneurs, ou des richesses, ou des autres avantages qui serépartissent entre les membres de la communauté politique (cardans ces avantages il est possible que l'un des membres ait unepart ou inégale ou égale à celle d'un autre), et une secondeespèce est celle qui réalise la rectitude dans les transactionsprivées (...).

Cette forme du juste a un caractère spécifiquedifférent de la précédente.

En effet, le juste distributif des bienspossédés en commun s'exerce toujours selon la proportion dontnous avons parlé' (puisque si la distribution s'effectue à partir desrichesses communes, elle se fera suivant la même proportion quia présidé aux apports respectifs des membres de la communauté ;et l'injuste opposé à cette forme du juste est ce qui est dehors dela dite proportion).

Au contraire, le juste dans les transactionsprivées, tout en étant une sorte d'égal, et l'injuste une sorted'inégal, n'est cependant pas l'égal selon la proportion de tout àl'heure, mais selon la proportion arithmétique.

Peu importe, eneffet, que ce soit un homme de bien qui ait dépouillé unmalhonnête homme, ou un malhonnête homme un homme debien, ou encore qu'un adultère ait été commis par un homme de bien ou par un malhonnête homme : la loi n'a égard qu'au caractère distinctif du tort causé, et traiteles parties à égalité, se demandant seulement si l'une a commis, et l'autre subi, une injustice, ou sil'une a été l'auteur et l'autre la victime d'un dommage.

Par conséquent, cet injuste dont nous parlons,qui consiste dans une inégalité, le juge s'efforce de l'égaliser : en effet, quand l'un a reçu une blessureet que l'autre est l'auteur de la blessure, ou quand l'un a commis un meurtre et que l'autre a été tué,la passion et l'action ont été divisées en parties inégales ; mais le juge s'efforce, au moyen duchâtiment, d'établir l'égalité, en enlevant le gain obtenu.

" ARISTOTE. Dans ce célèbre passage, Aristote distingue deux formes de justice ou d'égalité : l'égalité géométrique, qui estune proportion, et l'égalité arithmétique.

La première renvoie à la justice, considérée comme ordre social, laseconde à la justice entre individus. POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE La justice, c'est l'égalité.

Soit, mais l'égalité elle-même peut se comprendre de deux manières.

L'égalitéarithmétique est l'égalité entre deux termes.

L'égalité géométrique est l'égalité entre deux rapports.

L'image dugâteau peut aider à comprendre cette distinction.

Deux parts de gâteau peuvent être égales, d'une égalitéarithmétique.

Mais on peut aussi considérer que l'égalité est réalisée si les parts distribuées sontproportionnelles au mérite (ou au poids...) de ceux entre lesquels il doit être partagé.

L'égalité ici sera ditegéométrique.Aristote considère que, dans le cas de la justice distributive, c'est-à-dire de l'égalité géométrique, il est normalde donner plus à ceux qui contribuent le plus, par leur mérite, par leurs fonctions ou par leurs biens, au bonfonctionnement de la société.

Mais cela peut être discuté.Dans le cas de la justice corrective, c'est-à-dire de la justice qui réalise l'égalité arithmétique, on ne tient pas. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles