Les guerres sont-elles un effet de la nature des hommes ?
Publié le 03/03/2004
Extrait du document
«
Kant verra même dans cette insociabilité belliqueuse le moteur del'Histoire.
« L'homme a un penchant à s'associer, car dans un tel état, il se sentplus qu'homme par le développement de ses dispositions naturelles.Mais il manifeste aussi une grande propension à se détacher (s'isoler),car il trouve en même temps en lui le caractère d'insociabilité qui lepousse à vouloir tout diriger dans son sens ; et de, ce fait, il s'attend àrencontrer des résistances de tous côtés, de même qu'il se sait par lui-même enclin à résister aux autres.
C'est cette résistance qui éveilletoutes les forces de l'homme, le porte à surmonter son inclination à laparesse, et, sous l'impulsion de l'ambition, de l'instinct de domination oude cupidité, à se frayer une place parmi ses compagnons qu'il supportede mauvais gré, mais dont il ne peut se passer.
L'homme a alorsparcouru les premiers pas, qui de la grossièreté le mènent à la culturedont le fondement véritable est la valeur sociale de l'homme [...] .
Sansces qualités d'insociabilité, peu sympathiques certes par elles-mêmes,source de la résistance que chacun doit nécessairement rencontrer àses prétentions égoïstes, tous les talents resteraient à jamais enfouisen germes, au milieu d'une existence de bergers d'Arcadie, dans uneconcorde, une satisfaction et un amour mutuel parfaits ; les hommes,doux comme des agneaux qu'ils font paître, ne donneraient à l'existence plus de valeur que n'en a leur troupeau domestique [...].
Remercions donc la nature pour cette humeur nonconciliante pour la vanité rivalisant dans l'envie, pour l'appétit insatiable de possession ou même dedomination.
Sans cela toutes les dispositions naturelles excellentes de l'humanité seraient étouffées dans unéternel sommeil.
» Kant.
La guerre est un fait humain irréductibleLa nature a doté l'homme d'une intelligence fabricatrice.
Au lieu de luifournir des instruments, comme elle l'a fait pour bon nombre d'espècesanimales, elle a préféré qu'il les construisît lui-même .
Or l'homme anécessairement la propriété de ses instruments, au moins pendant qu'ils'en sert.
Mais puisqu'ils sont détachés de lui, ils peuvent lui être pris ; lesprendre tout faits est plus facile que de les faire.
Surtout, ils doivent agirsur une matière, servir d'armes de chasse ou de pêche, par exemple ; legroupe dont il est le membre aura jeté son dévolu sur une forêt, un lac,une rivière ; et cette place, à son tour, un autre groupe pourra juger pluscommode de s'y installer que de chercher ailleurs.
Dès lors, il faudra sebattre.
[...] Mais peu importent la chose que l'on prend et le motif qu'onse donne : l'origine de la guerre est la propriété, individuelle ou collective,et comme l'humanité est prédestinée à la propriété par sa structure, laguerre est naturelle." BERGSON
Les instruments humains sont détachés de l'homme et peuvent lui êtrearrachés.
La guerre est, dès lors, naturelle: elle est liées aux besoinshumains.
Quelle est l'origine de la guerre ? La propriété.Peu de concepts complexes, comme c'est le cas dans presque tous lestextes de Bergson; ici, par exemple, la notion bergsonnienne d'"intelligencefabricatrice" est presque la seule à devoir être expliquée avec un soinparticulier (sans négliger, bien entendu, les autres termes, comme propriété).
On s'efforcera, dans l'analysedes étapes de la pensée de Bergson, de montrer clairement que ce sont les conditions naturelles s'imposant àl'homme qui conduisent à la guerre.
Guerre et passions (Hobbes)"Premièrement si nous considérons combien il y a peu de différence entre la force et la sagesse des hommesfaits et avec quelle facilité le moindre, soit qu'il le soit en esprit ou en force, ou en toutes ces deux choses,peut entièrement abattre et détruire les puissants, puisqu'il ne faut pas beaucoup de force pour ôter la vie àun homme: de là nous pouvons conclure que les hommes, considérés dans l'état de nature, doivent s'estimerégaux et quiconque ne demande point davantage que cette égalité doit passer pour un homme modéré [...]D'ailleurs, puisque nous voyons que les hommes sont portés par leurs passions naturelles à se choquer les unsles autres, chacun ayant bonne opinion de soi, et ne voulant pas voir ce qu'un autre a de bon, il s'ensuit detoute nécessité qu'ils doivent s'attaquer les uns les autres par des paroles injurieuses ou par quelque autresigne de mépris et de haine, laquelle est inséparable de toute comparaison, jusqu'à ce qu'à la fin ils enviennent aux mains pour terminer leur différend, et savoir qui sera le maître par les forces du corps.Davantage, considérant que les appétits et les désirs de plusieurs hommes les portent tous à vouloir et àsouhaiter une même fin, laquelle quelquefois ne peut être ni possédée en commun ni divisée, il s'ensuit que leplus fort en jouira tout seul, et qu'il faudra décider par le combat qui sera le plus fort.
Ainsi la plus grandepartie des hommes, sans aucune assurance d'avoir le dessus, néanmoins soit par vanité, soit par descomparaisons, soit par passion, attaque ceux qui sans cela seraient contents d'être dans l'égalité de nature.
»
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