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Les philosophies de l'art

Publié le 01/06/2009

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Le titre de ce chapitre est sans doute trop ambitieux. Il aurait peut-être mieux valu dire « quelques idées sur l'Art au XXe siècle «. Tout d'abord, faut-il de la théorie, de la philosophie, en Art ? Oui, répond André Lhote, mais à condition qu'il ne s'agisse surtout pas d'une théorie a priori décrétant ce qui est beau, ou ce que doit être l'Art. Ce serait absurde : toute théorie est une formule, ou un ensemble de formules que l'artiste découvre pour son propre compte au bout de ses interrogations, et que nul ne peut lui apprendre. « La formule, trouver la formule « gémissait Cézanne, qui avait besoin de mots exprimant l'état de son oeuvre pour en poursuivre la progression. Nous n'essaierons donc pas de dire ce que doit être l'Art, mais de proposer quelques idées ou explications globales formulées à son propos. On passera sous silence certaines théories importantes comme celle de Charles Morgan qui voit dans l'Art une libération de l'homme par Dieu. Dieu nous émancipe en assurant par l'art une liaison entre l'éternel et le contingent. « Tout art parfait est une image de Dieu, sculptée par lui-même durant le sommeil de l'auteur «. On abordera seulement deux auteurs significatifs : — une théorie générale de l'Art avec René Huyghe, — une philosophie spirituelle de l'Art avec André Malraux.

« de celle de son groupe, croit projeter sa propre « thèse » dans son tableau; mais dès qu'elle s'est séparée de lui etqu'elle s'est fixée dans une apparence immobile, il la ressent comme une « antithèse ».

Il lui faut alors trouver unaccord, une « synthèse », entre ce qu'il est, ce qu'il croit être, et la révélation imprévue apportée par l'oeuvre, dece qu'il y a mis sans le savoir, de ce qu'il ignorait de lui-même et avec quoi soudain il se confronte."Dans l'indécision de sa destinée, l'artiste peut se donner par la ligne qui se dégage de son oeuvre, un véritabletuteur : elle lui rend manifeste une trajectoire qui n'était en lui-même que confuse possibilité, qu'une instanceindéterminée.L'art revêt une importance capitale à la fois pour l'individu et pour la collectivité des hommes, parce qu'il répond àune fonction profonde de la vie mentale.

« Il n'est pas de société qui ait pu se passer de lui.

»Malheureusement l'évolution de notre civilisation orientée par les préoccupations matérielles a condamné l'art àparaître l'apanage d'une élite peu nombreuse.

Une compensation brutale a été nécessaire, d'abord trouvée dans lecinéma dont le public n'est en fait pas spectateur mais acteur.

Le cinéma est pour la masse avant tout unpartenaire engageant le dialogue, qui vit ses désirs et ses convoitises, qui exorcise ses angoisses."Et maintenant, c'est la télévision qui tend à suppléer dans nos intérieurs modernes, à l'absence de ces autels, deces chapelles ou de ces icônes où les hommes de jadis, ceux de l'antiquité comme ceux d'hier, se livraient à uneconfrontation avec les images peintes ou sculptées, incarnant leur âme la plus profonde."Ce nouveau dialogue est malheureusement bien peu spirituel.

Alors le public se tourne vers l'art pour satisfaire soninstinct.

L'homme ne peut pas se passer de la « respiration psychique » qu'apporte l'art.

Et les contemporainssouffrent d'asphyxie.

Citons encore Huyghe pour conclure :"Depuis que les hommes existent, depuis la magie des cavernes, c'est l'art qui avait eu la tâche d'assurer cette librecirculation des images et de leur sens profond.

Dans la mesure où il a perdu son exercice spontané et où il s'estassigné à lui-même des définitions dogmatiques et trop partielles, il a failli à cette mission; c'est là un des malaisesdont il souffre et dont nous souffrons.

Le surréalisme l'a entrevu, mais lui aussi s'est dérivé dans des formulesarbitraires en se refusant à la spontanéité qui seule l'aurait justifié.

Seuls certains expressionnistes, un Rouault, parexemple, et ceux que le regretté Louis Chéronnet appelait les oniriques, tel un Chagall, ont su préserver quelquechose de ce rôle essentiel.

jamais le regard des hommes n'a été aussi avide qu'aujourd'hui; jamais il n'a quêté aussidésespérément; car l'art s'est retiré de lui."L'école moderne, qui en effet refuse la notion même d'image, explique autrement le rôle de l'art.

On discerne bienavec Huyghe à quel point, pour lui, l'art doit être un moyen de ramener le cosmos à la mesure de l'homme.

C'esttout le contraire qu'affirme Georges Mathieu, par exemple, à l'heure actuelle en posant comme principe que l'art doitélargir l'homme aux dimensions du cosmos.

Avec Malraux, l'interprétation générale de l'art prend une dimensionnouvelle et inattendue, elle est une réponse à quelques-unes des questions de ce temps. 2) Une philosophie de l'art : Malraux Scali, dans L'Espoir, est critique d'art.

Mais il laisse sans réponse ce pathétique appel : « mais enfin vous, vousl'interprète de Masaccio, de Piero della Francesca, comment pouvez-vous supporter de vivre? On devine déjà ce queMalraux attend de l'art après avoir éprouvé au fond l'angoisse existentielle et les déceptions de l'activismerévolutionnaire.

Pour l'instant, Scali n'a rien à répondre. De même Gisors, dans La Condition Humaine : pour lui, l'art est une drogue comme l'opium ou la musique : un moyen— mais au fond, pas honnête — d'échapper à la vie.

L'art ne console pas : il divertit, et Gisors le sait.Le point de départ de la réflexion de Malraux sur l'art est son extraordinaire rencontre avec l'art Khmer.

Cesbouddhas d'une si pure mysticité lui révélaient subitement, à travers les siècles, au coeur d'une jungle oubliée, la «structure mentale » d'un peuple disparu.

Réveillées, ces divinités étaient l'âme même, rendue à la vie, de ceslointaines civilisations.

Tout n'était donc pas perdu de l'homme d'autrefois.L'art, mystérieusement, leur assurait une sorte de pérennité.

L'art établirait, hors des prises du temps, une sorte «d'univers » spécifiquement humain, fait par l'esprit, pour l'esprit, où l'homme se sentirait chez lui, garanti contrel'inhumain.

Il serait justifié dans son existence : voilà une grande espérance.Pour Malraux, l'art nous donne accès à l'universel, et en cela il succède aux dieux.

Autrefois, en supposant les dieux,les hommes tentaient de donner une âme au monde, une conscience au chaos : ils humanisaient l'univers en ledivinisant, ils y introduisaient l'esprit.

Le mythe, en expliquant l'univers, le rendait intelligible.

Mais tout passe, mêmeles dieux, et ceux-ci se métamorphosent.Une métamorphose des dieux a transféré la fonction divine à l'oeuvre d'art elle-même.

Celle-ci, bravant le temps,toujours jeune, toujours prête à ressusciter dans l'admiration et l'amour porte en elle quelque chose d'universel quiressemble à l'absolu.

Sans ce pouvoir de résurrection de l'oeuvre d'art, le monde matérialiste et déshumaniséd'aujourd'hui se serait déjà enfoncé dans la barbarie.

Citons une page des Antimémoires : "Si cette civilisation,.

qui apporte aux instincts un assouvissement qu'ils n'ont jamais connu, est en même tempscelle des résurrections, sans doute n'est-ce pas par hasard.

Car les oeuvres ressuscitées, ce qu'on eût appelé jadisles images immortelles, semblent seules assez fortes pour s'opposer aux puissances du sexe et de la mort.

Si lesnations ne faisaient pas appel à ces oeuvres, et par l'émotion, non par la seule connaissance, qu'arriverait-il? Encinquante ans, notre civilisation qui se veut, qui se croit, la civilisation de la science — et qui l'est — deviendraitl'une des civilisations les plus soumises aux instincts et aux rêves élémentaires, que le monde ait connues.

C'est parlà, je crois, que le problème de la culture s'impose à nous." L'artiste a délivré les choses de leur caractère éphémère, absurde, inhumain, qui était la fonction des dieux.

Mais. »

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