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l'étranger est-il un autre que moi ?

Publié le 17/11/2005

Extrait du document

  -Toute civilisation, toute culture particulière est naturellement portée à juger une culture étrangère à la sienne comme barbare, en tant précisément qu'étrangère. Un village peut considérer les habitants d'un village étranger mais situé à proximité comme des non-hommes, en raison de leur caractère d'extériorité : l'inhumain constitue alors ce qui est extérieur à une communauté donnée. L'étranger, comme autre et comme rien d'autre que tel, est dépossédé de son humanité même : c'est là que prend son sens le terme de "barbarie" pour juger l'étranger. -Or, tout jugement de barbarie révèle une vision extrêmement ségrégative et exclusive, en ce qu'elle rejette comme nulle toute perspective étrangère à la sienne ; en ce sens, le vrai barbare, c'est celui qui accuse l'étranger de barbarie. La tolérance constitue la médiation par laquelle on peut faire le deuil de notre tendance naturelle à la barbarie. L'étranger n'est donc barbare que si l'on est soi-même assez barbare pour croire que l'étranger est un autre radical par rapport à soi : la barbarie, c'est faire le deuil en soi de la possibilité de s'identifier à ce qui n'est pas moi, de considérer l'étranger autrement que comme autre.     III. L'étranger n'est autre que parce que cette altérité même s'inscrit sur le fond d'une identité fondamentale avec moi (Hegel).   -La conscience n'est pas statique, elle est intrinsèquement autodépassement perpétuel vers sa propre essence à réaliser. Cette essence constitue une essence dialectique, dans laquelle s'opère la reconnaissance progressive de l'altérité en soi, et de l'identité de soi avec l'altérité.

- Par définition, l'étranger est ce qui n'est pas moi, sans quoi il ne serait précisément par un étranger pour moi. - Or, l'étranger n'est pas non plus un autre radicalement extérieur à moi, sans quoi il ne saurait non plus être jugé comme étranger : en effet, un chien n'est pas jugé comme étranger par rapport à un homme, parce qu'il est précisément radicalement autre, humainement parlant, par rapport à cet homme. - Ainsi, comment définir l'étranger, s'il n'est ni le même que moi, ni un autre radicalement autre par rapport à moi ? L'étranger, en raison précisément de cet entremêlement irréductible du même et de l'autre, ne constitue-t-il pas précisément cela même à l'épreuve de quoi chaque individu peut mesurer sa propre humanité ? L'étranger n'est-il pas, en vertu de son altérité constitutive même, la mesure de ma propre identité ?

« Ce dernier terme a pour origine probable, selon Lévi-Strauss, la désignation du chant inarticulé des oiseaux, paropposition au langage humain.

Mais ni le mot «sauvage», ni le mot «barbare» ne se réduisent à qualifier la nature parrapport à la culture.

Lorsque nous traitons tel ou tel peuple de « sauvage », lorsque nous qualifions ses coutumes etses rites d'« habitudes de sauvages », nous faisons certes comme si nous le rejetions hors de la culture, dans un «pur état de nature ».Mais, en réalité, le sauvage « pur » n'existe pas, car tout homme est toujours d'emblée inscrit dans une culturedéterminée.

Par ces expressions, nous voulons signifier en réalité que nous rejetons la culture de l'autre, comme sielle n'était pas digne d'être une manifestation culturelle de l'homme, et devait être abaissée au rang de grossièrenature.Ainsi, c'est comme si on refusait d'admettre le fait même de la diversité culturelle, affirmant implicitement ououvertement que seule la culture à laquelle nous appartenons est vraie, « normale », modèle et expression de lanorme, donc supérieure.Lévi-Strauss précise, à la suite de cet extrait, que le véritable «barbare» est celui qui applique à l'autre cequalificatif, et se montre ainsi incapable d'accepter la diversité culturelle et la relativité de sa propre culture.

Ce à quoi s'oppose cet extrait: L'expression « c'est un sauvage » cache donc en réalité, selon Lévi-Strauss, une forme plus ou moins déguisée deracisme, de peur et de refus de la différence culturelle.C'est dans son texte Race et histoire que Lévi-Strauss développera ces analyses pour montrer que ce refus a habitéle mouvement du colonialisme européen depuis le XVe siècle et lui a même apporté ses plus puissants alibis.C'est, en effet, en raison même de ce rejet que l'on proclamait la nécessité, par la colonisation, de « civiliser lessauvages ».

C'était en réalité un prétexte, nous dit-il, pour détruire les formes de civilisation qui ne correspondaientpas aux normes et aux idéaux de celle de l'Occident.Mais le texte de Lévi-Strauss s'oppose aussi à une certaine manière de concevoir le travail de l'ethnologue,manièrequi prédominait au début du siècle.

Il s'agissait alors de traiter les « cultures primitives », celles par exemple destribus d'Amazonie, comme des sous-cultures ayant manqué leur phase de développement.En montrant qu'il existe une « pensée sauvage » aussi riche et complexe que celles qui animent la culture del'Occident, Lévi-Strauss a tenté de renouveler le travail de l'ethnologue en le débarrassant de tout ce que sous-entendait de péjoratif l'idée même de « sauvage ».C'est pourquoi il écrit, à propos de l'idée occidentale selon laquelle les cultures «primitives» sont inertes etstationnaires : «Chaque fois que nous sommes portés à qualifier une culture humaine d'inerte [...] nous devons doncnous demander si cet immobilisme apparent ne résulte pas de [notre] ignorance.

» III.

L'étranger n'est autre que parce que cette altérité même s'inscrit sur le fond d'une identitéfondamentale avec moi (Hegel).

-La conscience n'est pas statique, elle est intrinsèquement autodépassement perpétuel vers sa propre essence àréaliser.

Cette essence constitue une essence dialectique, dans laquelle s'opère la reconnaissance progressive del'altérité en soi, et de l'identité de soi avec l'altérité.

L'autre, c'est ce qui est identique à la conscience de soi, maisde telle sorte que cette conscience ne sache pas encore que cet être-autre est constitutif de son être propre.-L'étranger, dans cette perspective, c'est l'autre sous l'horizon de la mêmeté, c'est la négation de ce qui est voué àse fondre dans une identification ultérieure, à travers une négation de cette négation même.

L'étranger, c'est lareconnaissance de l'identité sous la modalité de la différence ; or, en tant que simple modalité, cette différence estvouée à se dissoudre par le même processus qui l'a vue naître, à savoir par la négation même.

L'identité parvient àréaliser son essence grâce à la négation de la négation qui faisait de l'étranger un autre que moi.

L'étranger, c'estdonc moi-même, mais sous la modalité de la différence, donc de la négation ; et, inversement, moi-même ne suisque la perspective étrangère que je prends sur moi-même pour pouvoir prendre une distance par rapport à moi-même.

L'étranger me permet donc de me rejoindre moi-même en faisant me déprendre tout d'abord de ma propreidentité.

Conclusion.

-L'étranger n'est d'abord perçu que sous l'angle de la modalité par laquelle il m'apparaît : l'étranger, c'est l'autre,c'est le non-moi.-Or, ce non-moi n'aurait précisément rien de commun avec moi, s'il ne devait être considéré que sous l'angle de lanégativité.-L'étranger est donc fondamentalement un moi qui s'ignore, ou plus précisément un moi qui ne saurait advenir à lui-même s'il demeurait dans une pure identité statique.

L'étranger doit donc constituer, en définitive, l'horizon de mapropre identité : il constitue moins un autre que moi, que ce moi se rejoignant lui-même sur le fond de sa propredifférenciation.. »

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