leurs principes.
Publié le 21/10/2012
Extrait du document
«
pensée.
Mais la volonté nous fournit le moyen de la prendre à son propre
piège : elle engendre l'intelligence,
instrument mis par elle au service de la vie, puissance d'abstraction et de réflexion qui peut s 'affranchir de « l'attention à la
vie », se libérer du vouloir, se vouer à la
contemplation désintéressée.
Sur cette voie - et l'on reconnaît ici l'inspiration de la Critique du Jugement - l'art représente une Première étape; l'artiste
est « l'œil unique du monde », et la réflexion l'essence du génie.
Mais l'art,
la musique même, image de la volonté, ne procure qu'une paix éphémère.
Seule
la philosophie, et une morale qui n'est
plus celle de la Justice -fondée sur la
pluralité des êtres - mais qui implique
la négation de toute individualité, peuvent
nous faire atteindre au point où, la
volonté se détruisant elle-même, « il
n y a plus que la connaissance », où la
contemplation se prend elle-même pour
objet.
( H.D.)
BOSTRÙM Christopher (1797-1866)
Philosophe suédois très influencé par
Leibniz et Berkeley.
Idéaliste soucieux
d'échapper
au romantisme des postkan
tiens : « Tous les idéalistes modernes, dit-il, Schelling et Hegel inclus, ne sont que des idéalistes relatifs.
»
STEWARD Dugald (1753-1828)
est né et mort à Edimbourg.
Les 3 volumes des Eléments de la philosophie de 1 'esprit humain parurent en 1792, en 1814 et en 1827.
BROWN Thomas (1778-1820)
né à Kirkmabveck, prqfesseur à Edim bourg de 1810 à 1820, est l'auteur de Recherches sur la relation de cause à effet (1804) et de Lectures sur la philosophie de 1 'esprit humain (1822).
HAMILTON Sir William ( 1788-
1856)
né à Glasgow, mort à Edimbourg,
professa à Edimbourg à partir de 1835.
On lui doit des Dissertations sur la philosophie et la littérature, sur la réforme de 1 'éducation et de 1 'université ( 1852), des Leçons de logique et des Leçons de méta physique, publiées après sa mort.
MILL John-Stuart (18o6-1873)
né à Londres, mort à Avignon, auteur de : Logique instinctive et déductive (1843); Utilitarianism (1863); Three Essays on Religion ( 1874), est un des premiers philosophes à ne pas consi
sidérer la logique aristotélicienne comme absolue, définitive.
Il est nourri à la fois de Hume et de Bentham : de l'un, il reçoit l'idée d'un
univers empiriste et impressionniste, de l'autre, l'exigence d'une rigueur logique et déductive.
Ainsi, sa logique sera une manière de traduction, en langage empi rique, de la logique traditionnelle des concepts et des propositions; les sciences morales seront de type essentiellement déductif,
tout
en cherchant un équilibre entre la raison et le sentiment : « une personne ayant une croyance est une force sociale égale à plusieurs autres
qui n'ont que des intérêts ».
Ainsi son « utilitarisme » ne sera-t-il pas exempt
d'un certain libéralisme, ni de sympathie
pour le socialisme.
Le concept est un certain nombre de sensations ordonnées, la proposition un nombre défini d' expé riences qui peut, par commodité, passer
pour universel.
L'expérience soit effective,
soit continuée par l'imagination, est
toujours présente.
Reste
le problème de la causalité, déjà résolu par les « tables » de Bacon et la notion d'habitude de Hume; Mill le résout d'une troisième manière :
par la liaison constante et inconditionnelle
entre deux phénomènes.
n détermine la
causalité techniquement, à l'aide des quatre célèbres méthodes {concordance; différence; variations concomitantes; mé thode des résidus, cette dernière étant celle qui a permis la découverte de Neptune
par Leverrier).
Ce qui donne valeur
à la causalité, c'est un phénomène d'induc
tion analogue à celui qui nous fait atteindre une proposition dite univer selle : universalité purement « régio
nale ».
NEWMAN John-Henry (1801-1890)
D'abord curé anglican, puis prêtre
catholique, il termina sa vie comme car dinal de l'Eglise romaine.
Pour beaucoup, il restera l'animateur du « Mouvement
d'Oxford », l'auteur des célèbres tracts
qui de 1833 à 1841 rappelèrent à
l'Eglise anglicane que son grand recours était, non pas l'Etat, mais la tradition
apostolique.
Cependant l'histoire de sa conversion n'apporte pas la leçon habi tuelle : il n'a pas brûlé ce qu'il avait
adoré; en quoi il diffère des tempéra
ments explosifs qui, changeant de culte,
changent de per sonnaZ ité.
Newman n'est ni un savant ni un philo sophe : c'est un homme d'Eglise.
Et pourtant sa pensée a exercé, en France et en Allemagne notamment, une influence d'ordre philosophique.
C'est qu'elle implique une philosophie latente, bien qu'il ne soit lui-même ni un métaphysicien ni un faiseur de système.
Des 40 volumes de son œuvre, il faut détacher : An Essay on the Develop ment of Christian Doctrine ( 1845) et An Essay in aid of a Grammar of Assent ( 1870).
Le premier essai contient ce qu 'on a appelé une pédagogie de la révélation.
Si l'Infini entend se révéler à la conscience finie, si l'Eternel veut
pénétrer dans le temps, il ne peut le faire
d'un coup, mais seulement de façon progressive.
Il dépose d'abord un germe en un point de l'espace et de la durée (par exemple dans le peuple juif); puis ce germe grandit, se ramifie,
s'épanouit; il assimile ce qu'il trouve alentour, il le change en lui-même, il ne cesse, tout au long de sa croissance, de varier ses aspects, de multiplier ses formes.
Il y a ainsi développement, c'est
à-dire continuité novatrice.
C'est pourquoi
il
ne convient pas d'exiger du christia
nisme une fixité improductive, il faut lui demander une sorte de fidélité créatrice.
On remarquera que ce sens du devenir historique
n'engendre chez Newman
aucun évolutionnisme mécanique, à la façon de Spencer.
Il ne tourne pas davan tage à l'évolutionnisme unilinéaire de type bergsonien.
L'inédit qui surgit
à chaque phase n'est amené ni par une impulsion antécédente ni par un jaillis
sement gratuit; il est commandé par la conscience actuelle de ce qu'il faut penser, croire et faire pour que le développement d'aujourd'hui soit conséquent à l'intuition
première et permanente.
Tout progrès est
le fait d'un discernement continu, d'un
jugement contemporain de chaque étape.
La Grammaire de 1 'assentiment n'oublie pas ces présupposés.
C'est le discernement dont nous parlons qui fait la force de l' « illative sense >>, du sens de l'inférence.
Newman appelle
ainsi le jugement implicite qui, sans
passer par un processus formel rigoureux,
permet cependant de relier correctement une conclusion à des prémisses.
Ainsi font les simples lorsqu'ils croient sans
pouvoir rendre compte, à la façon des doctes, de leur croyance.
Mais le jury
qui rapporte un verdict, le médecin qui
porte un diagnostic, le détective qui
conduit une enquête, ne font pas autre
ment.
Bien plus, le penseur lui-même, dès qu'il s'agit d'un objet un peu
complexe, prend parti au-delà de ce qu'il voit.
Preuve que la conviction s'instaure, non pas sur les raisons, mais sur l'acte
qui les combine et en fait la synthèse.
Ceci est spécialement vrai de la foi :
la conscience accumule les probabilités,
elle relève les signes convergents, elle
récapitule notions, sentiments, valeurs
morales : lorsqu'elle
se décide à croire, elle les dépasse : leur lien n'est pas en eux, mais en elle.
Cette théorie, chez Newman, garde une saveur empiriste, tout comme sa distinc
tion de deux connaissances : l'une
notionnelle, l'autre réelle.
Elle paraît
suspecter le jugement intellectuel en dépréciant le raisonnement verbal, la mise en forme logique.
En fait, Newman ne refuse nullement l'intellectualité, mais
la réduction de l'intellectuel au conceptuel.
La preuve en est qu'il ne fait point de l'assentiment une certitude morale, mais une certitude absolue : or ceci implique une satisfaction de l'intelligence plus encore qu'un apaisement du cœur.
En somme, tout en cheminant par le bas
à la manière anglo-saxonne, tout en semblant quêter la connaissance du singu
lier par les voies de l'expérience affective, il a pressenti que l'esprit pousse ses preuves, que l'intentionnel déborde l'ex pressif, que la liberté suscite ses appuis.
Par là, il a renouvelé la logique de l'induction, situé mais non détruit celle de la déduction, dégagé les catégories
d'une équation à soi d'ordre dynamique,
dont la cohérence formelle n'est qu'une
transcription, d'ailleurs indispensable.
La conversion de Newman est à l'image de cette logique de l'existence : elle ne fut ni révolte ni exaltation, mais passage
lucide et tranquille d'une forme étroite
à
une forme plus ample de spiritualité.
Non pas retournement de la sensibilité,
mais développement de la réflexion.
HENRY DUMÉRY
395.
»
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