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L'ÉVIDENCE MÉTAPHYSIQUE SELON DESCARTES

Publié le 24/03/2015

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Je me suis persuadé qu'il n'y avait rien du tout dans le monde, qu'il n'y avait aucun ciel, aucune terre, aucun esprit, ni aucun corps ; ne me suis-je donc pas aussi persuadé que je n'étais point? Non certes, j'étais sans doute, si je me suis persuadé ou seulement si j'ai pensé quelque chose. Mais il y a un je ne sais quel trompeur très puissant et très rusé qui emploie toute son industrie à me tromper toujours. Il n'y a donc point de doute que je suis s'il me trompe ; et qu'il me trompe tant qu'il voudra, il ne saurait jamais faire que je ne sois rien tant que je penserai être quelque chose. De sorte qu'après y avoir bien pensé et avoir soigneusement examiné toutes choses, enfin il faut conclure et tenir pour constant que cette proposition : Je suis, j'existe est nécessairement vraie toutes les fois que je la prononce ou que je la conçois en mon esprit.

Ce texte nous semble aussi important au point de vue métho­dique qu'au point de vue doctrinal.

a) Au point de vue méthodique il caractérise bien l'attitude philosophique : Nous y trouvons la conversion réflexive qui se détache de l'objet pensé pour se porter sur la pensée de l'objet, c'est-à-dire sur le sujet pensant.

 

b) Il caractérise également l'attitude philosophique comme substitution du point de vue ontologique au point de vue de l'objet (Descartes saisit ici l'être du sujet pensant au-delà de l'objet pensé).

 

c)  Au point de vue doctrinal, il nous introduit dans le spiri­tualisme cartésien. En ce sens, loin d'être aussi révolutionnaire qu'on l'a dit parfois, ce texte se rattache à une tradition philo­sophique, celle qui fait de la connaissance immédiate de l'âme par elle-même la première et la plus sûre des connaissances, connaissance propre à réfuter le scepticisme (saint Augustin avait déjà dit : « Si fallor sum «. Si je suis trompé c'est que j'existe. Cité de Dieu, livre XI, chap. 26) et à fonder la doctrine de l'immatérialité de l'âme.

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• • COMMENTAIRE a) Situation du texte Tout le début de la deuxième Méditation métaphysique, c'est-à­ dire tout ce qui précède ce texte, n'est que la reprise du thème fondamental de la première Méditation : l'expérience du doute systématique, volontaire, absolu : «Qu'est-ce donc qui pourra être estimé véritable? Peut-être rien autre chose sinon qu'il n'y a rien au monde de certain.

» b) Idée générale de ce passage Ce texte est une étape décisive dans l'itinéraire spirituel de la deuxième Méditation.

Descartes sort enfin du doute et décou­ vre une première vérité, un être indubitable, solide comme le roc, l'être du sujet.

« Je suis, j'existe.

» Il convient mainte­ nant par une étude précise du texte de dégager la nature de cette « première vérité ».

c) Explication détaillée du texte « Je me suis persuadé qu'il n'y avait rien du tout dans le monde, qu'il n'y avait aucun ciel, aucune terre ...

» C'est encore une fois le bilan de la première Méditation.

On le voit, Descartes revient sans cesse sur son doute dont les caractères essentiels sont ici encore rappelés.

D'abord Des­ cartes est non seulement convaincu mais persuadé par son doute (qui est plus qu'une argumentation abstraite, qui est une expérience spirituelle).

Notez que le champ du doute est celui des objets de pensée (aucun ciel, aucune terre) et que ce champ est totalement balayé par le doute (il n'y avait rien du tout).

Notez encore que l'existence du monde est non pas seuleme'nt mise entre parenthèses comme ce sera le cas chez Husserl, mais littéralement niée (c'est l'aspect hyperbolique du doute et aussi son aspect presque mystique: l'effort pour rejeter le monde = exercice spirituel).

« Ne me suis-je donc pas aussi persuadé que je n'étais point? Non certes, j'étais sans doute ...

si j'ai pensé quelque chose.

» Ici Descartes sort enfin de son doute, mais il faut voir comment il en sort.

Il n'y a pas d'objet privilégié, dans le champ du savoir, que le doute aurait épargné.

C'est en s'approfondissant et non en se limitant que le doute triomphe de lui-même.

L'acte même de douter, c'est-à-dire de penser impose son existence quelque douteux que puissent être les objets de pensée (c'est I' «indu­ bitable doute » dont parle Alain).

Descartes sort du doute 17. »

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