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L'Histoire est-elle une connaissance du passé ou une construction du passé ?

Publié le 24/06/2010

Extrait du document

histoire
-         L'on pourrait ainsi considérer que l'Histoire est un moyen de justifier ce qui nous arrange, on y chercherait ce qui corrobore nos hypothèses et on y projetterait nos convictions intimes. -         Il s'agirait alors de choisir entre les différents faits et de décider lesquels seraient significatifs et lesquels seraient anodins. -         Parée du manteau de l'objectivité, l'Histoire ainsi écrite passerait pour « vérité « aux yeux des néophytes. -         Cela permettrait de faire un usage politique de l'Histoire, d'en faire un instrument de propagande en appuyant l'idéologie d'un discours objectif portant sur des faits. -         L'on pourrait alors arguer du fait que cette propagande s'appuie cependant sur des faits réels. -         Il y aurait bien alors une réalité de la connaissance historique, en tant qu'elle n'invente pas les faits, mais se contente de sélectionner parmi ceux-ci. Il s'agirait donc d'une connaissance partielle et partiale. -         Cependant, comme le souligne Nietzsche, « Il n'y a pas de faits, il n'y a que des interprétations. « (Volonté de puissance, Tome I, Livre II, chapitre 2, §133) -         Cela signifie que ce qui compte, ce n'est pas le fait, c'est l'interprétation qu'on en donne, le fait à lui seul est vide de signification, il est donc négligeable, on pourrait quasiment s'en passer. Le fait n'est invoqué que pour donner du crédit à l'interprétation, il n'est que « poudre aux yeux «.
 
 
 
 
 
Analyse du sujet :
 
-         Si l’on devait faire l’histoire de l’Histoire, on se rendrait compte qu’elle trouve naissance chez Hérodote, un Grec qui mélangeait allégrement les faits avérés avec des interprétations mythologiques.
-         La genèse de l’Histoire semble donc se rattacher à la volonté d’un homme de retrouver des faits réels et de les rallier à une interprétation divine. En cela, l’Histoire ressemble plus à une construction inspirée de faits réels qu’à une véritable connaissance du passé.
-         Cependant, désormais promue au rang de science humaine, l’Histoire se veut une connaissance objective des faits passés.
-         En conséquence, elle aspire à la neutralité et à la recherche de la vérité. Elle ne prétend donc pas construire le passé comme qui en inventerait l’histoire, mais retrouver ce qui s’est réellement passé grâce à des indices.
-         Si tel était le cas, si l’Histoire parvenait à une connaissance objective des faits passés, tous les historiens auraient le même point de vue et la même interprétation de ces faits.
-         Or, il n’en est rien, et les historiens semblent tous se battre pour réussir à imposer leur interprétation.
-         Cela ne devrait-il pas nous incliner à penser que l’héritage d’Hérodote est finalement encore lourd ?
 
Problématisation :
Ce sujet pose problème parce que nous savons bien que si l’Histoire était une pure construction du passé, alors elle ne se distinguerait plus vraiment de la mythologie et elle perdrait le sens même de sa recherche. Ce faisant, si l’Histoire était une connaissance du passé, elle ne ferait l’objet que d’un travail de recherche où les connaissances s’accumulent petit à petit et elle ne serait pas sujette à tant de controverses. Or, régulièrement, de grands historiens « revisitent « l’Histoire et en donnent une interprétation différente, voire opposée à celle de leurs prédécesseurs. Comment rendre compte de ce paradoxe ?


histoire

« historique est « équivoque et inépuisable ».

Valéry dit que l'histoire « justifie ce que l'on veut ».

Dans sa richesse hétéroclite, il y a toujours de quoi justifier n'importe quelle position a priori de l'historien.

L'historien se projette dansl'histoire avec ses valeurs et ses passions.

Il ne saurait survoler l'histoire, la constituer du point de vue de Sirius, caril est homme lui-même, il vit dans l'histoire, il appartient à une époque, à un pays, à une classe sociale.

Il est lui-même prisonnier du cours de l'histoire.

L'histoire science (l' « Historie » disent les Allemands) est un acte de l'historien et cet acte lui-même un événement historique, il appartient à la réalité historique (« Geschichte »).

C'est pourquoi toute science historique, elle-même moment de l'histoire, serait condamnée à une relativité, à unesubjectivité irrémédiable : « La conscience de l'histoire est une conscience dans l'histoire. » Ceci exclut toute possibilité de tirer de l'histoire des « leçons ».

Car l'historien ne tire pas sa philosophie ou sa morale de ses connaissances historiques.

Tout au contraire il constitue sa vision de l'histoire à partir deperspectives philosophiques, morales politiques qui la précèdent et se projettent en elle.

Il en est de l'histoirecomme de la mémoire individuelle ; c'est à partir des « visées », des projets présents –dirigés vers l'avenir- que les individus et les peuples reconstituent leur passé.

L'histoire subjective serait donc inévitable- et par là même, osaientdire les historiens allemands au temps du nazisme, légitime.

« Chaque génération se forme sa propre conception historique selon ses nécessités nationales. » Cet antirationalisme, d'ailleurs, est lui-même un fait historique.

Il reflète l'époque troublée qui est la nôtre.

LeXIX ième pouvait se permettre un idéal d'objectivité parce que, malgré la révolution de 1848 et la guerre de 1870,ce fut un siècle relativement stable.

Comme l'écrit P.

H.

Simon : « Entre le canon de Waterloo et celui de Charleroi, l'Europe a connu 99 ans de paix relative. » Au contraire, notre siècle est beaucoup trop historique pour se permettre d'être objectivement historien.

Le mot histoire aurait communément évoqué, il y a cent ans, dans un testassociatif, les mots archives, documents, bibliothèque, tandis que pour nous il évoquerait : révolution, torture,bombes atomiques.

On comprend dès lors que Marrou puisse écrire : « L'histoire est la réponse… à une question que pose au passé mystérieux la curiosité, l'inquiétude, certains diront l'angoisse existentielle. » Mais sans vouloir minimiser cette découverte contemporaine de la subjectivité historique, il nous reste àl'interpréter.

Loin d'en tirer parti pour rejeter l'idéal d'objectivité rationnelle formulé (en termes peut-être tropétroits) par Langlois et Seignobos , nous la mettrions volontiers au service de l'idéal rationaliste.

La prise de conscience des difficultés extrêmes de l'objectivité en histoire est pour l'historien une invitation à redoubler deprécautions, une mise en garde contre lui-même.

La prise de conscience de la subjectivité peut alors êtreconsidérée comme un moment dans la conquête de l'objectivité.

Si Langlois & Seignobos n'ont pas soupçonné toutes les difficultés de la tâche, n'ont pas reconnu tous les pièges de l'irrationnel, nous ne dirons pas qu'ils furenttrop rationalistes mais qu'ils ne le furent pas assez.

Et si toute perspective historique (comme chacune desgéométries possibles) implique inévitablement un système de postulats, en « explicitant autant qu'il le peut ses postulats », l'historien accomplit un progrès vers la rigueur scientifique.

Comme Marrou l'a brillamment montré, la découverte de la subjectivité historique, bien loin de légitimer le truquage des matériaux de l'histoire, doit donner àl'historien le sentiment plus vif de sa responsabilité, et lui imposer l'honnêteté la plus stricte.

La subjectivité de l'Histoire dévoilée par ses contradictions. 2.

- Procédons à un raisonnement par l'absurde : si l'objectivité régnait dans cette science qu'est l'Histoire, alors le rôle de l'historien consisterait à reprendre le travail de son prédécesseur là où cedernier l'avait laissé, et à retrouver les vérités manquantes, celle que son prédécesseur n'auraitpas retrouvées. - En effet, si connaissance du passé il y a, alors les historiens décrivent la vérité.

Comme la vérité est nécessairement une et intemporelle, tous les historiens devraient s'accorder sur cesfaits passés. - Un simple regard sur les débats historiques contemporains nous permet de voir qu'il n'en est rien : les historiens ne sont pas d'accord entre eux. - Si l'on prend par exemple la Shoah, on remarquera que les historiens ne sont pas d'accord sur ce qui a décidé Hitler à mettre en place la « solution finale » (l'extermination systématique etorganisée de tous les Juifs). - Pour les historiens intentionnalistes, Hitler avait l'intention d'exterminer tous les Juifs d'Europe avant la déclaration de la guerre.

Pour les historiens fonctionnalistes, les nazis n'avaient pas nourricette intention avant 1941.

La « Solution finale » aurait ainsi été élaborée tardivement et neserait que le résultat du fonctionnement du système du IIIe Reich qui, pour des raisonshistoriques, imposerait fatalement le meurtre de masse mais ne l'aurait pas planifié antérieurement. - De telles divergences portant sur un sujet aussi étudié que la Shoah doivent nous amener à constater qu'il n'y a pas de vérité établie dans le domaine de l'Histoire. - Si donc il n'y a pas d'objectivité historique, en quoi consiste la subjectivité propre à l'Histoire ? L'Histoire consiste à construire une mythologie à partir d'une connaissance partiale et partielle dupassé. 3. - « L'Histoire justifie ce que l'on veut.

Elle n'enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout et donne des exemples de tout » (Paul Valéry, Regards sur le monde actuel , 1945). - L'on pourrait ainsi considérer que l'Histoire est un moyen de justifier ce qui nous arrange, on y chercherait ce qui corrobore nos hypothèses et on y projetterait nos convictions intimes.. »

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