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L'imagination est-elle le refuge de la liberté ?

Publié le 17/01/2022

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La raison a longtemps tenu pour suspect l'imagination, la considérant non seulement comme maîtresse d'erreur et de fausseté, mais encore comme relativement pauvre: «Comme les bornes de notre imagination sont fort courtes et fort étroites, écrit Descartes, au lieu que notre esprit n'en a presque point, il y a peu de choses, mêmes corporelles, que nous puissions imaginer, bien que nous soyons capables de les concevoir. « Toutefois, nous pouvons nous demander si un tel jugement dépréciant l'imagination ne doit pas être révisé, notamment en nous demandant si cette «folle du logis «, comme l'appelait Malebranche, n'est pas au fond le refuge de la liberté.
 
  • L'imagination, condition de la liberté
  • Se désengluer de l'existant
  • Une double néantisation. Néantiser l'objet imaginé en posant le réel...
  • ... c'est néantiser le réel en posant l'objet
  • L'imagination fonction de l'irréel
  • L'imagination nous libère des images de la réalité
  • Une libre création
  • L'expérience de l'ouverture


« l'imaginaire n'est pas posé en fait, le dépassement et la néantisation de l'existant sont enlisés dans l'existant ; ledépassement et la liberté sont là mais ils ne se découvrent pas, l'homme est écrasé dans le monde, transpercé parle réel, il est le plus près de la chose» (ibid., p.

359).

Et toute conscience est liberté parce que la conscienceréalisante enveloppe nécessairement un dépassement vers une conscience imageante, qui elle-même autorise etfonde la conscience réalisante.

«Il ne saurait y avoir de conscience réalisante sans conscience imageante etréciproquement» (ibid.

, p.361).

C'est la raison pour laquelle l'imagination est «une condition essentielle ettranscendantale de la conscience.

Il est aussi absurde de concevoir une conscience qui n'imaginerait pas que deconcevoir une conscience qui ne pourrait effectuer le cogito» (ibid.).

On peut cependant se demander s'il n'existepas une autre forme d'imagination qui dépasserait cette simple faculté de former des images, et ouvrirait sur un«irréel» qui serait davantage qu'une simple négation de la réalité perçue, et le royaume d'une liberté plus créatrice. L'imagination fonction de l'irréel L'imagination nous libère des images de la réalitéL'objet de l'imagination n'est-il un irréel que par rapport à la perception actuelle, ou son irréalité est-elle radicale? Lemonde de l'imaginaire ne possède-t-il pas une complète autonomie à l'égard de celui de la perception ? « On veuttoujours, observe Bachelard, que l'imagination soit la faculté de former des images.

Or elle est plutôt la faculté de déformer les images fournies par la perception, elle est surtout la faculté denous libérer des images premières, de changer les images.

S'il n'y a pasimagination, il n'y a pas d'action imaginante » (L'Air et les Songes, Corti, p.7).

Les instances qui fournissent les images, ce sont la perception et lamémoire.

En fait, il convient de préciser ce que l'on entend par «image ».

Si«image» signifie une représentation mentale constituant une répétition plusou moins affaiblie d'une sensation, ou plus exactement d'une perception,c'est-à-dire une reproduction de la réalité, alors l'imagination vraie ne formepas d'images.

Mais si «image» signifie une représentation construite, unecombinaison nouvelle des données de la perception qui ne reproduit pas maisréinvente la réalité, alors l'imagination forme des images, des «imagesimaginées» (cf.

La Terre et les Rêveries du repos, Corti, p.

3).

L'imagination«est la faculté de former des images qui dépassent la réalité, qui chantent laréalité» (L'Eau et les Rêves, Corti, p.

23). Ce pouvoir de négation que révèle l'imagination est positif.

L'imagination estune puissance majeure pour l'homme.

Comme l'avait montré Kant, elle n'estpas simplement "reproductrice" mais également productive.

Bachelard élèvecette faculté, qui précède l'expérience à une puissance d'anticipation del'avenir.En ce sens, l'imagination nous détache du passé et du présent et ouvre lechamp du futur.

La fonction de l'irréel nous permet de dépasser le donné pour nous projeter vers ce qui n'est pasencore.

L'imagination dynamise, en nous réveillant de nos habitudes et de nos automatismes.

Elle est une porteouverte sur le champ du possible qui coexiste au champ du réel. Une libre création L'imagination va donc «déformer» les images copies du réel fournies par la perception.

Elle altérera une image en lafragmentant et en réassemblant ces fragments de manière originale; en modifiant le rapport de ses parties,grossissant l'une, diminuant l'autre; en lui ajoutant des éléments étrangers, etc.

Elle va également procéder à dessubstitutions d'images et à des associations d'images, chaque image en appelant d'autres, «déterminant uneprodigalité d'images aberrantes» qui constituent son «auréole imaginaire ».

Mais cela ne signifie pas que «cettelibération des images premières », à laquelle nous invite cette faculté d'imagination qui « spécifie le psychismehumain», qui est même «une faculté de surhumanité» (ibid., p.

23), ne réponde à aucune loi: même le jaillissement leplus inattendu d'images, le plus débridé et le plus irrationnel, obéit à une certaine logique, fût-elle ténue, qui estspécifique à l'imaginaire. L'expérience de l'ouverture Ainsi l'imagination n'est pas une faculté passive, comme la perception.

Elle est une puissance foncièrementdynamique et organisatrice qui travaille à déréaliser le réel atteint dans la perception en le déstructurant pouropérer une structuration nouvelle, en sorte que dans l'imagination l'univers tout entier n'est plus donné au sujet,mais librement produit par lui.

«L'imagination invente plus que des choses et des drames, elle invente de la vienouvelle, elle invente de l'esprit nouveau, elle ouvre des yeux qui ont des types nouveaux de vision» (ibid., p.

24).En cela l'imagination, qui est la fonction de l'irréel ou du surréel, est «l'expérience même de l'ouverture, l'expériencemême de la nouveauté », tandis que «la fonction du réel est une fonction d'arrêt, une fonction d'inhibition qui réduitles images de manière à leur donner une simple valeur de signe» (La Terre et les Rêveries du repos, Corti, p.

22). Conclusion Imaginer, comme l'a bien montré Sartre, c'est nier ou «néantiser» le réel, c'est s'échapper hors du monde, del'existant, et par là c'est réaliser sa liberté.

Mais imaginer ce n'est pas simplement s'évader de la réalité en la niant,. »

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