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L'imitation - Platon et Aristote

Publié le 02/02/2011

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platon
On a apposé, à maintes reprises, sur Platon et son œuvre, l’étiquette « ennemi des arts « et, quelquefois même, on a fait de lui le théoricien de l’impossibilité de l’esthétique. Il est vrai que Platon condamne avec sévérité les productions des Beaux-Arts quand elles versent dans l’esthétisme, la mollesse et l’illusion. Le beau, pour notre auteur, est abstrait. Fondé sur la perfection de l’ordre et de la mesure mathématique, c’est une essence métaphysique que le monde sensible ne peut guère retenir captive. Les beaux spectacles, les belles couleurs, les belles formes peuvent flatter agréablement les sens de l’amateur mais, ce qui importe, c’est « d’apercevoir et d’aimer la nature du Beau en soi «[1] sans se laisser entraîner dans le flux des apparences. Or, cette science qui est possession de la vérité et réminiscence des Idées n’est le fait que d’un petit nombre : les philosophes. Et ceux-là ne sont point artistes et ne s’occupent pas à imiter la nature, ils visent la réalité des choses.

platon

« « athée et misérable ».

La première mimétique est « eikastique », elle produit l'icône de la chose, la seconde est« fantastique » et ne produit que son fantasme [14] .

La première mimétique s'efforce de reproduire la vérité de la chose même, elle est, pourrait-on dire, rigoriste et puritaine, la seconde est hédoniste, tendant toujours au plaisir età l'agrément [15] . Pour conclure ce rapide aperçu, il nous faut dire que c'est la conformité à l'Idée qui est le critère de vérité pourPlaton.

A partir de là, tout ce qui relève du sensible est déjà, par rapport au monde intelligible, disqualifié.

Il y a uneséparation du sensible et de l'intelligible que Platon reprend sous différentes formes.

Cette distinction est d'ordreontologique et aussi épistémique.

On a, d'une part, la « forme-idée », principe rationnel d'organisation de l'être,objet d'un vrai savoir, et d'autre part, les objets qui ont partie liée avec le sensible et qui, par là même, sont soumisau devenir et à la corruption.

En deçà, sur l'échelle des valeurs, quant à l'être et à la connaissance, on a lesimages, imitations au troisième degré des réalités intelligibles et enfin les idoles ou simulacres, mensonges parconstruction, qui vont jusqu'à donner à ce qui n'est pas, l'apparence de ce qui est.

Ces aberrations ontologiques,les simulacres, se situent à l'opposé extrême des objets de la contemplation pure, les Idées.

Est-ce que Platon,quand il distingue entre deux mimétiques et quand il mentionne avec tant de respect la peinture égyptienne, penseà une interprétation rationnelle de modèles qui tenterait de dégager leurs vraies natures ? Est-ce que Platonenvisage réellement un art qui pourrait atteindre, par inspiration ou par abstraction, l'idéalité de la chose ? C'estpossible, mais cela n'apparaît pas clairement dans les dialogues, en tous cas sous forme de théorie de l'artconsciencieusement élaborée.

Tout au long de son œuvre, notre auteur est resté, semble-t-il, prisonnier de sathéorie de l'imitation qui est une manière économique mais limitative de poser et de résoudre simultanément leproblème du contenu des arts par rapport au contenu de la connaissance. Les Idées, ces substances métaphysiques, existent hors du monde sensible et hors de l'intellect dans un lieusupracéleste.

On ne peut avoir finalement accès à ces idées que par ce que Platon appelle selon le contexte,réminiscence, participation, activité théorétique ou bien dialectique.

Mais jamais la mimésis ne décrit le même mouvement ascendant que la connaissance, c'est plutôt l'inverse qui se passe, elle est sous ses différentes formes,jusqu'à la plus dégradée, une représentation descendante.

En somme, l'imitation accomplit, sur le chemin de l'être etde la connaissance, le parcours inverse de celui de la contemplation.

Rien n'est plus opposé peut-être à la « forme-idée » que l'image.

Au mieux, celle-ci redouble l'aspect sensible et souvent, elle ne fait que se déployer dans lemilieu mobile de l'apparence du changement et des sensations, en se faisant passer pour originaire.

Peut-être queles seuls germes d'une théorie positive de l'art se trouvent chez Platon dans sa théorie de l'amour ; ce processus quinous fait penser immédiatement à ce qu'on appelle en psychanalyse la « sublimation », mais il appartiendra au néo-platonisme de dégager l'idée d'énergie créatrice comme médiation entre le sensible et l'intelligible. L'esthétique d'Aristote Aristote a une approche des activités artistiques qui tend à serrer de près ce qu'elles ont de spécifique.

Plus quePlaton, il insiste sur le fait que l'art ne doit pas être confondu avec la grossière copie des apparences ; de Polygnoteou de Zeuxis, il n'hésite pas à dire qu'ils représentaient leurs modèles « en mieux » [16] .

Les objets d'art sont des imitations, mais Aristote s'emploie à dégager philosophiquement ce qui est propre aux êtres artificiels quand, selonune définition qui lui est chère, leur création « s'accompagne de raison », et cela sans chercher d'emblée à situerces objets par rapport à un idéal transcendant ou dans l'optique d'une théorie de la connaissance et des valeurs, cequi est, si l'on peut dire, l'obsession de Platon, au point que celui-ci perd de vue dans les œuvres tout ce qui n'estpas cause éternelle et universelle, l'Idée. Le concept d'imitation est incontournable si l'on veut comprendre aborder la conception aristotélicienne de l'art,mais il faut se garder de l'interpréter comme une correspondance réglée entre le signifiant et le signifié, entre unecopie et son modèle… L'artiste dispose d'une certaine latitude qui lui permet, à l'intérieur même du schème productifde l'imitation, d'en transgresser les lois et de le subvertir.

Sur ce point Aristote s'oppose aussi à Platon à qui il arrivede donner sa préférence à un certain « naturalisme » en art.

L'auteur de la Poétique nous montre que ce que l'artiste recherche, c'est la représentation d'une idée générale, et il faut que cette manifestation soit belle et plaise.Pour ce faire, le poète, le peintre ou le musicien vont de l'imitation ressemblante à la production d'un objet dont ilssoignent surtout l'exécution (choix attentif des sons, des couleurs, des formes, des mots, etc.) en passant par unereprésentation intérieure de la beauté, et inversement.

C'est dans ce mouvement de va-et-vient que résidejustement l'art ; c'est là ce qui fait que l'artiste n'est pas simplement le contemplateur myope d'un lointain mondeintelligible, ni le transcripteur docile des apparences...

Il recherche l'universel et il s'exprime dans le particulier sansêtre assujetti servilement à un modèle.

Aristote envisage même des œuvres dans lesquelles tout est inventé : faits,personnages, etc., et qui, nous dit-il, ne laissent pas de plaire [17] .

C'est la parfaite exécution, plus que l'exactitude de l'imitation, qui produit le plaisir et, l'on serait tenté de dire, à la manière de Kant, le plaisir esthétique .

En cela, par cette attention prètée aux motivations, aux modalités et aux fins de l'acte créateur, la Poétique d'Aristote est beaucoup plus moderne que l'idéalisme platonicien. Autre différence remarquable : pour Aristote, nos sens sont les premiers instruments de la connaissance particulièreet à partir de celle-ci seulement, l'intelligence élabore les idées universelles.

Les « formes-idées » ne se trouventpas dans un monde céleste, mais en puissance dans les objets sensibles, avant que l'intelligence ne les découvre etne les fasse passer à l'acte.

Autrement dit, pour Aristote, les idées ne sont pas des paradigmes auxquels les autreschoses participent confusément, elles existent dans l'esprit [18] .

Et donc, à l'inverse de ce qui se passe chez Platon, la connaissance, au lieu de se fourvoyer dans la sensation commence avec elle.

A partir de la sensation seforme le souvenir, du souvenir l'expérience et de l'expérience viennent les principes de l'art et de la science [19] .. »

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