L'opinion peut-elle faire la loi ?
Publié le 01/03/2005
Extrait du document
«
La démocratie qui est liée à la liberté d'expression est liée au dialogue : elle est fondée sur le débat public.
C'est grâce à celui-ci que les mentalités progressent.
C'est la découverte capitale que Socrate a faite.
Enfin l'opinion a un rôle essentiel de juge.
En appeler à l'opinion publique comme Zola dans "J'accuse" c'estsoumettre la politique au jugement de la société tout entière, afin que la société ne soit pas soumise à la politiquede quelques uns.
B - CELA DIT, GOUVERNER AVEC L'OPINION CELA NE VEUT PAS DIRE SE CONFORMER A ELLE.
Ainsi que l'a montré Platon, le politique doit guider la cité et non se laisser guider par elle.
Il faut se méfier également de ceux qui prétendent gouverner par l'opinion car ils pervertissent alors l'idéaldémocratique en pure démagogie.
Le démagogue se fait le miroir des désirs collectifs afin de mieux séduire la cité.
« N'est-ce pas le désir insatiable de ce que la démocratie regarde comme sonbien suprême qui perd cette dernière ?— Quel bien veux-tu dire ?— La liberté, répondis-je.
En effet, dans une cité démocratique tu entendras direque c'est le plus beau de tous les biens, ce pourquoi un homme né libre ne saurahabiter ailleurs que dans cette cité (...).
Or (...) n'est-ce pas le désir insatiablede ce bien, et l'indifférence pour tout le reste, qui change ce gouvernement et lemet dans l'obligation de recourir à la tyrannie ? (...).
Lorsqu'une citédémocratique, altérée de liberté, trouve dans ses chefs de mauvais échansons,elle s'enivre de ce vin pur au delà de toute décence ; alors, si ceux qui lagouvernent ne se montrent pas tout à fait dociles et ne lui font pas large mesurede liberté, elle les châtie (...).
Et ceux qui obéissent aux magistrats elle lesbafoue et les traite d'hommes serviles et sans caractère.
Par contre elle loue ethonore, dans le privé comme en public, les gouvernants qui ont l'air degouvernés et les gouvernés qui prennent l'air de gouvernants.
N'est-il pasinévitable que dans une pareille cité l'esprit de liberté s'étende à tout ? (...).
Qu'il pénètre, mon cher, dans l'intérieur des familles, et qu'à la fin l'anarchie gagne jusqu'aux animaux ? (...).Or, vois-tu le résultat de tous ces abus accumulés ? Conçois-tu bien qu'ils rendent l'âme des citoyenstellement ombrageuse qu'à la moindre apparence de contrainte ceux-ci s'indignent et se révoltent ? Et ilsen viennent à la fin, tu le sais, à ne plus s'inquiéter des lois écrites ou non écrites, afin de n'avoirabsolument aucun maître.— Je ne le sais que trop, répondit-il.— Eh bien ! mon ami, c'est ce gouvernement si beau et si juvénile qui donne naissance à la tyrannie.»PLATON.
POUR DÉMARRER
Voici l'idée directrice de ce texte : la démocratie est minée par le principe même qui l'a créée, la recherche de laliberté ; lorsque cette dernière devient sans frein, elle conduit à un régime sans loi et, par conséquent, à latyrannie.
Vous noterez les résonances tout à fait modernes et contemporaines de ce texte, qui conduisent à ensouligner son intérêt philosophique.
CONSEILS PRATIQUES
Vous devez ici vous livrer à un travail très soigneux de définition des termes, en n'oubliant pas de les replacer dansle contexte de l'Antiquité grecque et de la pensée de Platon.
Les termes ou expressions de démocratie, liberté, désirinsatiable, tyrannie, magistrat, anarchie, loi écrite et non écrite doivent être particulièrement bien définis, pourpermettre une véritable compréhension de ce texte.
introduction
• Ce texte se rapporte aux thèmes de la cité démocratique et du pouvoir politique.
Quant à la problématique et auproblème qu'il soulève, les voici : la démocratie est-elle véritablement règne de la licence et de l'excès, trop-plein deliberté faisant naître un excès de servitude ? Le problème est de savoir si démocratie égale caprice et règne du bonplaisir ou si elle est capable (ce que ne pense pas Platon) de nous apporter un grand bien.• Quelle est l'idée directrice de ces lignes ? La démocratie est minée par le principe même qui l'anime, la liberté.
Elledevient rapidement régime sans frein ni loi, anarchie conduisant à la tyrannie.• On saisit l'enjeu du texte, son importance décisive, la possibilité qu'il nous offre de nous faire réfléchir sur les vicespossibles internes à la démocratie.
C'est une belle leçon de philosophie politique que nous entendons ici, dans cetexte de La République.
Veillons à ce que la démocratie moderne (et non plus la démocratie antique) ne deviennepas un régime sans loi et oublieuse de la loi.Ce texte se divise en trois grandes parties principales :.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- L'opinion peut elle faire la loi ?
- Une loi, suivant sa véritable notion, n'est pas tant faite pour limiter, que pour faire agir un agent intelligent et libre conformément à ses propres intérêts : elle ne prescrit rien que par rapport au bien général de ceux qui y sont soumis.
- L'empereur et son ministre purent d'autant plus aisément faire preuve de patience que la loi comportait une avancée décisive dans un autre domaine : toutes les communes étaient désormais tenues de créer une école de filles.
- Est-ce à la loi de faire le bonheur ?
- Est-ce la même chose de faire respecter la loi par la force que de fonder le droit sur la force ?