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Merleau-Ponty: Le malaise est essentiel a la philosophie.

Publié le 28/03/2005

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Le malaise est essentiel à la philosophie. Nous l'avons un peu oublié. Le philosophe moderne est souvent un fonctionnaire, toujours un écrivain, et la liberté qui lui est laissée dans ses livres admet une contrepartie : ce qu'il dit entre d'emblée dans un univers académique où les options de la vie sont amorties et les occasions de la pensée voilées. Sans les livres, un certaine agilité de la communication aurait été impossible, et il n'y a rien à dire contre eux. Mais ils ne sont enfin que des paroles plus cohérentes. Or, la philosophie a cessé d'interpeller les hommes. Ce qu'il y a d'insolite et presque d'insupportable en elle s'est caché dans la vie décente des grands systèmes. Pour retrouver la fonction entière du philosophe, il faut se rappeler que même les philosophes-auteurs que nous lisons et que nous sommes n'ont jamais cessé de reconnaître pour patron un homme qui n'écrivait pas, [...] il faut se rappeler Socrate. Merleau-Ponty

Merleau-Ponty, dans son discours de réception au Collège de France, s'interroge sur les relations du philosophe et de la Cité. Avec Socrate, la philosophie fait scandale, alors qu'aujourd'hui elle semble avoir perdu son pouvoir de vérité. Problématique. Pourquoi les philosophes d'aujourd'hui lisent-ils encore les textes de la tradition ? Qu'y cherchent-ils ? L'usage par chacun de sa raison n'est-il pas suffisant ? Pourquoi le confronter avec d'autres ? Au coeur de la philosophie, il y a donc un débat sur les enjeux de la pensée. Que peut le concept ? Est-il toujours en retrait par rapport à la réalité ? Enjeux. La philosophie ne va pas de soi. Il n y a pas d'évidence à laquelle le philosophe pourrait se référer pour justifier sa démarche. Cela se traduit par une attitude, par un malaise ressenti par les non-philosophes à l'égard de la philosophie. Autrement dit, avec Socrate, la philosophie fait scandale. Elle remet en question les croyances, les proverbes, les idées générales sur le monde tel qu'il va.

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« inquiétude, cette remise en cause brutale des idées, des préjugés. « Sans les livres, une certaine agilité de la communication aurait été impossible, et il n'y a rien à dire contre eux.Mais ils ne sont enfin que des paroles plus cohérentes.

Or, la philosophie a cessé d'interpeller les hommes.

» Cepassage peut faire penser au mythe de Theuth évoqué par Platon dans le Phèdre. Un passage fameux du Phèdre, rapportant le mythe de l'invention de l'écriture par le dieu égyptien Theuth, insiste sur la menace que représentel'écrit pour la pratique philosophique, D'après ce dernier livre : « Autre chose : quand, une fois pour toutes, il a étéécrit, chaque discours va rouler de droite et de gauche et passe indifféremment auprès de ceux qui s'y connaissent,comme auprès de ceux dont ce n'est point l'affaire ; de plus, il ne sait pas quels sont ceux à qui il doit ou nons'adresser.

Que par ailleurs s'élèvent à son sujet des voix discordantes et qu'il soit injustement injurié, il a toujoursbesoin du secours de son père ; car il n'est capable ni de se défendre ni de se tirer d'affaire tout seul » (275d-e).Celui qui possède la science du juste, du beau et du bien, « il n'ira donc pas sérieusement „écrire sur l'eau“ ceschoses-là [...] pour faire naître des discours incapables de se tirer d'affaire par la parole, incapables en outred'enseigner comme il faut la vérité » (276c).

» Merleau-Ponty peut reproche-t-il à la philosophie écrite ce manquede vie, ce risque de perdre la pensée vivante, la vraie philosophie incarnée par Socrate. « Ce qu'il y a d'insolite et presque d'insupportable en elle s'est caché dans la vie décente des grands systèmes.

Pourretrouver la fonction entière du philosophe, il faut se rappeler que même les philosophes- auteurs que nous lisons etque nous sommes n'ont jamais cessé de reconnaître pour patron un homme qui n'écrivait pas, [...] il faut se rappelerSocrate.

» Merleau-Ponty évoque les philosophies systématiques souvent accusées d'abstraction, de froideur, denégation de la vie et de la créativité.

Les conditions particulières de la systématicité en philosophie entraînent unparadoxe : la philosophie existant comme une diaspora de systèmes, aucun d'eux ne peut prétendre avoir autoritésur les autres.

L'autonomie de la pensée philosophique signifie aussi que chaque système obéit à sa propre loi, qu'iltrouve dans ses principes la règle de son développement interne.

Ce qui écarte de l'histoire de la philosophie le vécu, l'existentiel.

Un système n'est pas une expérience « vécue », ni même une expérience pensée, mais uneexpérience de, dans, par et pour la pensée.

C'est ce que reprochera Kierkegaard à la philosophie hégélienne,système à qui il reproche de n'être pas prêt de l'existence.

Merleau-Ponty, phénoménologue n'est pas étranger àcette recherche d'un contact plus direct aux choses qui ne passerait pas par l'écrit.

La vue, sens cher à Merleau-Ponty est plus à même de nous rapprocher de la vérité.

Il définit la philosophie comme suit: " la philosophie, la vraiepensée, qui est toute positive, retrouvera ce contact naïf toujours supposé par l'appareil de la négation et dulangage: elle sera, Bergson l'a souvent dit, fusion avec les choses, ou encore inscription, enregistrement, empreintedes choses en nous, elle cherchera moins à résoudre les problèmes classiques qu'à les dissoudre.

Acte simple, vuesans point de vue, accès direct et sans symboles interposés à l'intérieur des choses, toutes ces formules célèbresde l'intuition en font une prise massive sur l'être, sans exploration, sans mouvement intérieur du sens " ( Eloge de la philosophie, p.

23).

Cette citation nous montre bien que Merleau-Ponty considère la philosophie comme une vraie pensée, comme une vue sans point de vue (c'est-à-dire comme une science sans présupposés), et enfin commeune saisie directe des choses mêmes (par moyen de la perception). Merleau-Ponty recherche derrière l'académisme, l'enseignement universitaire, les livres une nouvelle fraîcheur à laphilosophie qu'il cherchera lui-même dans la phénoménologie, par un retour aux choses mêmes, à un rapport direct àces dernières.

C'est une manière de revenir aux fondements de la philosophie et à sa prise direct avec les choses etla vie comme le faisait Socrate en son temps, via le dialogue et la maïeutique, par son effet de torpille sur lesesprits.

Ce qui doit constamment motiver la philosophie, c'est l'éternel retour à ses sources, à Socrate… d'unemanière ou d'une autre.. »

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