Devoir de Philosophie

Montaigne et la mort

Publié le 08/05/2005

Extrait du document

montaigne

« La mort est moins à craindre que rien, s'il y avait quelque chose de moins... Elle ne vous concerne ni mort, ni vif ; vif parce que vous êtes ; mort parce que vous n'êtes plus. Nul ne meurt avant son heure. Ce que vous laissez de temps n'était non plus le vôtre que celui qui s'est passé avant votre naissance ; et ne vous touche non plus... Où que votre vie finisse, elle y est toute. L'utilité du vivre n'est pas en l'espace, elle est en l'usage : tel a vécu longtemps, qui a peu vécu : attendez-vous-y pendant que vous y êtes. Il gît en votre volonté, non au nombre des ans, que vous ayez assez vécu. Pensiez-vous jamais n'arriver là où vous alliez sans cesse ? Encore n'y a-t-il chemin que n'ait son issue. Et si la compagnie vous peut soulager, le monde ne va-t-il pas même train que. vous allez ? « MONTAIGNE

montaigne

« au scandale que représente la mort disparaisse.

Affirmer la contingence de l'existence humaine suffit-il àdissiper toute angoisse face à la mort ? Bien au contraire, l'arrachement qu'elle représente pose la questiondu sens et de la valeur de cette existence (quelle que soit sa durée).

La méditation sur la mort peut-ellevraiment dissiper toute angoisse face à la mort ? Peut-elle vraiment dissiper le sentiment d'une mort injuste(mort d'un enfant par exemple) ? 2.

L'existence et sa valeur A.

« Où que finisse votre vie, elle y est toute »Montaigne nous conduit maintenant à nous interroger sur la valeur de l'existence.

Le sens de sa thèse estrésumé par cet aphorisme : « Où que finisse votre vie, elle y est toute.

» Il est la conséquence del'argumentation développée plus haut : la contingence de l'existence humaine nous interdit de juger de savaleur en fonction de sa durée.

Si chaque temps assigné à une existence est le temps juste, on ne doit paschercher d'autre valeur à une vie que celle qui lui a déjà été donnée.

Se plaindre d'une existence trop courten'a pas de sens.Dès lors, cette pensée de la finitude nous ramène à la considération de l'instant présent.

Montaigne nousexpose une philosophie de l'« usage » de la vie.

La valeur et le sens de l'existence (I'« utilité du vivre »)repose moins sur la durée (l'« espace ») que sur l'usage même que l'on aura fait de sa vie.

Dès lors, on peutvivre longtemps et vivre peu (« tel a vécu longtemps qui a peu vécu »).

Il importe donc de bien vivre, c'est-à-dire de bien employer le temps donné, et finalement la durée présente.

Une vie peut donc avoir bien moinsde valeur qu'une autre ; il faut donc apprendre à vivre bien.C'est par un effort de volonté que l'on pourra vivre bien et dire que l'on a bien vécu.

L'homme n'a donc deprise sur sa propre existence que s'il est renvoyé à la durée présente et s'il se soucie de l'« usage » présentde sa vie : « Attendez-vous-y pendant que vous y êtes », nous prévient Montaigne...

Dès lors, si l'hommen'est pas maître de la durée de son existence, il est maître de son destin, c'est-à-dire de ce qu'il fera de savie.

Là volonté a une prise sur l'existence ; elle représente ce qui dépend de nous.

Nous retrouvons icil'opposition stoïcienne entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous.La mort joue un rôle essentiel : elle est ce qui mettra à jour le sens d'une existence donnée.

C'est dans lamort que l'existence puise son sens définitif : de telle personne, on pourra par exemple dire : « elle abeaucoup vécu ».Montaigne nous renvoie donc à la durée de l'existence présente et à son intensité.

Il oppose le quantitatif etle qualitatif.

Peu importe l'« espace », c'est-à-dire la durée de la vie.

La sagesse épicurienne nous renvoie àla pleine possession et au plein « usage » de l'instant présent.

II faut apprendre à vivre beaucoup, sansforcément vivre longtemps.

C'est la volonté qui peut avoir une véritable prise sur l'instant et en saisirl'intensité. B.

L'expression de la finitudeMontaigne interpelle directement son lecteur : « Pensiez-vous jamais n'arriver là où vous alliez sans cesse ?» Cette interrogation est une réponse à celui qui, au moment de mourir, regrette d'avoir peu vécu, seplaignant peut-être d'une vie trop courte.

Ici encore, la sagesse apparaît comme l'acceptation de la mort :l'« issue » est ce qui, rétrospectivement, donnera sens au parcours.

La sagesse consiste donc à ne pas selaisser entraîner par le cours de son existence en comptant sur sa durée : même une existence longue peutêtre vaine.La dernière phrase insiste sur l'instabilité de toute existence mondaine : tout vient à disparaître.

Elle insistesur l'impossibilité d'un « divertissement » et d'un refus de son propre destin : le monde ne peut être uneconsolation car la mort le rattrape.

Pour l'homme, s'aveugler sur ce qu'il a de plus propre (la finitude) est ceque Heidegger appellerait une « inauthenticité ».

L'expérience de l'anticipation de sa mort est une expérienceque l'on ne peut déléguer : elle est l'expérience la plus personnelle ; elle est surtout une expérience face àlaquelle je me trouve radicalement seul.

Si le secours de la « compagnie » peut me soulager temporairement,je ne peux partager ma mort propre ; il me faudra affronter seul la responsabilité de mon existence. Conclusion Montaigne cherche à rendre son lecteur responsable de son existence.

D'un côté, puisque la mort n'est pasun objet de pensée, elle ne peut être un objet de crainte ; pourtant, nous venons de voir que nous nepouvions faire comme si nous n'allions pas mourir.

Loin d'être opposées, ces deux affirmations se rejoignentpour étayer la thèse suivante : il nous faut être attentifs à l'usage de l'existence présente dans lequel prendracine le sens de notre existence.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles