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Nietzsche: L'activité du génie

Publié le 23/04/2005

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nietzsche
L'activité du génie ne paraît pas le moins du monde quelque chose de foncièrement différent de l'activité de l'inventeur en mécanique, du savant astronome ou historien, du maître en tactique. Toutes ces activités s'expliquent si l'on se représente des hommes dont la pensée est active dans une direction unique, qui utilisent tout comme matière première, qui ne cessent d'observer diligemment leur vie intérieure et celle d'autrui, qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens. Le génie ne fait rien que d'apprendre d'abord à poser des pierres, ensuite à bâtir, que de chercher toujours des matériaux et de travailler toujours à y mettre la forme. Toute activité de l'homme est compliquée à miracle, non pas seulement celle du génie, mais aucune n'est un « miracle ». D'où vient donc cette croyance qu'il n'y a de génie que chez l'artiste, l'orateur et le philosophe ? Qu'eux seuls ont une « intuition » ? [...] Les hommes ne parlent intentionnellement de génie que là où les effets de la grande intelligence leur sont le plus agréables et où ils ne veulent pas d'autre part éprouver d'envie. Nommer quelqu'un « divin », c'est dire : « ici nous n'avons pas à rivaliser ». En outre, tout ce qui est fini, parfait, excite l'étonnement, tout ce qui est en train de se faire est déprécié. Or personne ne veut voir dans l'oeuvre de l'artiste comme elle s'est faite; c'est son avantage, car partout où l'on peut assister à la formation, on est un peu refroidi. Nietzsche

(1844-1900) Philosophe allemand. Philologue de formation, il entreprit une critique des valeurs occidentales (esthétiques, philosophiques, religieuses, scientifiques) servie par un style éblouissant. De nombreux thèmes nietzschéens ont influencé la pensée contemporaine : généalogie des valeurs, volonté de puissance, surhomme, « mort de Dieu «, opposition Dionysos et Apollon, retour aux présocratiques. « La Naissance de la tragédie « (1872) ; « Ainsi parlait Zarathoustra « (1883) ; « Par-delà le bien et le mal « (1886). Certains de ses thèmes ont été récupérés par l’idéologie nazie.

 

 

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nietzsche

« b.

« mais aucune n'est un "miracle" »Un « miracle » est un fait extraordinaire, une merveille, se produisant contre toute attente.

Aucune activité del'homme ne traduit et n'exprime une intervention divine ; elle se ramène à une série d'efforts, de tâtonnements, pourtrouver quelque chose.

L'homme travaille fréquemment avec une attention passionnée; il bricole à ravir, il fait depetites besognes, mais aucune de ses activités ne manifeste une réalité extraordinaire : pas de miracle ! du labeur !c.

« Les hommes ne parlent intentionnellement de génie que là où les effets de la grande intelligence leur sont leplus agréables et où ils ne veulent pas d'autre part éprouver d'envie.

»Belle analyse de la création et de l'idée de génie ! Que désigne, en effet, le phénomène de l'envie? L'envie n'est pasla jalousie : dans le premier cas, le sujet est confronté à une infériorité, qui serait imméritée alors que, dans lesecond, il existe une crainte de perdre (une chose).Or l'envie, résultant d'une évaluation négative de l'infériorité par rapport à l'autre, est insupportable car notreinfériorité nous contrarie.

Donc l'envie est une passion malfaisante.

Si l'on parle de génie, non seulement l'intensitéde l'envie diminue, mais elle disparaît.

Ainsi les hommes vont parler de génie pour ne pas éprouver de sentimentd'infériorité : ils sont en face de sentiments plaisants devant l'oeuvre, mais ces effets doivent être attribués aumiracle, à la nature ou à Dieu.

Ainsi l'envie est-elle alors répudiée. 3) L'activité du génie diffère-t-elle de toutes les autres comme on le pense généralement ? Introduction On postule généralement qu'il existe une opposition radicale entre le génie (naturel, inspiré, etc.) et les autresactions de l'homme.

D'un côté, le don, l'inspiration et le mystère impénétrable et de l'autre, le labeur.La question est de savoir si l'activité du génie est favorisée par la nature ou les dieux ou bien si l'active intelligencerend compte de l'oeuvre d'art.

Inspiration divine, nature ou labeur ? D'où le problème : suffit-il d'être doué pour êtreartiste ? A) Opposition tranchée entre l'activité du génie et les autres activités (thèse) C'est ce que juge Platon : mais en quoi consiste la création de cette oeuvre d'art que nous définissons commeessence spirituelle des choses ? Ici surgit le fameux problème de l'inspiration artistique.

Créer, n'est-ce pas d'abordêtre inspiré par les dieux ou les Muses ?Pour Platon, le poète crée grâce à un don divin, un délire, un enthousiasme.L'artiste détient un mystérieux privilège : la suggestion divine le pousse à composer ou peindre, lui qui ne connaîtrien à tout ce qu'il fait.

Ce n'est point de sang-froid que l'artiste travaille, il est, au contraire, relié à la chaîne desMuses.

« C'est chose légère que le poète, ailée, sacrée ; il n'est pas en état de créer avant d'être inspiré par undieu, hors de lui, et de n'avoir plus sa raison; tant qu'il garde cette faculté, tout être humain est incapable de faireoeuvre poétique.

» (Platon, Ion, Belles Lettres). B) Le génie est labeur et il n'y a pas d'opposition (antithèse) Et si le poète ou l'écrivain dissimulaient leurs laborieux efforts, leur travail mille fois répété, leurs manuscrits raturés? Et si le génie était un dur labeur ? Telle est bien la thèse de Nietzsche.

La croyance au « miracle » poétique prendnaissance dans le goût de l'homme pour ce qui est fini et parfait. C) Unité des deux conceptions (synthèse) Il n'y a pas de miracle propre au génie et donc pas de dualité tranchée.

Toutefois, le don naturel (musical, etc.)joue un rôle.

La facilité d'expression de l'écrivain n'est pas un mythe.

Mais sans un labeur acharné, le don resteraitpure puissance non actualisée.

Donc il y a un mystère de l'activité artistique, qui n'est pas un simple effet dutravail.

Tout chef-d'œuvre est le fruit d'une activité inspirée soutenue par un effort constant. Conclusion Suffit-il d'être doué pour être artiste ? Certes pas.

L'oeuvre parfaite est un acte sans cesse réitéré. NIETZSCHE (Friedrich-Wilhelm). Né à Rocken en 1844, mort à Weimar en 1900.. »

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