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Nous possédons en nous-mêmes la vérité de PLATON

Publié le 08/01/2020

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platon

SOCRATE. - Maintenant fais attention quelle solution va se produire : s’il va se ressouvenir ou apprendre de moi.

MÉNON. - J’y ferai attention.

S. - Dis-moi, mon garçon, sais-tu que le carré est une figure comme celle-ci ?

L’ESCLAVE. - Oui.

S. - Alors, dans un carré, toutes ces lignes, il y en a quatre, sont égales ?

E. - Certainement. •

(Socrate demande alors de considérer un carré A de deux pieds de long de côté. Sa surface est donc égale à 4 pieds. De combien de pieds sera la longueur du côté d’un carré B de surface double, c’est-à-dire égale à 8 pieds ?)

E. - Il est évident, Socrate, que cette longueur sera double.

S. - Tu vois, Ménon, que je ne lui enseigne rien et que je ne fais que le questionner. En ce moment, il se figure qu’il sait quelle est la ligne dont doit se former l’espace de huit pieds. Ne crois-tu pas qu’il a cette conviction ?

M.-Si.

S. - Le sait-il donc ?

M. - Non, certes.

S. - Il croit qu’il se formerait d’une ligne double ?

M. - Oui.

S. - Regarde-le maintenant se souvenir progressivement, comme on doit se souvenir. Réponds-moi, toi : tu dis que l’espace double se forme de la ligne double ? (...) Mais vois si tu crois encore qu’on le formera en doublant la ligne ?

E. - Je le crois.

(Socrate va progressivement amener l’esclave à reconnaître son erreur.)

S. - Ainsi donc, mon garçon, le doublement de la ligne ne donne pas une surface double, mais quadruple.

E. - C’est vrai.

S. - Car quatre fois quatre font seize, n’est-ce pas ?

E. - Oui.

(La ligne de 4 pieds, obtenue en doublant le côté de A, donne donc un espace quadruple de A. Mais la ligne de 2 pieds correspond à une surface égale à A. Comment faire pour obtenir B ?)

S. - Il faut donc pour l’espace de huit pieds que la ligne soit plus grande que celle-ci, qui a deux pieds, mais plus courte que celle qui en a quatre.
E. - Il le faut.
S. - Essaye de dire de quelle longueur tu crois qu’elle est.
E. - De trois pieds.
S. - Si elle doit être de trois pieds, nous n’avons qu’à ajouter à celle-ci [la ligne de 2 pieds du carré A], la moitié d’elle-même et elle aura trois pieds (...).
E. - Oui.
S. - Mais si nous avons trois pieds d’un côté et trois pieds de l’autre, le tout ne sera-t-il pas de trois fois trois pieds ?
E. - Evidemment.
S. - Or combien font trois fois trois pieds ?
E. - Neuf.
S. - Mais combien devrait avoir de pieds la surface double ?
E. - Huit.
S. - Ce n’est donc pas encore avec la ligne de trois pieds que se forme la surface de huit.
E. - Non, assurément.
S. - Alors avec quelle ligne ? Tâche de me le dire exactement, et si tu ne veux pas faire de calcul, montre-la-nous.
E. - Mais par Zeus, Socrate, je n’en sais rien.
S. - Remarques-tu encore, Ménon, à quel point il est à présent dans le chemin de la réminiscence ? Au commencement, il ne savait pas quel est le côté du carré de huit pieds, ce que d’ailleurs il ignore encore. Mais il croyait alors le savoir et il répondait avec assurance comme s’il le savait, et il n’avait pas conscience de la difficulté. À présent, il reconnaît son embarras, et, s’il ne sait pas, il ne croit pas non plus savoir.
M.-Tu dis vrai.
S. - N’est-il pas actuellement en meilleure disposition relativement à la chose qu’il ignorait ?
M. - C’est ce qu’il me semble également.
S. - En le jetant dans l’embarras, en l’engourdissant comme la torpille, lui avons-nous fait quelque tort ?
M. - Il ne me semble pas.
S. - En tout cas, nous avons fait, à ce qu’il me paraît, quelque chose qui l’aidera à découvrir la vérité. Car à présent, comme il ne sait pas, il cherchera sans doute volontiers, tandis qu’auparavant il était tout porté à croire qu’il aurait raison de dire et de répéter devant une foule de gens que, pour doubler un carré, il faut doubler la longueur des côtés.
M. - Il y a apparence.
S. - Crois-tu donc qu’il se fût mis à chercher et à apprendre une chose qu’il pensait savoir, quoiqu’il ne la sût pas, avant d’être tombé dans l’embarras en se rendant compte de son ignorance, et d’avoir senti le désir de savoir?
M. - Je ne le crois pas, Socrate.
S. - Il a donc profité d’être engourdi ?
M. - Il me paraît que oui.
S. - Examine maintenant ce qu’à la suite de cet embarras il va découvrir en cherchant avec moi, sans que je fasse autre chose que l’interroger, sans rien lui enseigner. Observe bien si tu me surprendras à lui enseigner et à lui expliquer quelque chose, au lieu de le questionner sur ce qu’il pense.
(Socrate va alors conduire l’esclave vers la solution. En quadruplant la surface de A par l’ajout de trois autres carrés de surface égale à A (fig. 1), et en traçant pour chacun d’eux la diagonale (fig. 2), l’espace enfermé dans les quatre diagona-
S. - C’est sur la diagonale que, selon toi, esclave de Ménon, se construit l’espace double ?
E. - C’est bien cela, Socrate.
S. - Que t’en semble, Ménon ? Y a-t-il dans les réponses de ce garçon une seule opinion qui ne soit pas de lui ?
M. - Non, elles sont toutes de lui.
S. - Et cependant, il ne savait pas, nous l’avons reconnu, il n’y a qu’un instant.
M. - Oui.
S. - Ainsi donc, celui qui ignore une chose, quelle qu’elle soit, a en lui des opinions vraies sur la chose qu’il ignore ?

Sortir de la caverne, c'est aussi rentrer en soi-même. La vérité n 'est possible que parce qu'elle est une lumière intérieure à l'âme. D'où la thèse, chez Platon, de la réminiscence : « Connaître, c'est se ressouvenir ». Dans le Ménon, Socrate interroge un jeune esclave sur un problème de géométrie : comment construire, à partir d'un carré donné, un carré de surface double ? Où l'on retrouve l'ironie socratique et ses effets aporétiques, articulés à une pédagogie de la vérité : la maïeutique*, ou « art d’accoucher les esprits ».

platon

« SOCRATE.

-Maintenant fais attention quelle solution va se produire: s'il va se ressouvenir ou apprendre de moi.

MÉNON.

-J'y ferai attention.

S.

Dis-moi, mon garçon, sais-tu que le carré est une figure comme celle-ci ? L'ESCLAVE.

-Oui.

S.

-Alors, dans un carré, toutes ces lignes, il y en a quatre, sont égales ? E.

-Certainement.

.

(Socrate demande alors de considérer un carré A de deux pieds de long de côté.

Sa swface est donc égale à 4 pieds.

De combien de pieds sera la longueur du côté d'un carré B de suiface double, c'est-à-dire égale à 8 pieds?) E.

-Il est évident, Socrate, que cette longueur sera double.

S.

Tu vois, Ménon, que je ne lui enseigne rien et que je ne fais que le questionner.

En ce moment, il se figure qu'il sait quelle est la ligne dont doit se former l'espace de huit pieds.

Ne crois-tu pas qu'il a cette conviction ? M.

-Si.

S.

-Le sait-il donc ? M.

-Non, certes.

S.

-Il croit qu'il se formerait d'une ligne double? M.

Oui.

S.

-Regarde-le maintenant se souvenir progressivement, comme on doit se souvenir.

Réponds~moi, toi : tu dis que l'espace double se forme de la ligne double? ( ...

) Mais vois si tu crois encore qu'on le formera en doublant la ligne? E.

-Je le crois.

(Socrate va progressivement amener l'esclave à reconnaî­ tre son erreur.) S.

-Ainsi donc, mon garçon, le doublement de la ligne ne donne pas une surface double, mais quadruple.

E.

-C'est vrai.

S.

-Car quatre fois quatre font seize, n'est-ce pas? E.-Oui.

(La ligne de 4 pieds, obtenue en doublant le côté de A, donne donc un espace quadruple de A.

Mais la ligne de 2 pieds corres­ pond à une suif ace égale à A.

Comment faire pour obtenir B ? ). »

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