N'y a-t-il de bonheur que dans l'instant ?
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
[III.
Le bonheur introuvable]
Mais on doit considérer aussi que.
quelles que puissent être les précautions que je prends pour en favoriser l'arrivée.le bonheur dépend simultanément de trop nombreux facteurs indépendants de ma volonté pour que je puisseprétendre le maîtriser, même partiellement.
Rien, de plus, ne me permet d'affirmer que ce qui me rend heureux agitde même pour tous les hommes : il y a dans le bonheur trop d'éléments liés à la subjectivité ou même à la simplesensibilité individuelle, pour que ce qui le produit paraisse universalisable.Kant préfère en conséquence considérer que le bonheur n'est rien d'autre qu'un idéal de l'imagination, qu'on ne peutdonner comme fin à la vie morale, et qui n'est en rien lié à la vertu (on peut être malheureux en pratiquant la vertu,pourquoi pas heureux sans être vertueux ?).
Le philosophe allemand KANT a déjà rédigé son premier grand livre de métaphysique (ou plus exactement de critique de la métaphysique),« Critique de la raison pure » (1781), lorsqu'il entreprend une première approche de la morale avec les « Fondements de la métaphysique des moeurs » (1785) qui précéderont de trois ans son grand ouvrage sur la morale : « Critique de la raison pratique » (1788).
On connaît le résultat de cette critique de la métaphysique : sur les questions de l'âme (le sujet profond de notre expérience interne), du monde(le tout complet de la réalité, objet de notre expérience externe), et de Dieu(considéré comme fondement suprême de la totalité des êtres), nous nepouvons que nous livrer à des spéculations métaphysiques qui dépassent leslimites de l'expérience effective possible.
Un savoir métaphysiquetranscendant, portant sur la réalité non sensible (les noumènes), estimpossible.
Voilà ce que révèle la démarche critique, qui s'interroge sur lesconditions a priori de possibilité de la connaissance.
Une fois ce travailaccompli, KANT cherche à appliquer cette même méthode critique à la morale, en s'interrogeant cette fois sur les conditions de possibilité de l'actionmorale.
C'est cette investigation qui fait le contenu des « Fondements de la métaphysique ».
Et passant en revue les thèmes traditionnels de la philosophie morale, KANT ne manque pas de rencontrer la question du bonheur et, dans la deuxième section de l'ouvrage (« Passage de la philosophie morale populaire à la métaphysique des moeurs »), de mettre fortement en question cette notion en la rattachant non à la raison , mais seulement à l'imagination : « Il n'y a pas à cet égard d'impératif qui puisse commander, au sens strict du mot, de faire ce qui rend heureux, parce que lebonheur est un idéal, non de la raison, mais de l'imagination, fondé uniquement sur des principes empiriques, dont onattendrait vainement qu'ils puissent déterminer une action par laquelle serait atteinte la totalité d'une série deconséquences en réalité infinie.
»
« Un impératif qui puisse commander...
» Ceci ne prend pleinement sens qu'à l'intérieur du système de KANT .
On sait que pour lui, dans la nature, toute chose agit d'après des lois.
Mais notre monde humain n'est pas seulementcelui de la nature, il est bien plus spécifiquement celui de la culture.
Les hommes ne sont pas des choses, mais desêtres raisonnables, qui n'agissent pas tellement sous la pression des contraintes de la nature mais bien plutôt selonleur volonté.
Autrement dit, dans leurs actions, les hommes ont la capacité d'agir selon des principes, selon lareprésentation qu'ils se font de ce qui est raisonnable.
Eux aussi (comme les choses de la nature) obéissent à deslois, mais en tant qu'êtres de culture ils obéissent consciemment à des lois qu'ils se sont données eux-mêmes et quisont conformes à la raison.
Le malheur de l'homme tient à ce qu'il n'est pas entièrement un être raisonnable, qu'iln'est pas totalement déterminé dans ses actions par la représentation objective du bien.
Entre la loi et lui (cad sonvouloir) doit s'interposer le devoir qui s'exprime par des impératifs.
Mais KANT opère la distinction entre des impératifs hypothétiques et des impératifs catégoriques.
A chaque fois, il s'agit de l'homme conçu comme un sujet capable d'être déterminé pratiquement par la raison, et se posant laquestion de savoir si l'action qu'il va entreprendre est bonne ou non.
Ou bien cette action est bonne comme unmoyen obligé pour obtenir quelque chose d'autre, et l'impératif (qui est la formule par laquelle est déterminé l'action)est un impératif hypothétique.
Ou bien l'action qui doit être accomplie est bonne « en soi », elle est nécessaire parelle-même, elle est sans rapport avec un autre but, et l'impératif qui la commande est catégorique.
Le détour par cette grille conceptuelle est nécessaire pour comprendre ce qu'il en est du bonheur dans lesystème de KANT .
Il faut savoir aussi que KANT distingue, parmi les impératifs hypothétiques, ceux qu'il appelle « problématiques » (se rapportant à une fin seulement possible) et ceux qu'il appelle « assertorique » (se rapportant à une fin réelle).
En effet ,il dit : « Il y a une fin que l'on peut supposer réelle chez tous les êtres raisonnables, [...] un but qui n'est pas pour eux une simple possibilité, mais dont on peut certainement admettre que tous se leproposent effectivement en vertu d'une nécessité naturelle, et ce but est le bonheur.
L'impératif hypothétique quireprésente la nécessité pratique de l'action comme moyen d'arriver au bonheur est ASSERTORIQUE. »
L'impératif qui commande les actions à accomplir pour atteindre le bonheur n'est pas un impératif catégorique, mais.
»
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