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Pensez-vous que l'histoire soit dangereuse ?

Publié le 29/09/2005

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histoire

À première vue, il peut nous sembler parfaitement exact d’affirmer que l’histoire est dangereuse pour l’homme, que nous considérions l’histoire individuelle ou l’histoire collective de l’homme. En effet, l’histoire individuelle de l’homme le menace en le détournant de l’action concrète, ici et maintenant : il y a une quantité d’oubli absolument nécessaire à l’homme dans le seul intérêt de la perpétuation de son existence. De même, l’histoire collective est également un danger pour l’homme, dans la mesure où elle l’empêche de faire advenir un monde nouveau en lui présentant sans cesse à l’esprit le modèle stérilisant du passé. Pourtant, notre réflexion ne se bornera pas à un réquisitoire contre l’histoire puisqu’elle montrera dans quelle mesure celle-ci est nécessaire, sinon indispensable à l’home : si l’histoire est un danger, il n’en reste pas moins qu’elle peut être fort utile aux hommes en leur prodiguant un enseignement.

La question au centre de notre travail sera donc de déterminer si l’histoire individuelle et collective représentent des dangers pour l’homme ou sont au contraire des adjuvants dans la conduite de leurs vies.

 

 

I.                   L’histoire individuelle est dangereuse pour l’homme car elle est un obstacle à la perpétuation de sa vie

 

a.       L’histoire individuelle, un danger pour l’homme

Nous commencerons par dire que l’histoire individuelle est dangereuse pour l’homme. Par histoire individuelle, nous entendons l’histoire personnelle d’un individu, la mémoire qu’il conserve de ses propres expériences et de ses différentes incarnations au cours du temps.  Si nous entendons le concept d’histoire en ce sens, alors il ne fait pas de doute qu’elle est dangereuse, qu’elle représente une gêne insoutenable dont l’homme doit se libérer. En effet, l’homme serait condamné à mourir si injonction lui était faite de se souvenir de tout : de toutes les catastrophes historiques, ou de tous les évènements de sa propre existence. Il y a un coefficient de projection dans l’avenir et de concentration de l’esprit dans le moment présent indispensable à la perpétuation de l’existence. Celui qui obéit à un devoir de mémoire trop généralisé ne peut vivre. Nietzsche défend cette idée dans sa Seconde considération intempestive :

histoire

« I.

L'histoire individuelle est dangereuse pour l'homme car elle est un obstacle à la perpétuation de sa vie a.

L'histoire individuelle, un danger pour l'homme Nous commencerons par dire que l'histoire individuelle est dangereuse pour l'homme.

Par histoire individuelle, nousentendons l'histoire personnelle d'un individu, la mémoire qu'il conserve de ses propres expériences et de sesdifférentes incarnations au cours du temps.

Si nous entendons le concept d'histoire en ce sens, alors il ne fait pasde doute qu'elle est dangereuse, qu'elle représente une gêne insoutenable dont l'homme doit se libérer.

En effet,l'homme serait condamné à mourir si injonction lui était faite de se souvenir de tout : de toutes les catastropheshistoriques, ou de tous les évènements de sa propre existence.

Il y a un coefficient de projection dans l'avenir et deconcentration de l'esprit dans le moment présent indispensable à la perpétuation de l'existence.

Celui qui obéit à undevoir de mémoire trop généralisé ne peut vivre.

Nietzsche défend cette idée dans sa Seconde considération intempestive : « Mais le plus petit comme le plus grand bonheur sont toujours créés par une chose : le pouvoir d'oublier, ou, pourm'exprimer en savant, la faculté de sentir, abstraction faite de toute idée historique, pendant toute la durée dubonheur.

Celui qui ne sait pas se reposer sur le seuil du moment, oubliant tout le passé, celui qui ne sait pas sedresser, comme le génie de la victoire, sans vertige et sans crainte, ne saura jamais ce que c'est que le bonheur,et, ce qui pis est, il ne fera jamais rien qui puisse rendre heureux les autres.

Imaginez l'exemple le plus complet :un homme qui serait absolument dépourvu de la faculté d'oublier et qui serait condamné à voir, en toute chose, ledevenir.

Un tel homme ne croirait plus à son propre être, ne croirait plus en lui-même.

Il verrait toutes choses sedérouler en une série de points mouvants, il se perdrait dans cette mer du devenir.

En véritable élève d'Héraclite ilfinirait par ne plus oser lever un doigt.

Toute action exige l'oubli, comme tout organisme a besoin, non seulementde lumière, mais encore d'obscurité.

Un homme qui voudrait ne sentir que d'une façon purement historiqueressemblerait à quelqu'un que l'on aurait forcé de se priver de sommeil, ou bien à un animal qui serait condamné àruminer sans cesse les mêmes aliments.

Il est donc possible de vivre sans presque se souvenir, de vivre mêmeheureux, à l'exemple de l'animal, mais il est absolument impossible de vivre sans oublier.

Si je devais m'exprimer,sur ce sujet, d'une façon plus simple encore, je dirais : il y a un degré d'insomnie, de rumination, de senshistorique qui nuit à l'être vivant et finit par l'anéantir, qu'il s'agisse d'un homme, d'un peuple ou d'une civilisation ». Nous dirons donc que si l'oubli complet n'est nullement un idéal puisqu'il signifierait la nécessité d'un apprentissagesans cesse recommencé de toutes les compétences nécessaires à la perpétuation de sa vie, l'histoire demeure undanger pour l'homme lorsqu'elle accapare son esprit.

L'homme doit en partie oublier l'histoire pour pouvoir consacrerson esprit au moment présent et gouter au bonheur. b.

L'histoire comme discipline, un exemple pervertissant pour l'homme Mais c'est en un autre sens que l'histoire est dangereuse : parce qu'elle représente un exemple pervertissant pourl'homme.

Rousseau montre fort bien que l'histoire est toujours le récit des malheurs de l'homme, une sorte de réquisitoire contre la nature de ce dernier : « Un des grands vices de l'histoire est qu'elle peint beaucoup plus les hommes par leurs mauvais côtés que par lesbons : comme elle n'est intéressante que par les révolutions, les catastrophes, tant qu'un peuple croît et prospèredans le calme d'un paisible gouvernement, elle n'en dit rien ; elle ne commence à en parler que quand, ne pouvantplus se suffire à lui-même, il prend part aux affaires de ses voisions, ou les laisse prendre part aux siennes ; elle nel'illustre que quand il est déjà sur son déclin, toutes nos histoires commencent là où elles devraient finir ».

Emile, ou de l'éducation, Livre IV. A la lumière d'une telle thèse, nous pouvons penser que l'histoire est dangereuse car elle pervertit l'homme en luireprésentant des évènements où les mauvais instincts de l'homme se sont donnés libre cours.

Rousseau avait déjàfait le réquisitoire du roman dans la Préface de sa Nouvelle Héloïse en déclarant de manière surprenante que« jamais fille chaste n'a ouvert un roman ».

Dans Emile il fait également le procès de l'histoire en montrant dansquelle mesure celle-ci ne saurait jamais enseigner la vertu à l'homme.

De même que Platon avait banni le poète de lacité, Rousseau a banni l'historien de son programme éducatif pour le petit « Emile » car il la trouvait trop dangereuse. »

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