Peut-il exister des désirs naturels ?
Publié le 24/10/2012
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tout entier livrés aux impératifs de la survie ? La nature de l'homme, n'est-ce pas d'avoir des désirs autres que
simplement naturels ? Mais en ce cas, peut-on encore parler de nature ? Ne faudra-t-il pas bien plutôt dire que
le désir est ce par quoi un être spirituel s'arrache de toute nature et se sépare sans remède de l'animalité ?
I.
Des désirs naturels à la naturalité du désir
1.
La sensation est la seule norme absolue
Nous sommes des êtres de désir, telle est notre nature ; mais cela ne signifie justement pas que tous les désirs
soient eux-mêmes naturels : telle est la leçon qu'Épicure entend nous transmettre.
Comme tous les êtres
vivants en effet, nous sommes soumis à la polarité du plaisir et de la peine, qui viennent qualifier toute
sensation (toute sensation est plaisante ou déplaisante, à quelque degré que ce soit) ; et comme tout être
vivant, nous avons naturellement tendance à chercher le plaisir et à fuir le déplaisant.
Tout plaisir est un bien,
toute douleur est un mal : la sensation, juge infaillible de ce qui est agréable ou douloureux, est un guide qui ne
saurait nous égarer et qu'il suffit de suivre sans s'en écarter.
De ce point de vue, les animaux sont nos
modèles : ils nous donnent à voir ce qu'est une vie orientée par la sensation immédiate du plaisant et du
déplaisant ; seulement, à la différence des animaux, les hommes possèdent un esprit, et une imagination.
L'esprit les rend capable d'avoir des notions abstraites, qui doivent provenir des sensations pour être vraies.
Par l'imagination en revanche, l'homme devient capable de se projeter hors de l'instant présent, c'est-à-dire
hors du temps de la sensation ; de là vient qu'il peut s'égarer, et poursuivre un bien tout sauf véritable.
Parce qu'il n'écoute pas seulement ce que la sensation lui dit, l'homme est capable de désirer quelque chose
d'en fait déplaisant : alors que le plaisir est univoque pour Épicure (il n'y a pas plusieurs genres de plaisirs), le
désir devient avec l'homme qualitativement différencié.
Il y a d'un côté les désirs naturels, ceux qui ont la
sensation pour principe, et qui nous font désirer ce qui est en soi désirable, à savoir le plaisir.
Et il y a les
désirs qui ne sont pas naturels, parce qu'ils ne proviennent pas de la sensation, mais de l'imagination - et
ceux-là suffisent à faire notre malheur..
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