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Peut-on assimiler croyance et crédulité ?

Publié le 19/03/2009

Extrait du document

Analyse du sujet

 

-          Le rapport spontané de l’homme au monde et à lui-même est un rapport de confiance. Nous prenons le monde pour ce qu’il se donne, nous croyons autrui, nous nous fions à nos sentiments ou nos impressions. C’est ce premier élan que vient contrarier l’expérience de l’illusion : ayant été abusée, notre confiance naturelle se trouve ébranlée. Une telle déconvenue provoque une crise qui peut mener au repli sur soi et au découragement : que l’illusion soit possible semble invalider par avance toute prétention à atteindre le vrai ou à prendre appui sur quelque certitude que ce soit. Mais affirmer qu’une croyance n’est jamais assurée revient par conséquent à dire qu’il n’y a pas de critère possible pour établir une équivalence entre opinion et vérité, croyance et savoir.

-          On comprend alors que la question nous mène à nous poser le problème de notre rapport au monde, particulièrement dans le domaine de la connaissance. On devra alors aborder le thème de l’illusion voire de l’erreur.

-          Croyance = Du latin credere « croire, ajouter foi «. Il s’agit d’une attitude de l’esprit qui affirme quelque chose sans pouvoir en donner de preuves, avec un degré plus ou moins grand de probabilité. La croyance, définie ainsi, est alors synonyme d’opinion. Pour Kant, la croyance est en réalité le milieu entre l’opinion et le savoir, distinguée de la conviction et de la persuasion. Dans un autre sens (pas tout à fait étranger) la croyance consiste en un assentiment de l’esprit à une vérité transcendante, sans justification rationnelle. Dans ce cas, elle est synonyme de foi.

-          De plus, il faut distinguer, comme on l’a fait dès le début, les deux types de croyance : d’un côté l’opinion, de l’autre la foi. On ne peut pas traiter les deux dimensions de la même manière sans risquer de tomber dans une vue étroite et illégitime.

-          Or, la crédulité, et ce aussi du point de vue étymologique, consiste en une disposition trop rapide et trop facile à croire : elle semble donc être liée à la notion de croyance. Ce qu’il faut pourtant ici interroger c’est la nature du lien qui unit capacité à croire et crédulité (comme trop grande facilité à croire), et en ce sens naïveté. Ce lien est-il nécessaire et intrinsèque ou bien au contraire contingent et extrinsèque.

-          Ce qui est ici mis à la question c’est bien l’essence, la nature même de la croyance : toute croyance est-elle synonyme de naïveté ? Le croyance ne nous dit-elle rien d’autre sur l’homme que sa capacité, trop grande, à prendre pour vrai tout ce qui se présente spontanément à lui ?

-          A fortiori, ce qui est ici en jeu, à travers la question de la synonymie entre croyance et crédulité (à savoir tout croyance témoigne-t-elle d’une crédulité de celui qui la formule et la répand ?) c’est la distinction entre connaître et croire. Dans la vie courante, connaître et croire sont souvent employés comme des termes quasi équivalents : en effet, selon le degré d’engagement vis-à-vis de la personne que l’on renseigne, l’on dira tantôt « je crois que c’est à droite « ou l’on dira plutôt « je sais que c’est à droite «. Néanmoins, un tel glissement lexical est loin d’être anodin et apparaît d’emblée une nuance de sens absolument fondamentale. Si en employant le verbe «  savoir que « ne dit rien de plus que le verbe « croire que «, en tout cas il semble vouloir signifier quelque chose de différent. Ce qu’il faut comprendre ici, à travers cet exemple trivial, c’est que pour une seule et unique représentation, pour un même objet, se découvre des attitudes intellectuelles différentes.

-           Cela ne signifie pas pour autant que la distinction entre connaître et croire soit aisée à déterminer dans la mesure où il apparaît que l’un et l’autre se présuppose mutuellement : on peut passer ainsi de la croyance à la connaissance sûre et certaine, et si l’on connaît vraiment un fait, on y croit forcément. Au fond il s’agit ici de démêler la nature et le sens de chacune de ces trois activités intellectuelles. C’est en réalité, plus profondément, le fondement de ces catégories qui divisent notre vie en « domaines «, celui de la croyance et celui de la connaissance, qui est ici mis à la question.

 

Problématique

 

Toutes les formes de croyance, qu’il s’agisse de l’opinion (rapport à la connaissance) et de la foi (rapport à la divinité), traduisent-elles un rapport de confiance naïf sans valeur ? Quelle est donc la nature de la croyance, en elle-même ? Toutes les croyances sont-elles réductibles à la pure crédulité passive et naïve, dépourvues de toute signification et de toute vérité ?

« effet d'un abus de confiance : nous avons cru, à tort.

Croire, c'est s'en remettre à quelque chose ouà quelqu'un d'autre que soi pour juger.

Nous ne sommes, par conséquent, condamnés à l'illusion ou àl'erreur que pour autant que nous préférons croire que juger par nous-mêmes.

En ce sens, toutecroyance qui naît d'une confiance aveugle dans le but d'affirmer quelque vérité non fondée naîttotalement d'une crédulité, et ce en un sens absolument négatif pour le champ de la connaissance,car source d'illusion. · A cet égard, l'analyse que fait Descartes sur l'illusion est exemplaire.

Si l'illusion perceptive nous abuse, c'est que nous croyons le témoignage de nos sens et fondons sur lui nos jugements.

Ne pascroire, en ce cas, signifie refuser de laisser nos sens nous induire en erreur et conduire notrejugement (attitude bien plus respectable).

Un bâton plongé dans l'eau paraît brisé, mais si nousjugeons qu'il l'est, nous ne sommes pas victime d'une illusion, mais responsables de notre erreur.

Enelles-mêmes d'ailleurs, les données des sens ne sont ni vraies ni fausses.

Les illusions des sensobéissent à des lois d'organisation du champ perceptif tout aussi régulières que celles qui régissentnotre perception dite « normale ».

On comprend alors que l'opinion porte moins le saut de laresponsabilité que l'usage qu'on en fait : elle n'est pas en elle-même crédulité, seul l'usage qu'on enfait peut être qualifié de crédule (usage que l'on peut corriger).

C'est donc l'usage de l'opinion, quel'on sait non fondée en raison, qui est crédulité, alors que l'opinion, par nature, n'a pas affaire à un telrapport.® Descartes, Sixièmes réponses aux objections adressées aux Méditations.

II- La question de la foi : la croyance religieuse n'est pas crédulité parce qu'elle n'appartient pas au champ d'extension de la raison mais à celui du coeur · Le problème fondamental de la croyance ce n'est pas tant son existence que sa visée.

Quand elle vise à se substituer au raisonnement, fondé sur la logique (c'est-à-dire lorsqu'on s'en remet à uneautre instance que notre propre raison pour juger), alors elle est crédule et même irrationnelle et doitêtre, en tant que telle combattue.

Parce qu'elle est responsable d'erreurs plus irraisonnées etillégitimes les unes que les autres.

Mais ici, nous nous attacherons à étudier ce qu'il en est de lacroyance, non pas comme opinion, mais comme foi. · On pourrait ainsi expliquer la formule de Pascal « le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas » (formule souvent mal comprise) : en réalité, il s'agit ici de prendre conscience qu'il est desdomaines, comme celui de la divinité, qui sont impénétrables à la raison, et que seule la foi peutexpliquer.

Il en est ainsi de la croyance religieuse.

Son principe est par nature irrationnel, on ne peutavancer les preuves assurées de l'existence de Dieu, pour autant, la foi peut se définir comme cetteintime conviction qui parle au cœur et non pas à la raison.

Il ne sert donc à rien de soumettre lacroyance religieuse aux cribles de la rationalité.

Elle n'est donc pas synonyme de crédulité en tantqu'elle est hors de la portée de la raison (quand l'usage de l'opinion va contre la raison) : elle n'a doncaucun rapport avec la crédulité qui ne se définit que par rapport à la raison ; or, dans la foi, la raisonn'a pas son mot à dire. · On comprend alors que toute croyance, en tant qu'elle s'apparente à la foi n'est pas synonyme de crédulité dans la mesure où elle est hors de portée de la raison et qu'elle n'a pas à voir avec cettedernière.

On ne peut, ni ne doit, réduire la croyance comme foi à la rationalité.

On comprend alors quela foi est irrationnelle en tant qu'elle ne se place pas dans le domaine de la raison, elle est alorslégitime en ce sens qu'elle ne prétend pas, comme on fait usage de l'opinion, dire quelque chose sur laraison et la vérité rationnelle.

Elle joue sur un tout autre terrain, qui n'est pas totalement celui de lacrédulité en tant qu'elle emporte avec elle une charge significative forte. · De façon parallèle, on pourrait reprendre, dans cette perspective, notre analyse de l'illusion et en prolonger les conséquences : on doit la distinguer de l'erreur.

En effet, l'erreur, pour Spinoza n'estqu'une simple « privation de connaissance » (Ethique, LII, scolie de la proposition XXXV).

Nous avonsbeau savoir que le soleil est extrêmement éloigné de nous, nous continuons à la voir beaucoup plusproche qu'il ne l'est en réalité Or, cette croyance est respectable en ce sens, et en ce sensseulement, parce qu'elle est l'expression d'un certain rapport au monde, témoin de la condition del'homme dans le monde.

Elle est manifeste de la façon dont en se rapporte à lui originairement, et encela elle dit quelque chose de nous.

Dans cette perspective cette forme de croyance ne peut pasêtre dite crédule, puisqu'elle dit quelque vérité sur l'homme et la façon dont il se rapporte au monde. · Par ailleurs, si tout ce qui existe à une raison d'être (selon le principe de la raison énoncé par Leibniz), ce qui semble sans raison d'être a, en vérité, une raison d'être.

Or, c'est en comprenant quetoutes croyances ont une origine et une raison d'être que l'on comprendra pourquoi, en ce sens, ellesne sont pas absolument synonymes de crédulité. III- Les raisons de croire · Croire, c'est être ® croire, ce n'est pas seulement, ce n'est peut-être pas d'abord penser, c'est être.

Avoir des croyances, on est croyant, etc.

: c'est la raison pour laquelle les croyances sontvéritablement le signe de notre identité, beaucoup plus que les pensées que nous pouvons formulersur des sujets plus abstraits.Les hommes tiennent plus à leurs croyances qu'à leurs connaissances, comme si ces dernières ne leurappartenaient pas vraiment.

D'ailleurs, on n'a jamais vu quelqu'un oublier ses croyances, alors. »

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