Peut-on éviter les vérités gênantes ?

Toutefois la technique a ses limites, il peut-être tout aussi embarrassant de mentir ; et d?ailleurs ne ment-on pas généralement par lâcheté et facilité plutôt que par véritable précaution ? Remarquons que pour Kant la morale exclue fondamentalement le mensonge, même si celui-ci se justifie pour protéger un ami auquel un tiers voudrait du mal ; en effet l?impératif catégorique commande d?ériger sa loi personnelle en maxime universelle de la nature, or si le mensonge devient une loi universelle, plus aucun langage ne serait possible, puisque la contradiction y régnerait.             De plus, mentir ou se taire ce n?est que différer la vérité, la remettre à plus tard : le malade se rendra compte par lui-même de la dégradation de son état, falsifier un bilan ou simuler des sentiments sont des attitudes qui ne peuvent qu?offrir des échappatoires provisoires, non pas pour des raisons morales, mais pratiques. La psychanalyse a mis en évidence combien le déni n?était qu?une manière de répéter, une aliénation plutôt qu?une libération, ce n?est pas le mensonge ni l?évitement mais le refoulement, qui s?apparente davantage à l?oubli, qui peut offrir à l?homme un certain répit. Toutefois il faut reconnaître qu?il est des mensonges qui sont réellement efficaces et permettent l?économie d?une gêne, par exemple lorsque quelqu?un sollicite votre avis quant à son apparence.   II-Le problème de l?expressivité.               La gêne peut-être évitée si celui qui a à dire la vérité sait tourner les choses d?une façon telle qu?elle ne s?avère pas dérangeante et même, dont la prise de connaissance par autrui s?apparenterait plutôt à un soulagement, même s?il s?agit d?une mauvaise nouvelle. Le tact, l?humanité, la finesse sont ici des aides précieuses. Le ton, les gestes, par lesquels on va délivrer une information ne vont pas modifier le fond de celle-ci mais peuvent faire que la vérité soit simplement difficile à entendre et non pas nécessairement gênante.             Il est temps en effet d?affiner notre compréhension de ce qu?est une « vérité gênante », la gêne se joue toujours entre deux personnes au moins, elle naît dans une relation à deux, on n?est pas gêné pour soi-même.