Peut-on faire le bonheur d'autrui ?

Si les philosophes s’accordent à dire que la recherche du bonheur doit être le but suprême de toute existence, s’accorder pour le définir semble plus difficile. Le bonheur, la chance ou la fortune en latin, est défini par Hegel comme non pas « seulement un plaisir singulier, mais [comme] un état durable, d’une part, du plaisir affectif, d’autre part aussi, des circonstances et moyens qui permettent, à volonté, de provoquer du plaisir ». Il différencie ainsi le plaisir, temporaire et fugace, du bonheur, cet état de stabilité, de « point d’équilibre » (Epicure, Lettre à Ménécée, IIIe siècle av. J-C) où l’individu ne ressent ni trouble du corps, ni trouble de l’âme. Epicure, philosophe sulfureux de l’Antiquité, développe le tetrapharmakos, ce quadruple remède pour accéder au bonheur : le bonheur est accessible à tous, et la vie peut suffire à nous combler, si l’on ne craint ni les dieux ni la mort. Mais en accédant à notre propre bonheur, ne nuit-on pas ...