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Peut-on librement interpréter une oeuvre d'art ?

Publié le 18/12/2005

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Cela signifie que l'interprétation n'est pas ce qui masque l'oeuvre ou un sens qu'elle pourrait avoir en soi, mais elle ce qui fonde son statut d'oeuvre d'art. L'oeuvre n'existe en tant que telle que lorsqu'elle est perçue par une conscience, c'est-à-dire interprétée.             Ainsi, la structure phénoménologique de la conscience nous installe d'emblée dans un schéma interprétatif. L'interprétation fonde le rapport à l'oeuvre. Dès lors, interpréter ne peut plus se comprendre comme une manière de manquer l'oeuvre ; il s'agit bien plutôt de l'atteindre. Toutefois, une question reste encore posée concernant la nature de l'interprétation : celle-ci peut-elle être libre ?     III - Umberto Eco : l'oeuvre ouverte               Selon Umberto Eco, l'oeuvre d'art suppose toujours l'intervention d'un spectateur. En ce sens, il prend acte du schéma interprétatif que nous avons révélé. Or, comment doit-on comprendre cette interprétation ?             Afin de préciser son idée, Eco établit une différence entre Lecteur empirique et Lecteur Modèle - différence qui concerne les oeuvres littéraires, mais qui peut s'appliquer à tous les types d'oeuvres.

Il est toujours possible d'interpréter librement une oeuvre, au sens où l'on donne le sens que l'on veut à la création artistique à laquelle on se trouve confrontée. Toutefois, une telle attitude conduit manifestement à un relativisme qui s'énoncerait en des formules telles que : « Tous les goûts sont dans la nature «. Or, « donner le sens que l'on veut « à une oeuvre d'art signifie-t-il « l'interpréter librement « ?

En somme, c'est la notion d'interprétation qu'il s'agit d'éclaircir. Interpréter, est-ce changer la signification d'une chose au gré des circonstances ou bien participer à l'élaboration d'une signification ? Dans la seconde hypothèse, quelles sont les règles que doit alors suivre l'acte d'interprétation ? car il est certain que pour être libre, l'interprétation se doit de connaître ses limites et les bornes à ne pas franchir

En définitive, la question n'est plus de savoir s'il est possible de faire dire tout et son contraire à une oeuvre, en lui conférant des significations contradictoires et aberrantes, mais de se demander en quoi consiste l'interprétation libre – via l'analyse de ces deux concepts – et dans quelle mesure celle-ci est possible.

 

« conscience une chose qui pense.

Descartes établissait une sorte de parallèle entre la « chose étendue », le corps, et la « chose qui pense », la conscience. Husserl reste attentif à une propriété remarquable de la conscience : « Toute conscience est conscience de quelque chose ». Chaque fois que je pense, je pense bien à quelque chose.

Cela veut dire que le « Je », la conscience vise toujours autre chose qu'elle-même.

La conscience, si l'on veut, n'est jamais enfermée en elle-même, elle est toujours lemouvement de se dépasser vers autre chose, vers un objet.

Que la conscience soit toujours en mouvement versautre chose, cela signifie que toute activité psychique est toujours dirigée vers autre chose qu'elle-même.

On nepeut plus, comme tendait à le faire Descartes , assimiler la conscience à une chose ou à une intériorité. Précisément, ce qui différencie la conscience de toutes les choses, de tous les objets –qui sont ce qu'ils sont- c'est son caractère dynamique, qui fait qu'elle est toujours rapport à autre chose qu'elle-même, dépassement,mouvement, vers un autre.

La pensée porte toujours un rapport au monde.

Etre conscient, c'est d'abord êtreprésent au monde.Les existentialistes (surtout Sartre ) seront particulièrement attentifs à ce que Husserl nomme « intentionnalité », et qui désigne ce caractère de la conscience d'être toujours conscience de .

Voici comment Sartre commente cette formule : « Connaître, c'est s'éclater vers », s'arracher à la moite intimité gastrique pour filer là-bas, par delà soi , vers ce qui n'est pas soi, là-bas près de l'arbre, et cependant hors de lui .» La pensée est décrite ici en terme de mouvement, de dynamique, et non plus de « moite intimité ».Non seulement il n'y a pas de commune mesure entre les propriétés de la matière et celles de la pensée, mais il fautajouter que les choses et la conscience n'ont pas la même manière d'être.

L'existence propre de la conscience estcette capacité de se transcender, de se projeter vers autre chose, de porter un rapport au monde auquel, par-làmême, elle est présente.Husserl tire deux autres conséquences de ce caractère majeur de la conscience.

Si je perçois un cube, je déclare « Je vois un cube ».

Or, en toute rigueur, je ne peux pas voir les six faces du cube à la fois.

Cela signifie que ma conscience ne s'en tient jamais à ce qui lui est donné ici et maintenant.

Je vois deux faces du cube, mais j'anticipesur celles que je vais voir, ou je me remémore celles que j'ai vues.

Autrement dit, une autre caractéristique de laconscience est d'établir des synthèses, de relier ce qui est perçu ici et maintenant avec ce qui l'a été ou ce qui lesera.

Ce qui amène à dire que la conscience est temporelle, effectue ses synthèses dans le temps.Autrement dit, la citation signifie d'abord que la conscience est toujours le mouvement de se dépasser vers autrechose, de viser autre chose.

Mais il faut aussi comprendre que si ce que je vise (les deux faces du cube) a unesignification pour moi (je sais et comprends que j'ai affaire à un cube), c'est que ma conscience a la capacité dedépasser ce qui lui est simplement donné pour le lier à d'autres représentations passées ou futures.

Le but et l'ambition de la phénoménologie sont le retour aux choses mêmes.

Parlant de la révolution d' Einstein , Husserl déclare : « Ainsi Einstein ne réforme pas l'espace et le temps où se déroule notre vie d'être vivant ». Loin de comprendre ceci comme une attaque contre les sciences (auxquelles fut formé Husserl ), il faut le comprendre et comme une attaque contre le scientisme, et comme la nécessité d'un retour aux questions centralesdu sens : « De simples sciences de faits forment une simple humanité de faits.

Dans la détresse de notre vie cette science n'a rien à nous dire.

Les questions qu'elles excluent par principe sont précisément les questions qui sont lesplus brûlantes à notre époque malheureuse ce sont des questions qui portent sur le sens ou l'absence de sens detoute existence humaine. » L'ambition de la phénoménologie est donc de questionner le sens, de retrouver le sol où se déroule notre vie d'êtrevivant, de fonder une science de l'esprit en tant qu'esprit.

Celle-ci commence par la découverte de cette propriétéparticulière de la conscience d'être toujours présence et rapport au monde, et non intimité fermée sur elle-même.

Ence ses, la pensée existentialiste en est l'héritière, et la leçon de Husserl vaut toujours. Ainsi, la structure phénoménologique de la conscience nous installe d'emblée dans un schéma interprétatif.L'interprétation fonde le rapport à l'oeuvre.

Dès lors, interpréter ne peut plus se comprendre comme une manière demanquer l'oeuvre ; il s'agit bien plutôt de l'atteindre.

Toutefois, une question reste encore posée concernant lanature de l'interprétation : celle-ci peut-elle être libre ? III – Umberto Eco : l'oeuvre ouverte Selon Umberto Eco, l'oeuvre d'art suppose toujours l'intervention d'un spectateur.

En ce sens, il prend actedu schéma interprétatif que nous avons révélé.

Or, comment doit-on comprendre cette interprétation ? Afin de préciser son idée, Eco établit une différence entre Lecteur empirique et Lecteur Modèle – différencequi concerne les oeuvres littéraires, mais qui peut s'appliquer à tous les types d'oeuvres.

Le lecteur empirique, c'estn'importe qui, quand il lit un texte.

Celui-ci peut être alors lu de mille manières, aucune loi impose une façon de lireet, souvent, le texte fait office de réceptacle des passions du lecteur, qui proviennent de l'extérieur du texte et quele texte suscite fortuitement.

Or, à ce moment-là, le lecteur n' interprète pas le texte, mais il l' utilise ; il le prend pour le miroir de ses sentiments, alors que l'oeuvre est destinée à tous.

Au contraire, le lecteur modèle est celui qui prend acte de l'ouverture de l'oeuvre et de son appel àl'interprétation ; pour ce faire, il s'appuie sur des éléments objectifs présents dans l'oeuvre.

Par exemple, d'un livrecommençant par « Il était une fois », le lecteur s'attendra à une histoire plutôt destiné à un jeune public, où lefantastique à sa place, etc.. Dès lors, tandis qu'utiliser un texte revenait à le recouvrir de ses sentiments et à le masquer, l'interpréter. »

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